Le Fil des Rêves - Chapitre 7 : Tendre Mot

Lynn Rénier

Rêve de la nuit du 19 au 20 mars 2003 (suite)

Je finissais par me décider à monter regagner la chambre et elles me faisaient savoir qu'elles me rejoindraient un peu plus tard. Ne les obligeant nullement à m'accompagner, je leur souhaitais une bonne fin de repas. J'étais soulagée de retrouver la chaleur de mon lit. Mais ce n'était pas la seule chose que je trouvais en entrant dans le dortoir. Posée avec délicatesse sur la petite table, une lettre était adressée à mon prénom.

La curiosité l'emportant, je me demandais comment quelqu'un avait pu entrer déposer cette enveloppe sans connaître le mot de passe qui permettait d'accéder à nos chambres, mais je ne pouvais que l'ouvrir. Sur le papier fin était tracé à l'encre noire le message suivant :

 

Chère Sélène, je n'ai pas pu m'empêcher de te trouver ravissante dans ta robe claire. On ne se connait pas et j'aimerai remédier à cela. Je voudrais que l'on apprenne à se connaître tous deux, et je ne peux que te demander ton accord pour cela.
Auquel cas, retrouves moi à la bibliothèque demain midi. Je comprendrais que tu ne viennes pas. Pour ma part, saches seulement que je saurais t'y attendre.
Affectueusement, R.L./


 

Je rougissais aussitôt et la porte s'ouvrait sur mes amies qui rentraient à cet instant.

Devant mon expression troublée, Alice s'enquérait de ce qui se passait. Elle venait lire par-dessus mon épaule et en restait toute chamboulée. Chandra ne pouvait pas taire la question bien longtemps. N'arrivant pas à lui répondre, je lui tendais simplement la lettre qu'elle s'empressait de lire à son tour. Un sourire naissait bientôt sur ses lèvres.

- Il faut que tu y aille, m'encourageait-elle.

- Oui, tu ne peux pas rester muette à ça, complétait Alice.

- Mais…

- Il n'y a pas de mais. Fonce ! Il n'y a que lui qui porte ces initiales. Je ne peux pas me tromper. Il s'agit de Rowan. J'ai bien remarqué la façon dont tu le dévorais des yeux. Et il ne semble pas indifférent non plus. Alors ne laisse pas passer cette chance. Tu le regretteras plus tard sinon, j'en suis certaine.

- Je sais bien, Alice, mais ce n'est pas si simple…

- Je ne veux pas savoir. Je ne peux pas te laisser ignorer son invitation. Il faut que tu le rejoignes demain midi.

- Et si c'était une mauvaise blague, tu sais que je ne me le pardonnerais pas.

- Non, ça ne peut pas être cela, méditait Chandra.

- C'est sincère, j'en suis sûre, complétait Alice.

- Vraiment ?

- Puisque je te le dis.

- Je te fais confiance.

Mon amie avait un sourire qui se voulait rassurant. Elle posait un baiser sur mon front et me laissait méditer à ses paroles pour prendre une douche.

 

J'hésitais. Je ne voulais pas me faire de fausses joies. Je ne l'aurais pas supporté. J'en discutais de manière plus approfondie avec Chandra quand la porte s'ouvrait. Mégane entrait, un sourire aux lèvres. Par chance Alice n'était pas là. Ces deux-là ne se supportent pas. J'avais parfois le sentiment d'être tiraillée entre elles. Elles ne s'entendaient pas, et il m'était devenu difficile de voir l'une ou l'autre sans que cela ne génère de conflit entre elles.

La jeune fille blonde venait s'asseoir à nos côtés sur le lit, prenant de nos nouvelles. Heureusement qu'elle s'entendait bien avec Chandra. Cette dernière lui parlait alors de la lettre. J'aurais voulu taire le sujet, mais c'était trop tard. Quand Meg était au courant d'un bout d'histoire, elle ne lâchait plus l'affaire sans tout en connaître avant. Ce qui m'exaspérait un peu parfois, moi qui n'aimait pas m'étendre sur ce qui pouvait me concerner.

Avant de partir rejoindre sa chambre, elle me disait alors la même chose que mes deux camarades peu avant. Ce qui avait pour effet de me conforter dans le choix de retrouver Rowan le lendemain. Mais le doute était persistant. Et je ne parvenais pas à l'effacer. Bien-sûr que je voulais rejoindre Rowan, bien-sûr que je ne demandais que ça. Mais ne me faisais-je pas des films toute seule ? Ne me créais-je pas des histoires qui risquaient de s'envoler une fois que j'ouvrirais les yeux ?

Allongée sur mon lit, tentant de m'endormir, je ne cessais de penser au lendemain. J'avais peur sans doute. Peur que ce ne soit qu'une farce. Peur que l'on puisse se moquer de moi. Il avait bien du voir que je ne pouvais pas m'empêcher de rougir un peu dès que je le voyais. Se jouait-il de moi ? J'espérais sincèrement que ce n'était pas le cas. Que je ne me faisais pas de fausses idées à son sujet. Mais cela, je ne le saurais que le lendemain, si j'osais aller à sa rencontre. Je devais me lancer, tenter, sans craindre de regretter quoi que ce soit.

Je ne savais comment, mais je finissais par m'endormir. Au matin, j'étais à la fois excitée et anxieuse. Ça pouvait se comprendre sans doute. Les cours que nous prodiguaient nos professeurs durant la matinée étaient des plus intéressants, mais je n'arrivais pas à écouter. Alice voulait m'accompagner, Chandra aussi. Pour ma part, je voulais gagner la bibliothèque seule. Je savais qu'elles s'inquiétaient un peu, mais je les rassurais, comme elles m'avaient rassurée la veille.


© Lynn RÉNIER
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