Le bout du rouleau

belthane

Une histoire courte sur la gloire du matin.

Elle ouvre les yeux. Reprend sa respiration. Encore un rêve où elle à le sentiment d'étouffer. L'espace d'un instant elle ignore où elle est, qui elle est. Une lumière blafarde filtre au travers des persiennes. Le réveil indique 5h48. Si elle bouge il va bouger. Elle l'entend respirer profondément. Dans douze minutes le réveil va sonner. Elle a peur. Elle redoute cet instant désagréable. Il va se blottir contre elle. Dans son dos elle va sentir son érection matinale. “La gloire du matin” qui a eu l'idée de donner un nom pareil à cela. “La douleur du matin oui!” 

Un morceau de viande dure qui vient se coller dans le bas de son dos. C'est désagréable. Et puis il y a tout le reste. Il la serre contre lui. Il renifle se cheveux. Elle va sentir son haleine putride sur son cou. Sa main un peu rugueuse va se poser sur son ventre. Si elle bouge. Si elle se déplace pour que son “machin” cesse de lui faire souffrir ses lombaires, il va encore prendre cela pour un signe encourageant. Ça la dégoute. Elle n'est pas encore réveillée. Lui dort encore et il veut déjà la baiser. 

Encore douze minutes et le réveille va sonner. Elle devrait se rendormir mais elle n'y parvient pas. Le simple fait de le sentir là à côté. De savoir qu'il va se tourner contre elle, ça l'angoisse. Ça la stresse. Elle n'a pas envie de faire l'amour. Il pourrait le comprendre quand même, l'accepter non? Au début elle trouvait cela excitant, mignon même. Mais tous les matins c'est insupportable. Elle l'aime c'est indéniable. Il est drôle, charmant, attentionné. Pourtant le matin elle le déteste. C'est peut-être elle qui n'est pas normale, car elle n'aime pas le sexe. C'est faux. Elle aime le sexe. Mais pas tous les jours. Elle ferme les yeux et soupire. Elle est fatiguée. Elle souhaiterai pouvoir dormir une nuit complète sans avoir à repousser les avances de son homme. 

6h07 elle a du s'assoupir à nouveau. Le réveil n'a pas sonné! Normal c'est samedi. Qu'elle cruche elle fait. Le samedi c'est pire! Il va vraiment vouloir faire l'amour. Elle le sens bouger. Ça y est il se colle contre elle. Elle a peur. Il n'y a pas d'autre mots. Elle a peur de son homme. Elle sent son sexe durci se frotter contre son dos. Elle a un mouvement de dégout. Comme si on lui collait une limace sur la peau. Il prend ça pour une invitation à continuer. Il frotte sa bite contre ses fesse.  Il passe sa main sous son t-shirt, lui caresse le ventre et remonte vers ses seins. Il la tripote. Elle reste stoïque. Ses tétons commencent à durcir. Elle déteste quand son corps la trahis. Non elle ne veut pas faire l'amour. Non elle n'en a pas envie! C'est comme ça. 

Sa main descends vers sa culotte caresse son pubis. Un doigt se glisse entre ses lèvres, malgré elle elle sent qu'elle devient humide. Elle a besoin d'uriner. Le poignet de son homme lui compresse la vessie. “Quel porc!” 

Elle se lève. Va aux toilettes. Alors que sa vessie est vidée et qu'elle s'essuie avec du papier, elle caresse son clitoris. Oui son corps en a envie. Mais pas avec lui. Pas comme cela. Pas au saut du lit comme des animaux. L'amour c'est bien plus que cela. Elle repousse son désir. Frustrée elle se brosse les dents et se dirige vers la cuisine. Elle prépare un petit déjeuner. Elle le laisse dormir. Elle va aller faire des courses et faire en sorte de l'éviter. Il va sans doutes se masturber sitôt qu'elle sera sortie. Elle n'est pas dupe non plus. 

C'est fou ce qu'elle l'a aimée. Ils s'amusaient, riaient sans cesse. Elle aimait faire l'amour avec lui, de façon torride. C'est peut-être elle qui est déglinguée? Non. C'est lui qui est obsédé. C'est lui qui doit partir. Sans ça elle va devenir folle. 

Elle a pris sa décision. Elle sait qu'il va accepter. De toutes façon il n'a pas le choix. 


Elle s'étire comme un chat. Elle est en diagonale dans son grand lit. Elle respire profondément. Elle a suffisamment dormis, mais elle profite encore un peu de ces instants magiques entre veille et sommeil. Et puis c'est dimanche matin, elle a tout le temps. Elle a envie d'aller courir dans le parc puis après elle ira se faire un brunch pour le plaisir de bien manger. Elle se sent tellement mieux depuis qu'elle est seule. Elle vit. Elle revit. Comme si un voile s'était levé et donnait du goût et des couleurs à la vie. Elle peut faire la fête, inviter ses copines à manger le soir, elle est libre. Même si elle est consciente que son homme lui manque de temps en temps. Même si un peu de tendresse lui ferait du bien. Machinalement elle glisse sa main entre ses cuisse. Elle commence à se caresser. Elle imagine des scènes folles alors que ses doigts s'enfoncent en elle. Elle jouit longtemps avec un plaisir exquis. Elle retire sa main et réalise qu'elle doit aller aux toilettes. Les jambes encore un peu tremblantes elle se dirige vers la salle de bain. 

Une fois qu'elle a terminé, elle approche sa main vers le rouleau et réalise qu'il n'y a plus de papier. Elle lance machinalement “chéri, le rouleau est vide tu peux m'en amener un autre s'il te plait!” 

Ses mots résonnent dans le vide alors qu'elle prend conscience qu'elle est seule. Fort embarrassée elle se dit qu'il y a des circonstances où vivre avec un homme peut être utile.

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