le kleenex

J'ai pris la route comme un vainqueur, cinq litres de vin dans le sang et du rhum injecté dans les yeux. Je suis peut-être mort en chemin, peut-être même deux fois. Les arbres en flammes, qui défilaient sur le bord de la route, ne me saluaient même pas. La nature avait honte, alors je lui chantais des chansons d'ivrognes pour la faire enrager. Il est heureux de temps de temps de pouvoir salir le monde, de ne pas chercher forcement des paillettes, du beau, des sourires aux belles dents.
« Je suis la serpillière du monde » que je gueulais, un coup à droite, un coup à gauche, qu'aucune herbe ou fossé ne soit jaloux. J'ai perdu des stops et des virages pointus.
Je me suis branlé la fenêtre ouverte, à l'arrière de la voiture, essayant d'enfanter le monde pendant que le soleil se levait. Je voulais le surprendre au foutre, lui dire que j'étais là le premier. J'ai arrosé les champs, essuyé la portière et jeter les kleenex pleins d'enfants derrière des marguerites.
« Je l'ai baisé en premier aujourd'hui, je l'ai baisé en premier » que je gueulais, m'adressant au soleil pour lui dire qu'aujourd'hui la terre était ma pute.
Puis j'ai garé le carrosse, manger le reste des chips tombées sur le carrelage, léchant les joints pour ne pas perdre le sel. Après j'ai eu soif, alors j'ai bu, puis j'ai pris des pilules pour que ma tête aille mieux, mais ça me déprimait, alors j'ai promené marie-jeanne, mais ça m'a donné soif, alors j'ai encore bu, et j'ai fini monté sur une perceuse, à faire des tours sur moi-même à la cave pendant que par une lucarne le soleil me doigtait.
« Moi je vais revenir demain, je vais revenir demain et te faire fermer ta gueule en t'arrachant la peau, en te faisant pisser de l'eau par tous les orifices » qu'il gueulait, haineux, en me tendant ses index au bout de chaque rayon.
Je suis dans le kleenex de dieu.