LE CHIEN, LE CHAT ET LA SOURIS

suemai

Voilà qui enfreignait toutes les règles aussi anciennes que la nuit des temps...

Un jour, un chien prit en chasse un chat, lui-même occupé à poursuivre une souris. Après une course effrénée dans un parc public, la souris se terra, le chat grimpa à un arbre et le chien hurla à qui voulait l'entendre.

Après un temps, notre jappeur calma ses ardeurs et fut attiré par l'odeur du reste de moelle d'un os déjà grignoté plus d'une fois. Qu'à cela ne tienne, il s'en saisit et le grugeait, comme seul sait le faire un chien affamé. Grr, grr, chantonnait-il, l'os en pleine gueule.

Passant sa langue dans la fente où se trouvait ce miel de chien, il leva la tête et avala l'os qui se coinça dans sa gorge. Après quelques secondes, il roula au sol sur le point de rendre l'âme.

Le chat, devant cette horrible destinée, juché sur une branche bien haut, décida, avec témérité, de lui porter secours. Il s'avança prudemment et se plaça bien à la hauteur du ventre du chien et il sauta y mettant toute son ardeur.

Le chien, pratiquement à l'agonie et étendu sur le dos, reçut le chat en pleine poitrine. L'os, sous l'impact, s'expulsa de la gorge du chien et s'éleva bien haut dans les airs. Seulement, l'os suivit, tant en ascension, qu'en descente une trajectoire rectiligne. Le chien, toujours la gueule ouverte et évanoui, allait, de nouveau, le recevoir en pleine gorge.

Le chat, sonné par sa chute, gisait près du canin et ne pouvait plus intervenir; la victime, inconsciente, s'apprêtait à le redevenir à jamais. Au moment où l'os allait pénétrer, la petite souris sortit de son terrier et fit un énorme bon. Elle réussit à faire bifurquer suffisamment l'os. Sous l'impact, la souris perdit conscience à son tour. Ils demeurèrent, tous les trois étendus au sol un bon moment.

Lentement les bêtes reprirent conscience et constatèrent, ahuris, la situation. Le chien remercia le chat qui à son tour remercia la souris, que remercia aussi le chien. Ils ne tarissaient pas d'éloges les uns envers les autres. Ils ne purent que devenir de sacrés copains.

Pourtant un grave problème d'éthique coupa court à la bonne humeur générale. Un chien, un chat et une souris s'apprêtaient à devenir potes. Voilà qui enfreignait toutes les règles aussi anciennes que la nuit des temps.

— Que diront les chiens, se plaignit le chien!

— Que diront les chats, se plaignit le chat!

— Que diront les souris, se plaignit la souris!

Ils se regardaient tout penauds, jusqu'à ce qu'un petit papillon les survole.

— Et bien, débuta le papillon, Je suggère que, trois fois par jour, vous vous poursuiviez, afin de faire bonne impression. Cela vous fera le plus grand bien, d'ailleurs. Lorsque tombera la nuit, vous pourrez vous retrouver à un endroit que seul je connais, et ainsi vivre votre amitié en toute quiétude. Suivez-moi, Je vais vous montrer.

Le chat, le chien et la souris suivirent sans poser de questions. Le papillon stoppa à l'entrée d'une ruelle se terminant en cul-de-sac, où, chaque jour, on déversait les restes d'une quantité incroyable de nourriture. Il s'agissait de restaurants qui levaient tous pavillons sur la même rue.

Voilà dit le papillon, vous pourrez passer vos soirées et vos nuits le ventre bien rempli et conservez cette amitié qui vous est si chère dorénavant. Sur ces dernières paroles, le papillon s'envola. Le chat, le chien et la souris vécurent heureux pour toujours, mais ne tentèrent jamais, au grand jamais, de faire d'enfants. Ouf…

 

Morale de cette troublante histoire : «Lorsque se produisent de ces phénomènes à peine croyables, regardez bien autour de vous, afin de vous assurez qu'un papillon traine dans les parages, car la sagesse du papillon arrive même à sauver les apparences.»    

Signaler ce texte