Le chagrin d'amour de la déesse mère

Eka Abassi

Une reine avait un jardin, dans ce jardin il y avait un arbre, la saison venue cet arbre portait un fruit. Le fruit était sacré. Il était offert à la Déesse mère au cours d’une cérémonie. Chacun dans le royaume connaissait cette règle et la respectait. Un étranger las de son voyage, en proie à la faim et à la soif mangea le fruit. Les gardes aussitôt l’arrêtèrent et le conduisirent repentant aux pieds de la Reine.

« J’ignorais les coutumes de ton royaume oh Reine Sans Pareille. Dis ta sentence. Je la mérite et je l’accepte. »

La Reine fut impressionnée par son courage, mais implacable dans son jugement ordonna que sa tête soit coupée sur le champ.

« Reine de Lumière, je m’incline. Fais ce qu’indique ta loi. Mais accorde -moi une nuit. Je suis promis à la Déesse mère. Cette nuit lui appartient. Tu me trancheras la tête demain. »

La Reine ne voulu pas croire l’impudent. Comment diable un vagabond pourrait-il être promis à la Déesse mère? Ses conseillers l’invitèrent cependant à la prudence. Le bourreau pouvait attendre demain. Sa lame n’en serait que plus affutée pour couper la tête de l’étranger. La Reine suivi l’avis de ses conseillers. Mais ordonna qu’il passe la nuit en cellule. La Déesse mère saurait bien le trouver s’il n’avait pas eu la témérité de raconter des mensonges.

La nuit venue la Reine alla vérifier par elle même que l’étranger n’avait pas menti et qu’il était bien promis à la Déesse mère.

Elle vit l’homme qui dansait nu dans la lumière de la lune. Elle le vit rire et chanter, déclamer des mots si doux à la lune que son coeur en fut touché. Comment un homme pouvait-il chanter l’amour quand il se savait promis à une mort certaine?

Le lendemain, les gardes lui amenèrent le prisonnier.

« Exécute ta sentence Reine de Feu. »

« La Déesse mère ne tient pas à te revoir cette nuit étranger? lui demanda la reine ».

  L’étranger ne répondit pas.

« Pourquoi ne te sauve-t-elle pas? »

« Je suis sauvé. J’ai passé une nuit avec elle. Notre nuit d’amour a fait trembler les étoiles. Elle m’ont d’ailleurs murmuré que le coeur d’une Reine aussi avait tremblé. »

A ses mots la Reine ordonna au bourreau de s’approcher. Mais au moment où la hache s’éleva elle l’arrêta.

« Veux-tu mourir Etranger? »

« Je suis à la Déesse. Vivre ou mourir que m’importe, je me sais aimé? »

La Reine ne pu se résoudre à faire mourir un tel homme. Elle ne put non plus se résoudre à en faire son époux. Elle lui rendit sa liberté et lui ordonna de quitter son royaume.

Désormais la saison venue le plus beau des jeunes hommes cueillait le fruit de l’arbre, l’offrait à la Déesse mère qui après une nuit avec lui ordonnait qu’on lui coupe la tête.

Ainsi fut le règne de la Reine Sans Pareille, de la Reine de Lumière, de la Reine de Feu depuis le passage de l’Etranger.

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