Le Chien du Junkie.

Aurore Dupin

Parce que les animaux nous tiennent compagnie même dans la dépravation.

     Il faisait totalement sombre dans les rues de cette ville inconnue alors qu'il n'était pas encore six heures du soir. De gros nuages noirâtres de pollution inondaient le ciel, lâchant sur les maisons délabrées une pluie plus toxique encore. Des flaques immenses se formaient dans les nombreux nids-de-poule qui parsemaient la chaussée puis, peu à peu, toute la route se retrouvait enseveli et seuls les trottoirs cabossés étaient un refuge pour quiconque osait sortir par ce temps.

     Un chien sortait courageusement d'une maison à la façade noircie. Il avait la peau sur les os, les yeux brillants de peur l'estomac hurlant famine. Son pelage était plein de nœuds et tellement sale qu'il était impossible d'en discerner la couleur, et il tenait dans sa gueule aux dents manquantes un sachet en plastique blanc,immaculé, sans trou et plein.

     Et il marchait dans les rues vierges de monde et submergées par les trombes d'eau. Il boitait quelque peu, salivait beaucoup et sursautait à chaque coup de tonnerre qui résonnait dans le ciel obscure. Et malgré cela, il gardait les oreilles droites et fixait de ses yeux effrayés une ruelle illuminée par le seul lampadaire marchant encore. Lorsqu'il s'approchait enfin de la rue, il commençait à baisser les oreilles et à courber l'échine.

      Dans un coin ténébreux, derrière un amas de cartons humides, un jeune homme était allongé, à même le sol, comme amorphe, sans vie et sans espoir. Son pantalon était troué de partout, il n'avait plus de haut, et malgré la fraicheur des gouttes pluvieuses qui s'échouaient sur son torse, il ne tremblait pas de froid. Il avait dans les mains une bouteille d'alcool fort, plusieurs pilules médicamenteuses et au niveau de son coude, une seringue vide pendait mollement mais encore à moitié enfoncée.

     Le chien s'approchait doucement de l'individu écrasé au sol, frottait son museau contre la joue froide et légèrement duveteuse. L'homme ouvrait les yeux, attrapait violemment le sachet baveux, et en sortait un petit récipient remplit de poudre blanche et une seringue gorgée d'un liquide verdâtre. Il s'enfonçait la seringue au hasard dans le bras, reniflait la poudre s'en même prendre la peine d'en faire des rails, et ordonnait au chien de retourner en chercher.

     Alors il partait, toujours en boitant, le poil mouillé, laissant derrière lui le jeune complétement stone rêver d'un journée ensoleillée. Il allait continuer à parcourir la ville à la recherche de cette came qui semblait rendre heureux son propriétaire, parce c'est ce qu'un bon chien ferait pour son maître. Parce que le chien est le meilleur ami de l'homme.

  • C'est horriblement triste et pardon de le dire mais je m'apitoie plus sur le chien que sur l'homme ! L'homme est dans sa bulle, il y mourra sans même s'en rendre compte mais le chien est maigre, affaibli, peureux, j'ai mal pour lui !!
    Superbe texte !

    · Il y a environ 8 ans ·
    Louve blanche

    Louve

    • Le chien est le héros, le protagoniste, le plus important. D'où le titre "Le chien du junkie" et non pas "Le junkie et le chien", cela n'aurait pas eu le même sens. Il souffre le plus pour le bien d'un maître qui n'en a plus rien à faire, ce qui est la réalité. Merci, cela me fait vraiment plaisir que vous aimiez !

      · Il y a environ 8 ans ·
      Squelette  fumee  fumerie 162911

      Aurore Dupin

    • Le chien, en effet, reste toujours fidèle à son maître, même celui qui est battu, c'est triste mais c'est ainsi ! Bonne journée Aurore !

      · Il y a environ 8 ans ·
      Louve blanche

      Louve

    • C'est exactement ça ! Bonne journée à vous aussi Martine !

      · Il y a environ 8 ans ·
      Squelette  fumee  fumerie 162911

      Aurore Dupin

    • C'est exactement ça ! Bonne journée à vous aussi Martine !

      · Il y a environ 8 ans ·
      Squelette  fumee  fumerie 162911

      Aurore Dupin

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