Le plafond de verre et le papier mâché
Alice Neixen
Il y a des personnalités qui sont comme des aimants, des drogues puissantes auxquelles il n'est pas possible de résister.
Il y a des histoires qui s'écrivent pour la vie entière, parsemées pêle-mêle de sentiments tour à tour joyeux ou néfastes, mais toujours intenses. Tout mais pas l'indifférence.
Comment font les gens qui ne veulent pas savoir ? Qui peuvent fermer un livre sans avoir lu le dernier chapitre ? Qui peuvent rester sur un statut quo, sur des non-dits, sur une histoire qui s'est brutalement terminée sur des pointillés illogiques ?
Toutes les histoires d'amour finissent mal en général. Celles qui finissent bien, on en parle jamais vraiment. Qu'y a t il à dire sur les gens heureux - ou pire : sur ceux qui se contentent ?
Le frisson d'être vivant, la puissance qui palpite dans la vie brûlée par les deux bouts, comment y résister ?
Embrasser la banalité, la platitude d'une vie bien rangée, c'est une qualité que je n'aurai jamais. J'ai longtemps eu honte de le reconnaître, peut être parce que cela sous-entendait une forme d'instabilité, de brisure ou d'écart criant à une norme sociale écrasante. Mais la vérité c'est que j'étouffe dans le quotidien, dans les règles, dans la répétition d'un scénario tellement bien rodé qu'on connaît la fin du film avant le milieu. Je ne sais pas si c'est moi qui ai raté un battement, pris une tangente, choisi la difficulté au lieu de la simplicité. Mais c'est toujours aux vagues que je reviens, à la liberté, à l'esprit sauvage. N'est ce pas tout simplement ce que je suis ?
Ce n'est pas de faire semblant qui est difficile, mais de porter un masque pendant des années en faisant croire que ce sont les vrais traits de notre visage, les vrais contours de notre personnalité.
Au fond, tout ce temps et cette énergie consacrés à me protéger, à croire qu'à m'entourer de caractères plus intenses que le mien finira par m'écraser, n'est qu'une façon de contourner la seule véritable question : pourquoi s'imposer un plafond de verre permanent et ne pas rêver plus grand ?