Le petit prince de St Honorat . Chapitre I

Louise Moia

"N'importe quel objet peut être un objet d'art pour peu qu'on l'entoure d'un cadre "  

Boris Vian

 

 

Chapitre I

 

Le procès

 

ILE DE SAINT HONORAT . CANNES .  Juin 1976.

J’étais enfermée dans cette petite cage en bois flotté depuis bientôt deux heures. Le soleil tapait sans relâche sur ma tête. J’avais chaud. J’avais soif, j’en avais marre mais j’avais surtout peur.  

C’est à ce moment là qu’ils sont arrivés. Ils étaient cinq, le plus âgé devait avoir 9 ans et le plus jeune 7.

- « Qui c’est celle là ? »

Il avait dit celle là comme il aurait dit ce rat.

C’était le plus âgé. Il s’appelait Max. Il était mince et sec, avec des cheveux bruns et des yeux un peu verts. Il avait un air renfrogné de gamin buté et il parlait comme un livre. Ce qui était faisait un effet très curieux compte tenu de son l’âge. Il ne faisait aucun doute que c’était lui le chef.   

- « On l’a trouvé en train d’essayer de voler le trésor dans le fort. »

- «Je vois… je vois… » disait Max, suffisant.

J’essayais alors de m’expliquer.

- « Mais pas du tout, j' ai rien volé, c'est pas moi. Je ne savais même pas que vous aviez un trésor, je suis désolée, laissez moi partir. Mes parents doivent commencer à s’inquiéter.. »

-« Tais-toi donc, on ne t’a pas permis de parler que je sache » répliqua-t-il, mauvais.

Mes supplications avaient l’air de ne pas d’atteindre, ni Max, ni ses compagnons. Je commençais à envisager l’avenir de façon singulièrement sombre du fond de ma cage. En plus, j'avais rien bu depuis presque trois heures, et ma bouche devenait de plus en plus sèche.

J’avais des courbatures un peu partout parce que la cage était petite et me forçait à pencher la tête en avant.

- « Nous allons la punir … » dit Max d’un air d’autorité.

           Et les autre de reprendre en cœur

- « Oui, oui nous allons la punir »

Soudain, la voix du plus jeune s’éleva.

-«  Non ! »

Une bouffée d’espoir me gagna.

- «Nous allons la juger. »

Et retomba aussitôt.

Le petit s’appelait Martin. Il devait mesurer environ 1m35. Il était un peu rond. Il avait des yeux bleus très clairs, transparent comme de l’eau. Des cheveux bouclés blond très clair presque blancs. Curieusement, on se ressemblait beaucoup on aurait presque pu être frère et sœurs. En tout état de cause, son idée séduisit et fut rapidement adoptée par tous les membres de la bande.

Max déclara sans qu ‘aucune discutions  fut possible :

- «Moi, je serais le juge »

Et Martin répondit aussitôt :

-« Moi, je serais l’avocat. »

Les autres qui ne savaient pas trop qui ils pouvaient être répondirent en cœur.

- «Nous, on sera le public »

Max déclara :

- « Non, vous, vous serez les jurés ! »

Jérémie répliqua du tac au tac

- «Pas la peine d’avoir des jurés, l’affaire n’est pas criminel.

Il avait dit ça naturellement presque sans y penser.

Un peu vexé, Max fronça le nez.

- « Allez donc vous entretenir avec votre cliente, Mon Cher Maître. Et préparez donc une défense digne de ce nom. Je vous laisse un quart d’heure »

Il se retourna vers les autres.

- « Nous pendant ce temps là, nous on va préparer le Tribunal. »

Je les voyais qui s’afféraient dans tous les sens, faisant rouler des gros rochers et des troncs d’arbre.

Martin me fit sortir de la cage. J’ai mal au cou, aux épaules, aux jambes. Un peu partout en réalité. Il m’entraînât par la main un peu à l’écart des autres. D’un vieux sac en Jean, il sortit une bouteille d’eau.

- " Tu as soif ? "

Mes yeux parlaient pour moi. Alors sans attendre de réponse il me tendit la bouteille et m’ordonna :

- « Bois »

Jamais de eau chaude et croupi ne me semblèrent jamais aussi délectable.

- « Comment tu t’appelles ? »

- «  Je m’appelle Cali. »

- « Tu as quelle âge ? »

- « 6 ans… »

Il se recula pour mieux me toiser et me dit d’un air qui s’y connaissait.

- « Tu fais plus »

Il s’assit sur une pierre et me regarda longuement. Ses yeux étaient si clairs, qu’il avait presque la couleur du ciel lavé par l’orage. Un bleu blanc transparent irréel, ça lui leur donnait une profondeur qui me faisait presque peur.

Je le regardais aussi mais je n’osais pas parler. Je ne comprenais pas trop comment je m’étais retrouvé là.

Quelques heures plus tôt, j’étais arrivée en bateau avec mes parents de Cannes sur un petit voilier de 8,50 M

. C’était un petit bateau avec une coque jaune et un liston rouge qui s’appelait Le BOMBAY. Quand on était au mouillage on n’avait pas de taud de soleil juste des paréos indien qui tenait avec des pinces à linges. Ca lui donnait un air drôlement bohême, un peu caravane des mers du sud, un peu crapouille et joyeux.

Mes parents travaillaient à CANNES. Ils avaient une boutique de produit du Monde qu’ils avaient ouvert quelques années avant ma naissance. On y trouvait un peu de tout, des vêtements, des épices, des instruments de musiques, des petits meubles, des lampes en fer forgées. Il y avait aussi des miroirs, des boîtes, des millions de boites, des cousins, du tissu, des paréos, des tentures, des rideaux, et des bijoux, pleins de bijoux..

Depuis que ma mère m ‘avait raconté l’histoire d’Ali Baba et les quarante voleurs, je m’imaginais que c’était là que je vivais, au milieu de tous ses trésors. Le magasin s’appelait « Sur la route de Goa ».

Bien avant que je naisse, mes parents taillaient la route comme on dit.

Mon père avait lu sur la route de Jack KEROUAC et ça avait donné un sens à sa vie. Il avait rencontré ma mère en Egypte dans le monastère Sainte Catherine où elle aussi tentait de donner un sens à la sienne. Jusqu’à trente ans, ils avaient vécus comme ça, cherchant un sens à leur vie sur la route du monde, un peu partout. Les dernières années surtout en Indes, au Sri Lanka et au Tibet. Et puis ma mère, un jour elle en a eu marre de tailler la route quand un matin au Maroc elle s’est réveillée avec un scorpion dans son sac de couchage. Elle a dit à mon père

-« Maintenant ça suffit, on rentre »

Mon père, il serait bien resté encore un peu à  fumer tranquille sous son Baobab mais il sentait bien que cette fois, il n’avait pas tellement le choix. Parce que cette fois ci, le scorpion était très gros et que ma mère avait vraiment eu très peur.

Alors, ils ont mis toutes leurs affaires dans les sacs, dit au revoir à tous leurs amis de la route et à tous ceux qui avaient oublié la route pour s’installer là. Mon père sentait bien que le temps de la bourlingue était fini et le temps de la sédentarité serait pas aussi drôle mais il aimait ma mère alors il a dit :

- « d’accord mon amour. »

Plus tard, ma mère, elle m’a dit que si mon père lui avait dit non, elle serait restée quand même. Ma mère, elle avait vachement peur des scorpions mais elle avait encore plus peur de vivre sans mon père. Mais ça à l’époque, il le savait pas. Alors, il s’est dépêché de téléphoner en PCV à ma grand-mère. Ma grand-mère était si contente qu’ils rentrent qu’elle à tout de suite envoyée un mandat pour payer le train et le bateau. Heureusement, parce que si non, ils auraient sûrement du rentrer à pied.

Quand ils sont arrivés à Paris au mois de Novembre, il pleuvait des cordes et il faisait froid. Le ciel était couleur « père Lachaise », gris, triste et mortifère. De son côté, Ma mère commençait à regretter les palmiers de la Médina sans oser en parler à mon père, et mon père de son coté à lui en venait même à se demander si le soleil se levait le matin puisque depuis trois semaines qu’ils étaient là, il ne l’avait pas encore vu une seule fois.

C’était à se demander si finalement la cohabitation avec les scorpions n’était pas préférable…

Au bout d’un mois, ils étaient même devenus dépressifs tous les deux. Ils tournaient en rond et ma grand mère, qui était épicière, commençait à leur faire comprendre qu’à trente ans  en pleine force de l’âge, on ne pouvait pas rester comme ça à ne rien faire et à se lamenter sur son sorts Mon père qui avait travaillé à l’épicerie quand il était petit eu l’idée du magasin, ma mère trouva le nom, et ma grand mère donna 50.000,00 Francs en précisant bien que c’était un prêt, avec reconnaissance de dette devant le notaire et tout le toutim. C'est pas que ma Grand-mère était pingre, elle était commerçante, nuance. Un sous est un sou, c’est tout. Il fut décidé qu’on installerait le magasin sur la côte d’Azur, parce que mes parents aimaient tous les deux le soleil et la mer et puis aussi rapport aux touristes, ce serait plus payant.

Alors, avec l’argent de ma grand-mère, ils achetèrent alors un petit local dans une rue piétonne du quartier du Suquet à Cannes. C'était joli, coloré, pittoresque et piétonnier : parfait. Ca leur semblait idéal pour l'activité qu'il envisageait de lancer. Au début, ça ressemblait beaucoup plus à une cave qu'à un futur magasin, mais ils ont retroussés leurs manches, poncer, repeint, décaper et cirer et puis après ça ils ont contactés leur amis, ceux qui avait oublié la route un peu partout à Goa, Marrakech ou Ceylan. Et chaque semaine, un petit container arrivait du bout du monde pour se déverser dans le magasin. C’était la fête ses jours là c’était comme une pochette surprise géante de 20 m3 qui déboulait. Des fois, je voyais ma mère pas trop contente mais à l’époque je ne comprenais pas trop pourquoi. J’ai su plus tard. Leurs amis du bout du monde n’en faisaient qu’à leur tête et ils n’envoyaient presque jamais ce que ma mère demandait sur ses listes. Heureusement, ma mère avait un charme fou, elle aurait vendu n’importe quoi à n’importe qui. Quand les gens rentraient dans le magasins sa passion pour l’Inde et pour l’artisanat local était tellement communicative que certaines clientes repartaient même en sari du magasin, bien remonté d'ailleurs à ne plus jamais porté que ça même dans leur réunion parisienne super importante. Et puis, dans l'ensemble sa vie de voyage l'avait rendu facile. Je n'ai aucun souvenir des mes parents fâchés l'un contre l'autre plutôt le souvenir de sourire entendu et d'une complicité à toute épreuve.       

Moi, je suis arrivée le jour du premier container. Ma mère ne m’a jamais dit si c’était vrai pour le scorpion mais moi je suis presque sur que c’était pas vrai et que c’est à cause de moi si ils sont rentrés. Ouais, presque sur.

-« Alors, C’est à cause de l’Inde que tu t’appelles Cali »

-« Oui, c’est ça, c'est à cause de l’Inde .. »

Et là j’ai pris un petit air que j’aurais voulu dangereux et j’ai dit :

-  « Cali c’est la Déesse de la mort et de la destruction pour les indiens, il la craigne.. »

J’ai dit ça avec un air sentencieux comme pour annoncer une très grande catastrophe si on touchait au moindre de mes cheveux mais ça n’a pas eu franchement l’effet escompté. Il était évident que Martin et ses copains me faisaient beaucoup plus peur que toutes les mauvaises ondes que pouvait leur envoyer la déesse khali. Et que c’était pas elle qui allait me sortir de ce mauvais pas.

Un peu plus loin, je voyais toujours que rien de bon ne se préparait. Max et les trois autres s’agitaient dans une grande effervescence tantôt en riant tantôt dans des éclats de voix. Martin les regarda un instant puis reposa ses grands yeux claires sur moi. J’avais l‘impression qu’il pouvait regarder jusqu’au fond de ma tête, qu’il pouvait lire dans mes pensées, que devant lui j’étais toute nue. Je baissais alors la tête.

Il me demanda alors :

- « Pourquoi tu as volé le trésor ? »

Je répliquais du tac au tac :

- « Mais je n’ai rien volé du tout… »

Il reprit :

- «Dans une des petites galerie souterraine du fort, il y avait une grosse caisse avec dedans des pierres précieuses… »

Je le regardais avec attention et perplexité, d’accord j’étais jeune. Il ne s’était pas gênée pour me le faire remarquer mais j’étais quand même une fille de commerçant,  loin d'être une crétine, et j’avais une vague notion de l’argent, je savais même compter et rendre la monnaie sur deux cent francs, je regardais souvent ma mère marchander (elle était vraiment dure en affaire). J’avais une vague idée de ce que valaient les pierres précieuses et je voyais pas trop comment une sale bande de gamins aurait pu avoir une caisse entière remplie de pierre précieuses cachée dans le fort  Je demandai alors avec malice :

- «  Et c’est quoi exactement précisément comme pierre alors ? »

Il me regarda un peu ennuyé. ..

Je dis :

- " Quoi tu ne sais même pas ce que c’est comme pierre, tu dis que tu as des pierres précieuses et tu sais pas ce que c’est … »

Maintenant, c’est lui qui baissait un peu la tête.

Je lui dis :

- « C’était quoi des rubis, des saphirs, des émeraudes, des diamants… »

Devant son air perplexe je rajoutais :

- « C’était de quelles couleurs, Rouge ? , Bleu ? , Vert ? , Blanc ? … »

Quand il entendit blanc, il poussa un petit cri de satisfaction, me fit un large sourire et me dit profondément rassuré et quand même un peu péremptoire.

- « Blanc, Blanc,..

-'"  Ce sont des diamants… ?!? »

Je le regardais d’un air dubitatif. Je lui demanda alors :

-«  Et tu en as un là de tes fameux diamants,  que je vois ? »

Il se leva alors de façon très théâtrale, il me regarda et m’intima :

- « Ne bouge pas … »

De toute façon, je risquais pas. Il m’avait attachée un pied à un gros rondin. Je me faisais un peu l’effet de la chèvre d Monsieur Seguin qu’on entortille autour de son piquet pour brouter autour sauf que là, y avait même pas d’herbe. Il se dirigea vert son sac en jean qu’il ramena vers nous. Il en sorti de la grosse poche de devant un gros caillou de la taille d’une balle de tennis.

Je considérais l’objet avec attention. Il me dit

-«  Et maintenant.. Regarde … »

Je regardai avec la plus grande attention dont j’étais capable. D’un geste leste, il sauta sur le rondin. Brandit l’objet très haut dans le ciel de sa main gauche et le jeta de toute ses forces sur le rocher : Il explosa en neuf morceau tranchant. Je reconnu toute suite la pierre qui n’avait rien de précieux…

J’en avais déjà vu en ballade avec mes parents et comme je suis curieuse de tout et même un peu je sais tout j’avais demandé ce que c’était.

Je lui lâchais alors avec mon petit air tout revanchard :

-«  Mais, c ‘est nul, c’est que du quartz ton truc. Il y en a partout du quartz, c’est aussi commun que le rocher ça n’a rien d’un trésor, non rien du tout. »

Mes explications n’avaient pas l’air de le satisfaire vraiment. En fait, ça devait franchement l’embêter d’admettre qu’avec ses copains, il s’était un peu foutu dedans. C’était incroyable, il avait pas huit ans et  il était déjà fier comme un pou.

Il s’assit à coté de moi. Il était tout perdu dans ses pensées. Il me dit alors.

-«  Admettons que notre trésor ne sois pas un trésor, admettons que ce ne soit pas toi qui l’ai volé, Admettons tout ça, il est où.

-«  Là tu m’en demande trop, je sais pas moi, où elle est votre caisse… »

Je lui lâcha alors :

-«  Peut-être que le gardien du fort à fait du ménage dans le souterrain et qu’il l’a jeté.  Puisque je te le dis que ça vaut rien. »

Il me regarda avec un air complètement déconfit. 

Il se leva et alla trouver ses copains.

De loin, j’assistai au conciliabule au sommet, j’entendais des chuchotis, des chuchotas et des éclats de voix. Et puis j’entendis Max qui dit d’une voix si forte pour sa taille que ça me surprenait toujours.

-«  Bon d’accord, on y va, mais on la remets dans la cage »

Martin plaida en ma faveur en disant que j’y avais déjà passée plusieurs heures et qu’en plus de ça j’étais peut être innocente.

Max étant très motivé pour me faire souffrir encore, la plaidoirie se révéla d’une complète inefficacité.

Martin revint vers moi et me dit :

-« Rebois un petit coup et après on te remet dans la cage… »

Je pleurnichais :

-«  Non pas la cage. »

-«  Si la cage, mais pas longtemps, on va faire vite. »

J’étais de nouveau enfermée quand ils me laissèrent. Heureusement le soleil avait décliné et il faisait moins chaud. J’en avais vraiment assez, ma peau me brûlait, j’étais fatiguée et j’avais très envie de retrouver mes parents.

De fatigue, je finis par m’assoupir. Je fus réveillée par des craquements de branchages ils revenaient enfin. Il portait en délégation une caisse en bois ou il était inscrit Hauts Bas et fragile. De temps en temps, ils trébuchaient, la caisse avait l’air lourde comme le diable. Le soleil était tout rouge sur l’horizon. Il devait être plus de neuf heures. Mes parents devaient être très inquiets. Remarque, quand j’y repense je n’en menais pas large non plus.

Martin commença :

-« Bon, d’abord, on l’a laisse sortir de la cage. »

Les autres étaient un peu déçus. Ils devaient ressentir une certaine jouissance sadique à me voir prisonnière.

Max cérémonieusement m’ouvrit la porte et me lança directif :

-« Bon sort ! »

Sans demander mon reste, je rampais un peu pour quitter ma geôle.

Martin me fit signe de m’installer sur le gros rocher qu’ils avaient fait rouler entre les pins quelques heures plus tôt. Max prit place sur un gros rondin devant moi et Martin sur  un plus petit sur le coté. Les deux autres se trouvaient derrière moi assis en tailleur. Ils étaient complètement silencieux.

Martin lança un regard impatient à Max qui se leva.

-"Accusé ! Levez-vous !"

Je regardais autour de moi. Martin me fit un petit geste encourageant du menton. Je me levais.

-"Accusé, les chefs d'accusation retenue contre vous sont successivement : vol, mensonge, dissimulation du butin et peut-être même recel"

Je m'exclamais vivement :

- "Recel ?"

- « Silence accusé c'est votre procès tenez-vous correctement devant vos juges."

Martin toussota un gros coup.

- "Bon il est vrai que le recel n'a peut-être pas été complètement caractérisé, très bien nous oublierons  donc ce chef d'accusation" répugna Max.

- "Très bien maintenant qu'avez vous à dire pour votre défense Accusée ? ».

Je le regardais perplexe et commençais juste à ouvrir la bouche quand Max m'interrompit.

-"Monsieur le Juge si vous permettez, je vais parler pour ma cliente. Elle est jeune et inexpérimentée.

C'était peu de le dire que j'étais jeune et inexpérimentée. Fallait pas sortir de St Cyr pour balancer une vérité comme ça.

Max répondit de façon très stylée:

-"Ma foi, Mon Cher Maître si votre cliente est d'accord.

Je répliquais un peu ironique:

-"La cliente est d'accord!"

Et là Martin se lança dans une diatribe complètement hallucinante étant donné que bon il faut quand même recadrer les choses dans le contexte, il n'avait que 8 ans et demi.

-"Au chef d'accusation de vol, nous répondrons simplement cela Monsieur Le Juge, le vol est la soustraction frauduleuse d'un bien appartenant à autrui "

Il disait ça bizarrement comme s'il récitait à toute vitesse une leçon apprise par cœur.

-"Hors nous sommes d'accord n'est pas que cette caisse ne nous appartenait pas vraiment, même pas du tout puisque nous l'avons trouvé dans le fort. D'autre part, il n'y avait pas notre nom dessus. Il regardait Max d'un air supérieur et malin. Max opinait sobrement du chef en rejetant négligemment sur son épaule droite le paréo qui lui servait de cap.

"- Quand au mensonge Monsieur le juge restons sérieux. Cette jeune personne dit la vérité. Elle est arrivée aux îles sur le petit bateau que nous pouvons voir là bas."

Il montrait du doigt le BOMBAY qui dansait lentement sur les eaux roses du couchant.

-"Comment voulez vous que cette jeune personne qui n'a que 6 ans ..." Il me regardait d'un air compatissant comme si c'était vraiment pitoyable de n'avoir que 6 ans et demi soit venu sur Saint Honorat par ses propres moyens" Il dit pour que le juge se fasse un peu mousser "Pas comme nous Monsieur Le Juge qui sommes arrivé seul sur notre optimiste "

-" C'est vrai, c'est vrai soit dit le Juge (ça marchait).

Enfin la dissimulation Le coffre n'était pas dissimulé puisque nous l'avons trouvé dans les rocher au pied du fort, en assez mauvais état il faut bien le reconnaître. Il est certain que c'est le gardien du fort qui l'a jeté par une des crémaillères.

-" Une des quoi ?" demanda en cœur le Jury.

- "Une fenêtre » répondit Martin sans même les regarder.

Un murmure de stupéfaction parcourut l'assistance? Le coupable serait-il en faite le gardien. Là-dessus, Martin reprit à bon compte la révélation que je lui avais faite quelques heures plus tôt, mais comment lui en vouloir.

-"Mes amis, j'ai une triste nouvelle à vous apprendre. Notre trésor à vécu. Il n'est pas ce que nous pensions. Oui mes amis nos pierres ne valent rien. Nos pierres ne sont pas précieuses, ce ne sont que quelques pierres, de simples morceaux de verres, de simples morceaux de quartz sans aucune valeur.

Martin fit comme une moitié de révérence devant le Juge et reprit

-"Monsieur le juge, à la lumière de tout ces nouveaux éléments, je sollicite votre indulgence bienveillante? Ne pensez vous pas qu'il faudrait relâcher votre prisonnière qui n'a définitivement commis aucun grave forfait. Max incrédule tourna la tête vers le jury. Les trois garçons étaient assis, les épaules un peu tombantes et on pouvait lire un peu de perplexité sur leur visage et un peu de déception aussi.

-"Alors notre trésor ne vaut rien disait le petit. »

-"Non rien du tout "répondit Martin d'un voix douce.

" Ben ça alors ..." Il fit déçu.

"Alors moi je pense qu'il faut la laisser rentrer alors... "

Max se leva d'un bon et lança à Martin un peu défiant :

"- Mais d'un autre coté ce n'est pas parce que l'on vole quelque chose qui n'a pas de valeur que ce n'est pas un vol. »

-" Monsieur Le juge je croyais vous avoir démontré que c'est la gardien du fort qui a jeté le coffre sur les rochers."

Dépité Max sentait bien que sa prisonnière lui échappait définitivement par dessus bord. Il lança magnanime à Martin :

-"C'est vrai, c'est vrai, je n'ai pas oublié, pour qui ne prenez vous donc. Hé bien voilà une affaire rondement menée.

-" Prisonnière levez-vous! Le tribunal ici présent déclare ne retenir aucune charge contre vous.  Vous êtes innocente, vous êtes libre, vous pouvez rentrer chez vous."

Je soupirais un grand coup. Je commençais à être un peu fatiguée d'être le jouet de cette sale bande de gosse de bourgeois. J'avais bien reconnu leur accent pointu de parisien, tête de chien. Je n'avais qu'envie de rentrer sur le BOMBAY retrouver mes parents. Ça a du se voir sur ma tête que j'en avais plein  le dos parce que Martin me regarda avec son air gentil et ses yeux transparent. Il me dit tout penaud, avec la délicatesse de quelqu'un qui sent bien que quand même il a un peu dépassé les bornes des limites :

- Allez viens, je te raccompagne. Les gars je prends le bateau, je reviens."

On traversa l'île dans le sens de la largeur jusqu'au petit port. Enfin Martin portait le bateau sur sa tête et moi je le suivais à quelques mètres. Je traînais un peu les pieds parce que j'en avais assez de cette journée et que maintenant je voulais rentrer. J'avais faim,  j'avais soif et j'étais épuisé.

-"Tu es fatigué tu veux t'arrêter cinq minutes"

-" Oui je suis fatiguée, j'en ai marre. J'ai été enfermé toute la journée. En plus, vous m'avez tyrannisée. C'est bien la peine d'être gentil maintenant ..."

-" Hé ça va, j'te signale que je suis quand même le seul à t'avoir défendu Mistenflute au cas où t'aurais la mémoire un peu courte ..."

-"J'm'appelle pas Mistenflute, j'm'appelle Cali, Monsieur l' AVVOOOCCAATTTT."

-" Oh, c'est toujours la même chose avec les filles on se met tout le temps en quatre et ça ne suffit jamais."

Il reprit le bateau sur sa tête et reprit sa marche le long du sentier bordé d’ eucalyptus. Ça me faisait du bien cette odeur. ça me rafraichissait après cette journée infâme. Il ne faisait pas du tout attention à si je le suivais ou pas. Alors, de temps en temps, je lui lançais grincheuse:

- Hé attend moi, j'ai des plus petites jambes que toi moi ..."

Alors, il ralentissait un peu. Et moi, je grognonnais de moins en moins. Je calais ma marche sur la sienne parce qu'il faisait de plus en plus nuit, et que dans les fourrés, j’entendais vaguement des bêtes. D'un coup, je fis un bond de coté en poussant un petit cri de musaraigne suraigu.

-" Hé qu'est ce qui se passe ?"'

 Il jeta un œil sous la haie.

-" C'est rien… C'est qu'un merle… Allez viens..."

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