Le Fascisme Ordinaire, seconde partie

Dominique Capo

Réflexion sur notre société actuelle, suite


Cette ségrégation que j'ai décrite dans mes deux textes d'hier, en la nommant "Fascisme Ordinaire", j'en maintiens l'expression, et je l'assume totalement. Car cette ségrégation ou Fascisme conduit progressivement, insidieusement, aux pires monstruosités que nous avons connu jadis. Et qui, aujourd'hui, sournoisement, lentement, en désignant l'étranger, l'autre - et de préférence noir, arabe, musulman, différent quoi - comme l'ennemi, celui qui est à l'origine de tous les malheurs de ces moutons.
Parce que ces moutons sont la masse du peuple, son immense majorité - ce qui fait leur force - individuellement, ne réagirait pas forcément aussi outrancièrement, et ferait preuve de raisonnement, de davantage de tolérance. Car il est plus simple de s'en prendre à une minorité - juifs du temps des fascismes ; noirs du temps de la ségrégation, musulmans aujourd'hui - en les montrant du doigt, et en disant que tout est de leur faute. Ils ne sont en fait que des boucs émissaires. Ils servent à justifier cette peur, cette violence, qui est la seule solution trouvée par ces moutons pour répondre à leurs angoisses, pour tenter de trouver un remède aux difficultés et aux épreuves personnelles ou collectives qu'ils traversent.
C'est plus commode, il en a toujours été ainsi à travers l'Histoire. Mais, dans une société comme la notre ou ces modes de fonctionnement ont été analysés, décryptés, compris, raisonnés, je ne peut accepter que ces moutons s'y adonnent et s'y réfèrent encore, alors qu'ils ont les connaissances a portée de la main - de clic -, pour réaliser qu'ils sont dans l'erreur ; pire, qu'a persister dans cette voie, ça ne fait qu'envenimer les choses.
Il suffit de regarder la montée des extrêmes dans tous les pays occidentaux actuellement, pour s'en rendre compte, ce retour aux nationalismes exacerbé, alors qu'on devrait avoir tiré les leçons de nos erreurs passées. D'où cette ségrégation ordinaire, ce Fascisme ordinaire, toujours aussi présent dans l'inconscient collectif, lorsque la masse des moutons se retrouve entre elle, comme un réflexe animal, qui n'a rien à voir avec l'intelligence, la sagesse, ou la raison dont l'homme est pourvu quand il fait l'effort de se démarquer de cette masse.
Mais là aussi, sa peur est trop forte, se démarquer, veut dire "être différent", veut dire qu'à son tour, on va être montré du doigt, susceptible d'être rejeté, maudit, méprisé. Dans notre société si individualiste, si égocentrique, si égoïste, paradoxalement, ce que l'immense majorité de ces moutons désirent - à n'importe quel prix -, c'est d'être intégré, accepté, dans la masse. C'est une façon de se rassurer, de se sentir moins seul, d'avoir l'impression d'être utile à la communauté - voire indispensable. Et donc, n'ayant aucun motif d'être mis à l'écart ou moqué, rejeté, etc.
Évidemment, la encore, ceux et celles qui raisonnent ainsi, qui se comportent ainsi, font fausse route. Ils sont dans l'erreur la plus absolue. Chacun de ses moutons, tout le long de son existence, est confronté a des aléas qui le distingue forcément, inévitablement, des autres moutons. Par son parcours personnel, par ses expériences, par son milieu socio-culturel, par sa religion, par ses convictions, par sa personnalité, par ses capacités, par ses forces et ses faiblesses, par ses victoires ou défaites, j'en passe. Nous sommes des individus avant tout, avant d'appartenir a un groupe, quel qu'il soit. Et rien ne changera ce fait.
De plus, toute cette masse de moutons qui se tente vainement de se rassurer en se basant sur ces principes erronés galvaudés, peuvent, un jour ou l'autre, pour n'importe quelle raison, devenir l'autre, celui qui ne correspond plus aux normes de la masse de moutons, à laquelle il appartenait jusque là. Et de mouton contribuant à ce désir de protection, cette envie d'éloigner la peur, le danger, la difficulté, de soi, c'est lui qui en est le sujet.
L'exemple tout simple, je l'ai déjà décrit hier. Je suis handicapé, malade. Je l'écris régulièrement. Je décris mes doutes, mes peurs, mes souffrances, mes blessures, etc. dues a ce que je viens de décrire du comportement de cette masse de moutons. Comme je le fais souvent, et comme je l'ai fait dans mes deux textes d'hier également. Mais ce a quoi ne songent pas cette masse de moutons, c'est qu'un jour, individuellement, certains, ou certaines, peuvent se retrouver à ma place. Maladie, accident, parce que trop jeune, trop vieux, parce que roux, parce qu'il a une particularité physique, mentale, émotionnelle, etc, il ou elle se retrouve dès lors inévitablement, inexorablement, mis en dehors de la masse.
Toujours cet effet de protection, cette peur, ce sentiment de danger, qui domine - alors que notre intelligence, raison, ne devrait pas nous y pousser si nous la laissant avoir de prise sur nous.
Seulement, la laisser gangrener cette masse de moutons, est plus simple, plus facile, ne demande ni raison ni se demander pourquoi j'agis comme ça, et comment je peux combattre ce comportement pour améliorer mes relations avec les autres. Non, ces questions, lorsqu'on appartient a cette masse de moutons, on ne se les pose pas ; on se laisse porter par l'effet de groupe, et quand il y quelqu'un, ou groupe plus minoritaire, qui apparait, naturellement parce qu'on se laisse porter par cet effet de groupe, on se laisse porter : forcément, c'est l'autre, l'étranger, le différent, celui qui ne me ressemble pas, qui n'est pas comme moi et cette masse de moutons a laquelle j'appartiens, qui est a l'origine de mes problèmes.
Cette éternelle discrimination, ce fascisme ordinaire, encore et toujours. Et comme je le disais hier, ce phénomène est encore grossit, démultiplié, visible, sur internet, et notamment un réseau social comme Facebook. Ou cette éphémérité, cette superficialité, cette non acceptation d'accepter la main de celui qui n'appartient à la masse de mouton, quand cet personne différente tend la main a l'un de ses membres, est symptomatique. Quelqu'un qui appartient à cette masse de moutons, a moins d'accepter de s'en démarquer, de faire prévaloir son individualité sur l'effet de masse, refusera cette main tendue. Alors que s'il n'appartenait pas à cette masse de moutons, il serait plus enclin à l'accepter, à être tolérant, à ouvrir sa porte a l'autre.
Pour faire parti d'un nouveau groupe, évidemment, dans le même but que parce qu'auparavant il appartenait a cette masse de mouton. Car nous avons tous besoin d'appartenir a une communauté, quelle qu'elle soit. Seulement, appartenir a cette communauté, ne veut pas dire s'y soumettre systématiquement, automatiquement, sans réflexion ni raisonnement individuel. Ça ne veut pas dire ne pas s'en démarquer lorsque certains des principes, des comportements, de celle-ci, conduit a se transformer en ségrégationnistes ou fascistes ordinaires.
Pour ma part, c'est ce que je constate quotidiennement ici, de la part de ces personnes que je tente vainement de solliciter pour créer un lien amical, pour un échange constructif, pour enrichir nos particularismes des différences de l'autre. Je fais primer l'intelligence et la raison sur l'effet de masse des moutons auquel ils se soumettent, auquel ils contribuent, pire, qu'ils désirent ; alors que, paradoxalement, ils s'en défendent parce qu'ils publient sur leurs murs, ou dans les groupes ou ils sont inscrits. Alors que, justement, ils ne font qu'alimenter tout ce ce que je viens de décrire. Je devrais dire "elles", plutôt, puisque ce sont des femmes que je sollicite généralement.
Aucun désir de draguer de ma part, je tiens à le souligner, pour les mêmes raisons que j'ai décrites plus haut. Juste ce désir de partager, comme n'importe qui de "normal", amicalement, malgré le fait que je soit handicapé, fragile, etc. Ce sentiment d'être vu comme normal, et accueilli, accepté, dans leur environnement, virtuel ou réel, comme quelqu'un de "normal".
Je ne le nie pas, je compense mes défaillances physiques par une intellectualité exacerbée, par une soif insatiable de découvrir de nouvelles connaissances, de nouvelles facettes du savoir, des rapports humains, au monde, à l'univers. Je creuse chaque jour davantage dans ces domaines, et bien d'autres, comme le montrent de moi mes textes par lesquels je dévoile mes interrogations et mes réflexions sur tel ou tel sujet de société, sur le devenir de l'homme, etc.C'est ma force, c'est ce qui me permet d'endurer tout le reste, d'endurer tout ce que je décris des épreuves qui sont les miennes de par mes particularités, objet de dédain, de rejet, de moqueries, de souffrances, de peur, de crises d'angoisses, etc.Qui remontent loin parce que ce comportement de cette masse de moutons dans la norme , j'en suis victime depuis mon enfance.
Mais n'oubliez jamais qu'un jour, c'est vous, moutons dans la norme, qui pouvez être a ma place. Et que ce jour là, vous verrez très vite que cette masse de moutons vous éjectera du groupe parce que vous n'en faites plus partie.
Vous verrez vos contacts, amis, connaissances - virtuels ou réels - fondre comme neige au soleil. Ils se diront, tout comme cous tant que vous en faites partie : "Après tout, j'ai mes problèmes, j'ai ma famille, j'ai mon travail, j'ai mon quotidien, etc. Qu'il ou qu'elle se débrouille ; ce qui compte avant tout, c'est moi ; voire, ceux et celles qui comptent vraiment à mes yeux. Lui, elle, maintenant qu'il est au dehors de ça, ça ne me concerne plus".
Ce fameux conducteur de train d'Auschwitz dont je parlais hier. Qui fait comme les autres./ Sauf que cette fois, parce que vous vous différenciez de la masse, vous serez dans le train vers le camps de la mort, plutôt qu'à la place de celui qui se soumet au diktat de la masse. Et ce jour là, vous vous direz comme j'aimerai que ce conducteur de train - ancien collègue, ami, connaissance, contact, relation, membre de la famille, etc., ou anonyme tout simplement - ne réagisse pas comme moi si j'étais a sa place. Comme j'aimerai qu'il ne soit pas indifférent, ségrégationniste, intolérant, moqueur, qu'il ne me rejette pas, qu'il ne soit pas ce fasciste ordinaire que j'ai été lorsque j'étais a sa place.
Il est vrai cependant qu'ayant agi jusque là ainsi, pourquoi celui dont vous solliciteriez la compassion, l'amitié, l'indulgence, la tolérance, pourquoi il agirait autrement que vous, vous qui en avez fait de même avec des personnes différentes toute votre vie ; avant que votre vie ne vous fasse devenir, à votre tour, quelqu'un de différent, quelqu'un d'en dehors de la masse de moutons. Donc, c'est à vous de changez maintenant, que ce soit virtuellement ou dans le réel, si vous ne souhaitez pas qu'un jour cela vous arrive a votre tour...

  • Impressionnant plaidoyer qui au fur et à mesure qu'il s’étoffe devient de plus en plus confus ! Notre problème sociétal actuel est qu'il est fait de milliers de problèmes qui sont donc tous des cas particuliers et qu'il est donc de mauvais aloi de faire un amalgame afin d'essayer de résumer, voire de résoudre une situation (au final très répétitive à travers le temps et les époques) sur un raisonnement au final très simpliste.

    "L'équilibre de la nature est une théorie qui suggère que les systèmes écologiques sont généralement dans un équilibre ou une homéostasie stable, ce qui veut dire qu'un petit changement dans un paramètre particulier (la taille d'une population particulière, par exemple) sera corrigé par un feedback qui ramènera le paramètre à son "point d'équilibre" d'origine avec le reste du système."

    · Il y a plus de 5 ans ·
    Gaston

    daniel-m

    • Un commentaire pour Daniel. Je comprends bien l'équilibre naturel des choses. mais cet argument ne devient-t'il donc pas une justification toute "naturelle" pour évincer l'élément différentiateur? Et si la nature qui rejette les déviations par rapport à la norme est également capable de s'adapter de facon à créer l'évolution des espèces, alors on se mord la queue. D'un coté, la nature tend vers une constante, de l'autre, elle vise à s'adapter...
      Dominique, désolée, mais... Et si ces rejets n'étaient pas un rejet de ce qui te rend visiblement différent, mais tout simplement un désir de ne pas asservir une relation amicale à ce qui te rend différent? Mon mari est un homme cruel et sans aucune pitié. Il n'est pas capable de ressentir de la compassion pour qui que ce soit. Je le considère handicapé émotionnel. Il est très malade et il va utiliser sa condition pour piéger son entourage. Regardez-moi, je suis misérable et pauvre. Je le connais et je le juge (et le condamne) pour ce qu'il a fait à ma fille (et je me condamne moi aussi). Je ne te connais pas, mais le handicap/la maladie est souvent utilisé par des gens comme mon mari pour asservir une relation (j'en sais quelquechose!!!). Et donc je pense que les gens (comme moi par exemple) ne vont pas spontanément répondre positivement à la demande de quelqu'un qui est différent. C'est moi qui approche, je ne me fais pas approcher. Les gens que j'approche cependant sont généralement très différents de moi et des autres... : )

      · Il y a plus de 5 ans ·
      Default user

      lucieangegi

    • Personnellement, j'estime que c'est de la différence que vient la richesse des échanges, de l'amitié, des dialogues, des points de vue, etc. Cela a toujours été mon credo. Nous sommes tous différents, à un niveau ou à un autre. Et c'est justement parce que nous sommes différents qu'une relation amicale peut ètre riche, fructueuse, enrichissante, passionnante. Les 2 ou 3 personnes amicales que j'ai - je pense à l'une d'elles notamment - sont différentes de moi, et c'est grace a cela, parmi d'autres choses, que nos liens sont si solides malgré les années, les épreuves, les difficultés, les blessures - que ce soit dans mon cas ou dans le leur. Quant à ne pas asservir cette relation amicale du fait de cette différence, je le répète, nous sommes tous différents. Et en ce qui me concerne, cette différence est visible au premier regard : angiome partiel sur le cité gauche de mon visage, hémiplégie du coté droit de mon corps. En plus de mon intellectualité exacerbée, qui, elle, n'est visible que si on commence à échanger avec moi. Donc, cette différence, comme bien d'autres - trop petit, trop gros, trop mince, cicatrices, blessures, manque un oeil, une oreille, etc. détermine immédiatement le regard et la façon de se comporter de celui qui est "davantage dans la norme", malgré le fait de sa différence - moindre et acceptable. En outre, pourquoi cette amitié devrait-elle asservie par cette différence ; c'est un atout, une richesse, pas une entrave ou une faiblesse. Enfin, c'est ainsi que je le conçois. Et si la nature est capable de s'adapter, l'homme aussi, et qu'elle rejette les déviations pour éliminer l'élément différenciateur, n'est ni contradictoire ni paradoxal. C'est complémentaire, l'un ne peut aller sans l'autre. Ce sont deux aspects de la nature qui la rendent si complexe, si pleine de possibles. Comme c'est le cas pour l'homme....

      · Il y a plus de 5 ans ·
      4

      Dominique Capo

    • Je suis absolument d'accord avec tout cela. D'ailleurs, mes modestes écrits publiés sur ce site en attestent :o) Ce que je veux dire c'est qu'il y a tellement de cas de figure différents, tellement d'idées, de cultures, tellement d'humanités différentes qu'il est difficile d'établir dans tout cela une règle unique de bonne conduite. Oui heureusement que nous sommes tous différents, oui, heureusement que nous nous complétons ... mais il y a toujours des antagonistes. Je m'estime très tolérant dans mon petit collectif et pourtant je fais en ce moment des mains et des pieds afin de pouvoir acheter une modeste petite maison à un peu plus (de 50 km) et un peu plus haut dans la forêt, afin d'échapper à ces cassos sans éducation, qui ne savent même pas ce que le mot civisme veut dire et qui me pourrissent la vie sans même s'en préoccuper ! Je pense que si javais 50 ans de plus à vivre, je serai ensuite contraint de m’exiler à St Pierre et Miquelon afin d'éviter cette nouvelle peste qu'est l'inculture et l'incivilité de mes semblables. Le vivre ensemble et la tolérance ne sont hélas pas encore des acquis de nos sociétés et je le regrette.

      · Il y a plus de 5 ans ·
      Gaston

      daniel-m

    • Je le regrette également, et il est vrai que, moi aussi, si je pouvais, je me retirerai loin du monde, en Alaska au milieu de la forêt, dans un chalet - avec un minimum de confort tout de même - pour lire, écrire, et continuer à réfléchir, à observer, ce monde en pleine déliquescence, et si peu de gens à réagir, à interpeller, à tenter de réveiller les consciences - chacun à sa manière -, parce que nous constatons que l'Humanité va droit dans le mur, le sait, et s'en fout...

      · Il y a plus de 5 ans ·
      4

      Dominique Capo

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