Le grand saut

Romain Delenclos

Devons nous sauter ou nous accrocher ?

Comment je suis arrivé sur ce pont ? J'en sais trop rien, un accumulation de problèmes, celle de trop sans doutes. Il me suffirait de recommencer ma vie comme je l'ai fais à chaque blessures graves qui me forcent à me plonger dans la drogue et l'alcool pour essayer de ne pas y songer. Chaque tentative est vouée à l'échec pourtant. J'y songe des jours, des mois, des années en fonction de la blessure infligée. Pourquoi maintenant ? Celle la aussi, ça devait être celle de trop. Mon cœur n'a certainement plus de place pour une cicatrice de plus. La cohabitation entre humains est devenue si dure de mon temps. J'aurai aimé vivre dans une autre époque, ou tout mes problèmes n'auraient été que simple futilité. Ou l'ennui n'aurait jamais existé, ou je n'aurai jamais une seconde à m'accorder, ou je travaillerai pour ne rien dépenser.. Une époque ou je n'ai jamais existé mais où j'aurai eu ma place. Au lieu de ça, je suis d'une génération ou voler est la première chose qui nous vient en tête lorsqu'on manque de quelque chose. Après tout, le vol n'est que le fruit de la jalousie trop longtemps refoulée. Je ne parlerai pas des politiques. Je ne m'y connais pas assez pour pouvoir la ramener sur ce sujet. Revenons en a nos moutons. Pourquoi je suis sur ce pont, près à me laisser tomber ? Certainement parce que l'espoir de jours meilleurs m'a lui aussi laissé tombé... Quand j'y repense, ma vie est une longue succession de déceptions, principalement sentimentales. Et c'est certainement à cause de tout ça que j'ai fini par perdre espoir moi aussi. Tout autour de moi, ils me disaient "t'es un type bien, ne t'inquiète pas, ça finira par passer". C'est faux, les douleurs ne sont jamais parties. Elles restent, tapies dans l'ombre, attendant le bon moment pour nous sauter dessus et nous rajouter du poids sur les épaules, mais ne prennent jamais le large. Quand j'y pense, je me demande bien à qui je vais pouvoir manquer. Ma famille est éparpillée un peu partout, et puis ils s'en foutent de moi. Je suis l'enfant raté d'une union maudite, un brouillon qu'on regrette de pondre. Rare sont les gens qui m'aiment ou qui sont fiers de moi. Et je n'ai pas d'amis. Je n'ai jamais été très sociable, et le peu de fois où j'ai fais l'effort de l'être, ces mêmes amis m'ont fait traverser la terre en passant par le Centre. J'ai mordu la poussière, j'y ai laissé des ongles, des dents et des morceaux de mon âme. À cause de personnes qui se prétendaient mes amis. Ça blesse, mais ça forge. C'est l'un des passage obligatoire de la vie. Si je suis sur ce pont, c'est que ça devait être la forge de trop... J'attends le coup de vent qui me fera perdre l'équilibre pour de bon, pour le grand bon en avant. Ou peut-être que j'attends une personne qui tiendra assez à moi pour me retenir. Est ce qu'elle viendra ? Il est trop tôt pour le dire. Mais une chose est sûre, c'est que je suis bien seul sur ce pont.

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