Le cœur est

Quentin Bodin

Le cœur a peu de place et rare sont ceux qui s'y installent
Car il recrache aussitôt qu'il accueille
Les touristes de son village qui sonnent au seuil
Du bal de ses désastres provinciales.

Le cœur est le maire d'une ville sans homme
Ainsi que l'officier d'une brigade qui s'arme pour la guerre
Et qui donne pour ordre de mettre en joue tous les cerbères
Qui se comportent comme de splendides gentilhommes.

Le cœur est le roi d'un palais où luit la lumière de ses idéals,
Le berger d'un troupeau aux beautés chimériques
Qui s'ennivre de femmes ravissantes lors des fêtes bachiques
Qui célèbrent l'ivresse des mensonges virginales.

Le cœur est un ermite crucifié à lui-même
Sur une montagne cendreuse étonnamment blanche
Jusqu'à ce que sonne les cloches du dimanche
Qui tentent éperdument d'éffacer tous ses blasphèmes.


                                                                                               Quentin Bodin
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