Le crépuscule des vampires

Jo Todaro

     Laurent Fabius a été récemment nommé par François Hollande président du conseil constitutionnel. Une institution qui veille à la régularité des élections nationales et referendums et qui se prononce sur la conformité à la constitution des lois et règlements. Un conseil composé de neufs membres nommés par le président de la république et les présidents des chambres parlementaires ainsi que les anciens présidents de la république qui sont membres à vie. Le conseil des sages. Laurent Fabius est donc président de ce conseil des sages. S'agit-il d'une blague ? Il me semble nécessaire d'effectuer un petit rappel historique destiné aux plus jeunes ou aux amnésiques.

     Fabius a été ministre du budget entre 1981 et 1983, de l'industrie et de la recherche de 1983 à 1984, premier ministre de 1984 à 1986, président de l'assemblée nationale de 1988 à 1992, puis de 1997 à 2000, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de 2000 à 2002, ministre des affaires étrangères de 2012 à 2016 puis président du conseil constitutionnel. Un vrai CV d'intérimaire. N'importe quel citoyen qui présenterait un tel curriculum se verrait interroger sur son instabilité. « Comment expliquez-vous que vous ne parveniez pas à vous inscrire durablement…. ». Bref. Fabius est venu, il a tout vécu, il a tout vu, il a tout vaincu. Même son procès. Entre 1984 et 1985, alors qu'il est premier ministre, la France achète des poches de sang qui s'avéreront contaminées par le virus du Sida ou de l'Hépatite C. Ce sang est malgré tout utilisé et contamine 4000 transfusés et 1025 hémophiles. Les procès de « l'affaire du sang contaminé » ont lieu de 1992 à 1999. Sont cités à comparaître Laurent Fabius, premier ministre, Georgina Dufois, ministre des affaires sociales, Edmond Hervé, secrétaire d'état à la santé, Michel Garretta, médecin et directeur du centre national de transfusion sanguine, Jean-Pierre Alain, médecin au centre national de transfusion sanguine, Jacques Roux, médecin et directeur général de la santé et Robert Netter, médecin et directeur du laboratoire national de la santé.. Pour un verdict accablant. Les quatre médecins sont condamnés : Garretta, 4 ans de prison ferme, Alain, 4 ans de prison ferme, Roux, 3 ans de prison ferme, Netter, 1 an de prison avec sursis. La justice est moins sévère avec les personnalités politiques. Fabius est relaxé. Dufois également. Seul Edmond Hervé est condamné pour manquement à une obligation de sécurité ou de prudence, mais dispensé de peine, au motif qu'il avait été « soumis, avant jugement, à des appréciations souvent excessives ». En 2003, la cour de cassation confirme un non lieu général qui clôt définitivement ce scandale sanitaire.

     Et après ? Simplement condamnés à se faire oublier, Edmond « j'ai rien fait » Hervé a probablement dû se retirer pour élever des chèvres au fin fond de l'Auvergne et Georgina « sans foi ni loi » Dufois doit faire du tricot sur le plateau du Larzac. Mais Fabius, lui, est toujours là, au premier rang du grand défilé républicain hautain, dressé comme un cactus qui nous défie de ses épines, ou aiguilles devrais-je dire. Fabius c'est l'outrecuidance de la France, ou plutôt de ce qu'ils en ont fait, à force de cracher leur orgueil, leur vanité, leur prétention sur des valeurs auxquelles nous avons voulu croire. Fabius, c'est Emile Louis à qui on n'aurait pas retiré le permis. Un parasite merdicole caché derrière le masque d'un super héros républicole. Fabius, c'est l'antithèse de la Res publica, la chose publique, le bien public. Un colosse de Rhodes dont les méthodes m'incommodent, un épouvantail symbole de l'apologie de cette oligarchie du mépris et de son arrogance maladive envers le petit peuple de France que nous sommes. Un vampire à la conscience vaporeuse, aux canines acérées, brandissant fièrement la dépouille de l'exemplarité et qui s'exhibe dans son tablier de boucher dégueulasse que même Gama plus blanc que blanc ou Dash deux en un ne parviendront pas à raviver. Un grand malade, malade de cette addiction au pouvoir qui provoque en moi des spasmes vomitifs, un criminel toujours en liberté et qui continue à errer dans les plus hautes sphères d'une république qu'il a jadis ensanglantée mais qui continue de lui témoigner son éternelle reconnaissance en lui versant chaque mois des émoluments puisés dans les coffres insondables des deniers publics, dans cette tirelire collective gigantesque que nous contribuons tous à alimenter. Il s'agit donc un peu de notre argent, du vôtre, du sien, du tien, du mien. Sans aucune concertation préalable et sans que cela ne froisse personne. La dérive de la télé réalité hissée jusqu'aux sommités du système. Bienvenue en république démocratique de Croc-Lantah. Avec une légère modification des règles du jeu : le totem d'immunité est la propriété exclusive de Laurent Fabius. A vie.

     Je sais parfaitement que ces quelques lignes auront la même résonnance qu'un crachat dans l'océan ou qu'une boule de neige lancée sur un glacier. Il faudrait qu'un devienne cent, puis mille, dix-mille, cent-mille pour que les descendants de Machiavel accrochés tout en haut de l'échelle daignent baisser leurs yeux dédaigneux et feignent de nous entendre. Qu'importe. Je préfère poursuivre mes gargarismes au sirop d'André Gide : « Le monde ne sera sauvé, s'il peut l'être, que par des insoumis ». Le spectacle offert par les marionnettistes n'a plus aucun charme, la magie n'opère plus, les ficelles sont devenues trop évidentes, elles ont grossi sans cesse pour devenir de véritables cordes qu'ils attendent que l'on saisisse pour nous voir nous balancer comme des pantins désarticulés soumis aux caprices de leurs mains rougies. Comment peuvent-ils encore rêver de nous voir croire au principe même de la république au sens noble et du suffrage universel devenu outrage universel ?

     Je tente tout de même de me consoler. Fabius finira bien par crever. J'espère avant moi. Je posterai sans doute ce jour là un billet d'humeur qui trahira ma satisfaction. J'ai déjà une vague idée pour le titre : « Nosferatu a disparu ».

« Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. » Constitution française de 1793 - article 35

  • Le simple fait que des évènements similaires se soient déroulés dans d'autres pays suffit-il à les excuser sur le sol français ? J'entends bien vos arguments, j'avais 20 ans en 1986. Je dénonce simplement le fait que les médecins concernés par ce scandale ont été condamnés alors que les personnalités politiques ont été épargnées. Trouvez-vous aussi une justification à de tels agissements ? Êtes-vous capable de vous mettre une seule seconde dans la peau et dans le cœur d'une victime ou d'un proche ? Tel est mon cas ! Vous faites de ces lignes la lecture que vous voulez bien en faire. Lisez "Le retour du tsar", vous vous apercevrez alors de mon impartialité politique. Pour en revenir à Fabius, la décence aurait dû l'inciter à se mettre en retrait des plus hautes fonctions publiques. Je dénonce cette justice à deux vitesses. Le citoyen ordinaire doit avoir un casier judiciaire vierge et présenter un certifier de bonne vie et mœurs pour postuler à un quelconque poste au sein de l'administration. Deux poids, deux mesures. Juppé condamné, Sarkozy empêtré dans plusieurs affaires, Fabius... Tous ces élus et réélus continuent de nous diriger sans avoir le sentiment de devoir rendre le moindre compte. Si vous excusez ou validez ces agissements, je ne peux m'y résoudre. Jamais.

    · Il y a environ 8 ans ·
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    Jo Todaro

  • Parce que votre jugement de Fabius n'est pas partisan? ( Fabius ... dressé comme un cactus qui nous défie de ses épines)
    En ce qui concerne le sang contaminé, c'est facile de juger sans se reporter à l'époque : les scientifiques ont mis longtemps à cerner le mal sans comprendre tout de suite comment il se propageait . ILs ont cru pendant un certain temps par exemple que les séropositifs non-malades étaient des porteurs sains, il a fallu que la maladie finisse par se développer chez eux pour que les médecins comprennent. Cela a été la confusion dans la plupart des pays mais la France est le seul pays où cela a dégénéré en affaire d'état. Et pourtant , si la France n'est pas la première à avoir institué le dépistage obligatoire, elle est dans la bonne moyenne après l'Autriche et la Norvège mais avant la Grande Bretagne et l'Allemagne. C'est vrai que du sang non chauffé a continué à être distribué aux hémophiles déjà séropositifs mais cela s'est fait aussi dans d'autres pays , la Suisse par exemple a continué à distribuer des produits non traités jusqu'en avril 1986.

    · Il y a environ 8 ans ·
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    arzel

  • Je sens, dans vos quelques mots, une réaction partisane. Il ne s'agit aucunement d'un article militant. Je ne juge pas l'appartenance de l'homme à une quelconque mouvance politique, je juge simplement l'homme. Enfin, pour vous répondre précisément, il me semble que le remplacer par un élu qui aurait une profonde considération pour la noblesse de la fonction publique serait une éventualité à étudier. Je sais, suis un éternel utopiste.

    · Il y a environ 8 ans ·
    12509615 453585204836030 4356624191147581873 n

    Jo Todaro

  • Vous voulez le remplacer par Sarko? ou Marine peut-être.....

    · Il y a environ 8 ans ·
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    arzel

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