Le chiot éternel du maître

Je savais que nous finirions pas tomber d’accord.
Je savais que je finirais pas tomber un corps.

La mort n’a pas d’âge,
quand l’amour rend trop vieux ;
tournons donc des pages
avant qu’un temps pluvieux
ne dilue l’encre de l’écriture,
que l’histoire ne devienne illisible.
Laissons-les tomber en pourriture,
avant que ton existence risible

ne tombe sous l’œil d’un autre
et toi dans l’œil du cyclone.

Tu ne voudrais pas que l’on dise de toi
que tu prendrais n’importe qui sous ton toit ?
Ils sonneraient tous à ta porte ;
l’animal serait jaloux
et voudrait que tu lui apportes
sa nourriture de loup.

Je savais que nous tomberions d’accord.
Je savais que ça virerait au gore.

Je ne suis pas un animal indigne ;
je suis prêt à te partager,
choisissant de qui tu seras le cygne
pour que de quoi m’encourager
ne soit mis entre mes tendres mains ;
cet argent qui ravit tant l’humain.

Le loup ce soir te mord.
Le loup hurle à la mort.
Tendant sa gueule dégouttant le sang sous les astres,
encore il gueule, dégoûtant, pleurant un désastre
qu’il a lui-même provoqué.
Sous la lune il semble invoquer
pour attirer des chiens compatissants
qui le nourriront en le caressant.

Tu étais un animal aussi vois-tu,
même si ce n’était qu’un chiot glapissant.
Tu étais un chiot à mâles que l’on tue
s’il prend le risque d’être trop ravissant.

À force de trop remuer la queue
comme d’avaler le produit aqueux,
tu avais fini par perdre tout son sens.
Celui que je t’ai donné était meilleur,
et si le loup t’a vidé de ton essence
c’est qu’elle aurait risqué de s’enfuir ailleurs.

Je reconnais que tu étais mignon, oui mais
ce soir je veux que toi et moi dinions ; ces mets
que nous offre ta divine chair,
si tu savais combien ils sont chers
pour ceux à qui je l’ai déjà vendue
jusqu’à ce que ton cou ne soit fendu.

(écrit sur une impulsion le 29 août 2013)