Le Plongeur

Luc Michel




23 juin 2430, à Paris. Il est 13h 28. Simon se lève. Ils doivent être partis, songe t il. C'est la première chose à laquelle il pense, presque malgré lui,ce matin là. Elle lui apparait, quelque part derrière ses rêves de la nuit, elle, son amie d'enfance, heureuse, rayonnante, se déplaçant parmi les invités, légère comme un elfe. En était il encore un peu amoureux? Oui, bien sur, ce soir là il avait songé que cela ne faisait aucun doute. Puis il s'était rassuré en se disant que ce qui les unissait était autre chose encore que cet amour éclatant, cet amour par trop affiché, trop évident qu'elle manifestait aux yeux de tous comme une sorte de mépris à son égard. Il s'était senti honteux, mal à l'aise durant toute la soirée à cause de ça. La plupart des gens ignoraient tout de leur relation passée mais Simon sentait peser sur lui des centaines d'yeux mauvais, goguenards ou moqueurs. Mais voilà, désormais elle était Madame Suetone. Madame Suetone! A l'heure qu'il est ils sont dans l'avion, peut être qu'ils dorment...Que font ils en ce moment? Oui c'était ce à quoi avait encore songé Simon en se levant. Un violent mal de crâne le fit revenir à une réalité immédiate. La fête s'était prolongée tard dans la nuit, on avait pas mal picolé....

Et puis, depuis quelques jours il n'était pas bien. Une sensation indéfinissable...Il mettait ça sur le compte de ce mariage qui s'annonçait. Clémence, sa meilleure amie aujourd'hui, avec qui il avait vécu trois ans autrefois...Clémence s'était mariée avec un autre.

Mais hier, il n'avait pas été le seul à ressentir une sorte de malaise. La plupart des invités s'étaient plaints, c'était sur le coup des 3h du matin. Il ne restait plus grand monde, les mariées étaient partis, comme le veut la tradition. Mal de tête, douleurs au ventre, sensation diffuse de mal être. Chacun s'était accordé à dire que les seiches servies en entrée ne devaient pas être de première fraîcheur. Il est si difficile de trouver des seiches de nos jours! Il est si difficile de trouver quoi que ce soit. Il y a longtemps que les océans sont vides. Les seuls animaux marins que Simon avait eu l'occasion de voir étaient exposés à l'aquarium géant de Beaubourg. Les mers de tout le globe ne réunissaient plus désormais les conditions propices à la vie. A cause du manque de salinité ou d'un problème dans la chaine alimentaire...le plancton? Simon ne savait plus exactement.

Simon se sent lourd, il fait quelques pas....une sensation étrange s'empare de lui. Il se sent un peu grisé. Il ferme les yeux. Il est 13h32, Simon s'effondre sur le sol de la cuisine.



Sydney, 23 juin. 13h28. Le professeur Makevitch rentre chez lui. Il occupe un appartement au 5ème étage, dans le centre, tout près de Rocks Markets.

Sa femme, ses deux enfants sont assis sur le canapé du salon.

Le départ est pour ce soir, 18h. dit il simplement en entrant dans la pièce.

Mon dieu, mon dieu, protégez nous! lui répond Suzanne, son épouse.



New York. 23 juin 2430. 7h 26.Georges ramasse ses affaires. Une couverture,un tee shirt sans âge,un sac à dos usé jusqu'à la moelle. Il sait que l'autre, le putain de flic va repasser, il va se faire tabasser.

Il a mal au dos, il a mal partout. Il a un mal de tête horrible, comme jamais. Il s'enfonce dans la ville..Il y a le pont de Lincold tunnel. On n'y voit pas souvent des connards de flics. - Ouais, je vais aller là bas.

Il se lève, marche en direction de Lincold tunnel. Il est obligé de s'arrêter plusieurs fois à cause de l'étau qui lui comprime le crâne. Georges a quarante cinq ans. Il a deux enfants. Autrefois il habitait là, au croisement de 19 avenue et de 39th street. Il gagnait confortablement sa vie. Un jour, il a commis une erreur. Une seule erreur qui a fait perdre des millions de dollars à sa boite. Un marché mal négocié, des garanties insuffisantes, une armada d'avocats spécialisés dans ce type d'affaire. Il avait signé ce contrat alors que ce jour là il était malade comme un chien. Il n'avait pas suffisamment relu certaines clauses. On l'avait licencié sur le champ. Dans son petit monde, retrouver du travail après ça s'était avéré impossible. Sa femme l'avait quitté. Peu à peu, Georges avait sombré. Il s'affala avant d'avoir atteint son but. Mais Georges avait il encore un but?



Jonathan fait partie des 534. Ils étaient arrivés à Sydney il y a trois jours.

Son épouse, une petite femme ronde, le regarda et son regard semblait dire : je te fais confiance Jonathan. Elle avait toujours eu une confiance aveugle en lui. Ils étaient venus de Prague. Jonathan n'avait pas voulu fournir davantage d'explication. Il n'en dirait pas plus pour le moment. Les enfants découvraient la mer. Jonathan partait la journée. Hélène patientait. Ils allaient à la plage, il faisait un temps magnifique,les enfants jouaient avec les vagues. Hélène avait, depuis quelques jours, légèrement mal à la tête. Le décalage horaire, pensa t elle. Elle aurait presque pu être heureuse, en d'autres circonstances.


Kinshasa, 23 juin. 12h28. Malawé est assis sur le bord de la route. Il attend, comme chaque jour. Il n'est pas seul. Des dizaines d'enfants sont postés là, à la même heure. C'est à cette heure approximative que le camion benne déverse les tonnes de déchets collectés lors de la tournée du matin. Il faut être là, sous la gueule béante, au milieu de la foule des gosses, saisir au vol ce qui en vaut la peine. On trouve de tout à la décharge de l'Est. L'autre jour Malawé s'est emparé d'un téléphone portable presque neuf. Il avait pu le revendre deux dollars à son cousin, Balawé. Deux dollars c'est l'assurance de trois repas. On peut alors se reposer un peu, s'acheter un peu de cette colle magique, la petite bouteille que l'on respire encore et encore jusqu'à s'endormir au pays des Dieux. Dieu est puissant, il voit tout. Il permet à Malawé de l'approcher, de lui parler mais pour cela il faut avoir de la colle.

En attendant le camion, Malawé respire, il respire encore et encore dans la petite bouteille. Il commence à avoir très mal au crâne. Au loin, noyé de poussière, surgit de derrière les gratte ciel, le camion benne. Malawé l'aperçoit dans un brouillard épais. Puis le camion semble dévier de sa trajectoire, se dirige droit vers le fossé. Malawé se lève et s'écroule.


23 juin. 14h 28. Dans la forêt tout au Nord de Rovaniémi, en Laponie, règne un silence absolu.



Le 23 juin 2430, l'ordinateur coordonné signale que c'est le jour anniversaire de Mat Amon et de 53 345 328 autres personnes dans le monde. Ce jour là, la température est de 25 degrés Celsius à Paris, il fait 18 à Londres, 15 à Auckland, 10 degrés à Moscou. Les efforts de tous ont porté leurs fruits. Les problèmes des siècles passés sont en voie d'être définitivement résolus. Les siècles antérieurs avaient connu un réchauffement du climat sans précédent. Aujourd'hui, Dieu soit loué, l'énergie infinie de la fusion nucléaire assure au monde sa pérennité, mais à l'époque c'était loin d'être gagné. Lorsqu'on put enfin s'affranchir de toute énergie fossile, voici soixante ans à peine, le monde commença à respirer. On était sauvé. Bien sur les océans sont encore vides, les poissons toujours absents, mais la plupart des gens apprirent à oublier le poisson. On mangea de la viande, énormément de viande. Aujourd'hui il était tout simplement temps de rétablir l'équilibre. Le problème venait du plancton ou plutôt du phytoplancton. Le phytoplancton est à la base de la chaine alimentaire en milieu marin. Il est composé de micro algues et de cyanobactéries. Il commença à diminuer dans les années 2000 sans qu'on sache très bien pourquoi à l'époque. Puis on s'est mis à l'exploiter. L'industrie du pétrole avait trouvé là son substitut idéal. Le problème du XXIème siècle c'était l'énergie. Il n'y avait, à cette époque, que des solutions provisoires. Certaines voix s'étaient élevées contre l'exploitation massive du phytoplancton. Mais le monde doit tourner et le monde continua de tourner. La diminution sensible du phytoplancton entraîna celle des autres espèces vivantes, puis leur quasi extinction dans tous les océans. Il allait ensuite falloir réparer les dégâts causés par les errements des siècles passés. Mais désormais, on y était, la machine s'inversait doucement.


Il y a un an, Yvan Makevitch avait écrit :


Doucement les alizés m'emportent

vers L'envi,

Ferme les yeux, amours mortes

au tréfonds de la nuit...


Makevitch n'était pas un poète mais écrire le soulageait un peu.


Le professeur Makevitch se rend maintenant au centre spatial de Island Bay, au nord de Sydney. Nous sommes le 23 juin, 14h02. Il a quitté sa femme, ses deux enfants. Il n'aurait pas du repasser à la maison tout à l'heure, seulement il avait oublié son téléphone. Il était en retard. Makevitch était toujours en retard. Mais aujourd'hui, non, il ne peut pas. Il roule à une vitesse folle sur l'autoroute no 6. La voiture gavée de nucléon fend l'espace sans un bruit. Makovitch songe à la liste des 534. Il a mémorisé tous les noms, tous les visages. Ce chiffre correspond à l'ensemble des spécialités, regroupées par catégorie. Depuis deux ans il s'est attaché, avec les membres du D-Day, à recruter la personne référente pour chacune d'entre elle, avec un écueil majeur. Rien ne devait transpirer. Il avait fallu approcher des personnalités diverses, des sommités la plupart du temps. Et si l'une d'entre elles vendait la mèche ? On ne trouvait parmi les 534 aucun homme politique, aucun décideur, de ceux que Makevitch appelait les babouins dominants. Le groupe se composait de scientifiques, exclusivement. Sciences physiques, mathématiques, biologie, génétique, systèmes d'informations, sciences humaines. 534 spécialités. Tout le savoir connu. Makevitch dirigeait à Sydney le laboratoire de biologie moléculaire. C'est lui qui avait, le premier, pris conscience du problème. Et le problème c'était l'erreur de calcul. Son labo, les autres labo, tous étaient tombés dans le panneau. Il était trop tard à présent pour peser sur le cours des choses. Cela se jouerait à 24h près. 24 heures de trop. Depuis trois ans, il avait monté un programme de recherche. En réalité le but poursuivi était tout autre. Dans cinq heures ils seraient partis. Il serait alors 22 h à Sydney, 14 h à Paris, 8 h à New York, 20 h à Pékin. Le Dôme du centre spatial se détacha sur l'horizon. Makevitch franchissait maintenant la barrière de sécurité. Le gardien lui adressa un salut cordial. Makevitch le salua à son tour. Il avait envie de pleurer.


A Moscou, Svetlana se hâte. Ses enfants l'attendent. Il est déjà tard. Son employeur n'en finissait pas avec ses histoires à dormir debout. Elle file maintenant vers l'école Kranievski. La journée d'une maman de 30 ans est une suite sans fin de petites corvées et de petits bonheurs. Il y a des mamans qui courent partout, tout le temps, c'est à l'échelle de la planète, un ballet incessant de mamans qui crient - « allez dépêche toi Dimitri, dépêche toi John, dépêche toi Ahmed, dépêche toi André, Eduardo ». Tout le monde court. Les papas aussi. Parfois c'est la grand mère qui court, la soeur, la tante. Le monde est uniformément nimbé d'une même culture. Svetlana arrive à l'école, prend Alexeiv et Antonov par la main. Ils se plaignent d'avoir mal à la tête. - « Mes chéris, maman aussi elle a mal a la tête ». Dans ce monde sans répit, tout le monde a mal a la tête. On ne regarde jamais un coucher de soleil. On ne s'endort pas, on récupère. Alexeiv s'effondre, Svetlana pousse un cri strident puis s'effondre à son tour. il est 15 h 28 et nous sommes toujours le 23 juin.


Dans la voiture, Hélène est silencieuse. Hector et Babette se sont endormis. Ils ont passé l'après midi à jouer avec les vagues, à courir sur la plage.

« Est ce que tu peux me dire maintenant ? » Hélène est calme. Elle a une confiance aveugle en Jonathan. Etudiant brillant, jeune homme surdoué, Jonathan attirait à lui toutes les filles de Prague. Ils s'étaient rencontrés un soir de janvier à la fête annuelle organisée par la section des Biosup, la sienne. Le ciel, d'une clarté absolu, était rempli d'étoiles. Hélène, étudiante en lettres modernes, était venue avec un groupe d'amies. Jonathan l'avait aperçu, avait murmuré quelque chose à l'oreille de Paul tout en regardant dans sa direction. Elle avait immédiatement senti ce regard, presque pu percevoir les paroles qu'il avait prononcé à cet instant là. Plus tard elle lui avait demandé : - « et tu lui as dit quoi à Paul, je sais, je t'ai vu, allez dis moi! » Elle était d'une beauté sublime avec ses deux fossettes au coin de ses lèvres quand elle soulevait ses sourcils et arrangeait ses cheveux tout en l'interrogeant d'un air moqueur. Il avait répondu: « je lui ai dit : voilà la femme de ma vie! »

Ce soir là, tenant pour prétexte la neige qui s'était mise à tomber en abondance, Jonathan s'était offert de la raccompagner. Hélène avait béni le ciel. Il est des nuits où l'on touche à la bonté de Dieu, avait elle songé. Hélène croyait en ces choses là. Jonathan s'en moquait un peu mais il fut bien obligé de reconnaitre, bien plus tard, que la neige s'était mise soudainement à tomber et qu'elle venait bien du ciel.

Jonathan avait été ensuite repéré par un groupe Californien, spécialisé dans la biologie moléculaire. Ils étaient partis à Los Angeles. Hélène ne travaillait pas. Vivre avec Jonathan lui suffisait. Ils avaient deux enfants, Hector et Babette., Jonathan travaillait comme un dingue. Son domaine c'était la biologie des fonds marins. A 38 ans, Jonathan était devenu le spécialiste de la biologie des fonds marins. Ses travaux faisaient autorité. Il fut l'un des premiers, avec Makevitch, à s'apercevoir de l'erreur.

Nous nous dirigeons vers le Dôme. Je ne pouvais rien dire jusqu'à aujourd'hui. Il nous reste à peine quatre heures. Nous sommes 534. 534 et leur famille. C'est Makevitch qui tient les comptes. Ca doit représenter 2 500 personnes en tout.

Mais...Hélène ne comprenait pas. Le départ de Los Angeles pour Prague, comme chaque année. Les parents d'Hélène y vivaient encore, ceux de Jonathan n'étaient plus de ce monde depuis trois ans pour son père et cinq ans pour sa mère. Mais ensuite, Sydney, pourquoi Sydney? Et maintenant le dôme ?

Attends, j'y viens. Jonathan avala sa salive. Il savait que ce moment serait le plus difficile de sa vie, plus difficile encore que toute la suite peut être. Pourrait elle lui pardonner un jour ? Il tenta quelque chose, il fallait que ça sorte, d'une manière ou d'une autre. Dans 30 minutes on serait arrivé. Elle l'apprendrait de la bouche de Makevitch ou d'un autre et ça n'était tout simplement pas envisageable. Il fallait l'éviter à tout prix.

Tu sais, commença t il, d'une voix mal assurée, mes recherches, enfin pas que les miennes...les recherches en général sur les fonds marins...tu comprends ? Il disait tu comprends, ca n'avait aucun sens ces mots!, lui si cartésien, si posé, si maitrisé habituellement. Bien sur qu'elle comprenait! Alors il changea de braquet et passa à la vitesse supérieure.

Le phytoplancton, ca te dis quelque chose ?



Madrid. 13h28. 23 juin 2430. La chaleur est accablante. La ville est morte. Jorge s'est effondré dans son canapé, Isabela donnait son dernier cours de chant de la matinée. Elle s'est mise à sourire sans raison avant que son visage ne retombe brutalement sur les touches du piano avec lequel elle s'accompagnait.


On avait ouvert le Dôme. C'était un bâtiment d'une centaine de mètres de hauteur. Il avait été construit tout spécialement pour pouvoir contenir l'immense vaisseau spacial qui se dressait là de sa masse gigantesque, emplissant presque tout l'espace. Makevitch et ses équipes s'étaient joués du gouvernement Australien et de tous les autres. Son programme de recherche, baptisé « Human Biologics Adventure » c'était ça, ce bateau de l'espace! Il avait ainsi détourné des centaines de milliards de dollars destinés à la recherche mondiale du Biologic Institut, un organisme issu de la gouvernance mutualisée, sur les fonds marins pour construire son vaisseau. Le nom du véritable programme était D-Day , quel autre nom ? Il était facile de berner les décideurs, hommes politiques, hauts fonctionnaires de tout poil. Ils ne viennent jamais vérifier sur le terrain. Surtout quand il s'agit,comme au cas présent, d'un programme sous l'égide du gouvernement mondial mutualisé. Ce genre d'organisme n'est en réalité jamais dirigé par personne. Et puis, de toutes manières,ca ne les intéresse pas. Ils n'ont la plupart du temps que leurs petites histoires en tête, tout ce dont on abreuve le peuple à longueur d'année. Les journalistes se fichent également éperdument de la recherche scientifique, préférant emboiter le pas à ces babouins,comme disait Makevitch, balancer leurs petites flèches au milieu de la meute. Et pendant que la meute s'agite, les scientifiques détournent les crédits. L'objet importe peu, ce qui compte c'est le chiffre avec le plus de zéro derrière. Le peuple aime la science? Non le peuple aime qu'on donne des crédits à la recherche! Alors donnons, donnons. Comme ça le peuple sait ou passe ses impôts. Mais Makevitch n'était pas un escroc. C'était même tout le contraire. Depuis trois siècles, des scientifiques alertaient les autorités sur les conséquences d'une diminution du phytoplancton. Le sujet ne passionnait pas les foules. Seul le réchauffement climatique captait l'attention des médias. Le petit monde des biologistes moléculaires s'agitait en vain. On organisa quelques symposiums, il y eu des seconds couteaux de la politique qui, pensant avoir déniché là quelque chose qui aurait pu leur servir de marche pied pour accéder à la cuisine principale, tentèrent d'alerter les médias. Mais ça ne prenait pas. Ils laissèrent donc le sujet de côté.

Les choses se compliquèrent encore lorsque le phytoplancton devint un substrat énergétique.

Le problème des océans devint secondaire. Mais depuis quelques temps, le sujet, sous la pression des médias, avait refait surface; il fallait redonner vie aux océans. On avait débloqué de l'argent, énormément d'argent. Et Makevitch avait détourné cet argent pour construire ce vaisseau. C'était la seule option raisonnable à présent.



Pékin. 23 juin. 19 h 28. Tai ming est un vieillard. Il vit seul. Sa vie a été plus ou moins misérable. La chine est un pays sous développé. Au XXI ème siècle elle faisait figure de puissance mondiale, la première.

Au siècle suivant, la chine s'est repliée sur elle même. Il n'en avait jamais été autrement dans l'histoire. Tai ming aura vécu,comme ses ancêtres. Il aura trimé aux champs, n'aura connu que son village. On l'avait marié de force à une femme qu'il n'aimait pas. Les notions d'épanouissement personnel,de bonheur individuel, lui auront d'ailleurs été étrangères sa vie entière. Ce sont des dogmes d'occidental et la chine s'était départit de l'occident au siècle dernier. Et pourtant,il y a fort a parier que Tai ming aura été, tout comptes faits, passablement heureux. Il a cherché un moment sa respiration, puis ça a été fini.




Mais pourtant le problème des océans est très largement évoqué aujourd'hui, dit Hélène.


A l'époque, ça n'était pas le cas.


Jonathan était lancé. On n'y était pas encore mais un historique s'avérait indispensable, même si pour cela il lui était nécessaire de remonter des siècles en arrière.


Quand nous avons découvert l'énergie infinie, la fusion maîtrisée si tu préfères, c'est à dire il y a à peine soixante ans finalement, le phytoplancton est, au propre comme au figuré, remonté à la surface. Le vaste programme mis en place....


s'appelait phytogénèse de la cryanosphère, oui je sais tout cela, coupa Hélène. Tes recherches portent là dessus depuis le début. En quoi cela nous oblige t il à laisser mes parents, à venir à Sydney, à ce que tu partes toute la journée je ne sais où en me laissant seule et à ce que nous allions vers un centre spatial ? Tu vas bientôt me dire que nous partons sur Mars ou quoi ? Jonathan, c'est quoi tout ça?

Nous ne partons pas sur Mars mais sur Europe. La vie y foisonne, à l'état moléculaire, mais elle se cache sous une épaisse couverture de glace. C'est, disons dans un peu moins de quatre heures maintenant, le seul lieu de l'univers qui nous soit accessible et où l'on espère pouvoir vivre désormais.


Il y a un mois, Yvan Makevitch , dans le silence de son petit bureau, s'était mis à prier. Il priait pour eux, pour ses amis. Ceux des Etats Unis, ceux d'Europe et pour ceux d'Afrique. Il priait aussi pour elle et ses petits. Il l'a connaissait à peine. C'était la fille de sa première épouse, russe comme lui. Il avait prié si fort ce jour là, lui qui ne priait jamais qu'il pu croire un instant qu'un Dieu était là qui l'écoutait dans l'ombre de la porte.


Makevitch s'était assuré du parfait déroulement des opérations. Le vaisseau, aménagé comme un immense paquebot, avec ses cabines couchettes permettant de loger jusqu'à 2 500 personnes, disposait d'une réserve d'eau et de nourriture suffisante pour les nourrir pendant une petite dizaine d'années.

Ce qui importait également autant: sa ressource en oxygène comprimé était sans équivalent. Les recherches sur ce point étaient très abouties. On savait fabriquer et stocker l'oxygène pour permettre à un navire spacial de la taille du D-Day de tenir dix ou même vingt ans.

Makevitch préparait ce jour depuis trois ans. Il retournerait à Sydney dans une dizaine de minutes et reviendrait ici avec sa femme et ses enfants. Presque tous étaient la. Makevitch était assis dans le petit local qui jouxtait l'immense hangar. Ils se réunissaient là, tous ceux du D-Day, chaque jour depuis trois ans. Il touilla son café, puis s'adressant à Jonathan lui dit :

Et Hélène ?

Hélène ? Jonathan semblait effondré. Il venait d'avouer à Hélène qu'elle ne reverrait plus ses parents. Pour la première fois depuis leur rencontre, elle l'avait traité de salaud. La voiture avait fait une embardée, les enfants s'étaient réveillés. Hélène l'avait frappé.

- Elle a alors voulu descendre de la voiture en marche, dit il. Dis moi Yvan, tu es sur...?

Tu sais bien qu'il n'y avait pas d'autre moyen. Nous sommes limités à 2 500 places. Les 534 et leur famille. Le vaisseau est archi bondé, il ne reste plus une seule place de libre. Ceci excluait dès le départ les grands parents, oncles, tantes, cousins, la famille plus ou moins éloignée.

et de ton coté ?

Les parents de ma femme sont morts et les miens aussi, ca facilite les choses si on peu dire...

Yvan Makevitch parlait peu de lui, il parlait peu en général. Il venait aux nouvelles, se préoccupait de vous, votre santé, vos enfants, les dernières vacances, mais de lui on ne savait presque rien. La seule certitude à son sujet était qu'il était bon. Makevitch, sans qu'il eut besoin de rien dire ou rien faire, portait sur son visage l'étonnante et belle lumière de ceux qui aiment leurs semblables. Croyait il en Dieu? Personne ne l'avait entendu en parler en tous cas.


Jonathan était plus jeune que Makevitch. Ils avaient travaillés ensemble sur ce projet, Le projet. Les deux hommes s'appréciaient et se vouaient une admiration mutuelle. Jonathan se mit à sangloter. Il ne supportait pas l'idée que sa femme puisse le considérer comme un salaud. Peut être était il tout simplement en train de craquer ?

Il aurait fallu faire ça autrement. Jonathan suffoquait, il était en larmes et ne se souciait pas même du regard du professeur.

tu sais bien que c'était impossible, répondit Makevitch en lui touchant l'épaule.

Putain quelle merde, c'est dingue, on ne nous croira jamais!

Qui veux tu qui te croie à présent ?

24 heures on avait besoin de 24 heures.

Ouais, on s'est planté. pas de beaucoup. C'est un drame absolu. Mais tu le sais aussi bien que moi, pour eux ca n'aurait rien changé, absolument rien. Il regardait quelque part, loin derrière le vaisseau, puis, désignant l'horizon invisible, il balaya l'air d'un geste fatigué.


Jonathan sembla émerger d'un monde enfoui. Il se tenait le visage entre les mains, les coudes pliés sur ses genoux. Il se redressa et chercha des yeux Hélène et ses enfants mais ne les trouva pas. On avait du leur administrer le calmant prescrit par la procédure et les conduire à bord. Lui devait participer au décollage, il ne les retrouveraient que plus tard.


Il fallait monter à bord avant 20 h30, le vaisseau s'élèverait dans le ciel à 22h 30 très précisément.


Ce que voulait dire Jonathan c'était la fin de l'histoire, celle qu'il n'avait pas eu le temps de terminer dans la voiture. Hélène saurait plus tard. Pour l'heure elle devait dormir, assommée par le sédatif, comme les autres passagers montés à bord du D-Day.

Depuis une soixantaine d'années, les recherches sur le phytoplancton, interrompues depuis la fin du XXI siècle, avaient repris. Le réchauffement climatique avait entraîné celui des océans. Le phytoplancton, pour se développer, a besoin d'un océan relativement froid. Au XX ème siècle, il commença à diminuer, insensiblement tout d'abord, puis de manière significative vers la fin du XXIème siècle, lorsque les océans commencèrent à se réchauffer vraiment. A cela s'était ajouté l'exploitation intensive de cette nouvelle source d'énergie. La conséquence première de la diminution très sensible du phytoplancton fut la quasi disparition de toute vie animale sous marine. Le phénomène se produisit vers la fin du siècle suivant.

Au cours du XXIII ème siècle, les choses allèrent malgré tout en s'améliorant: d'une part, on avait réussi à le synthétiser. Il n'était plus nécessaire d'aller le chercher à la surface des océans. Le produire synthétiquement était beaucoup plus rentable. D'autre part, à partir des années 2 350, le phytoplancton se stabilisa. Il n'était toujours pas présent en nombre suffisant pour permettre une reconstitution de la vie animale sous marine mais sa diminution programmée ne menaçait plus la vie toute entière. La communauté scientifique était soulagée. Car, au delà de sa fonction de base de nutriment pour la chaine animale des océans, le phytoplancton participait également à la fabrication de l'oxygène en captant le Co2 contenu dans l'atmosphère et en rejetant plus de la moitié de l'oxygène nécessaire à la vie sur terre. En réalité, il participait à bien davantage que cela. Car, si les forêts et autres végétaux produisaient l'autre moitié, elles rejetaient dans une proportion presque équivalente du C02. L'effet net était donc assez négligeable. L'oxygène est présent dans l'atmosphère à un taux de 20,95 %. A partir de 19,5 % l'air n'est plus respirable. A 19,6% les premiers symptômes se manifestent : mal de tête, engourdissement...Lorsque les chercheurs reprirent leurs investigations, il y a soixante ans, le phytoplancton ne produisait plus que la moitié de l'oxygène net de la planète et le taux d'oxygène s'était abaissé à 20,15 %. Ils établirent alors, à l'aide d'un puissant ordinateur, une courbe, dite courbe de Spencer Tracy du nom de son inventeur, cette courbe indiquait ceci : la découverte de la fusion allait permettre une très lente évolution de ces données, du moins à l'échelle humaine. Les quantités de C02 rejetés dans l'atmosphère diminueraient sensiblement, de l'ordre de 10% par décennie mais l'accumulation constatée durant les siècles précédents amoindrirait néanmoins cet effet à court terme.

Durant cette période transitoire,le phytoplancton, après une période de stabilisation du à son cycle naturel, continuerait malgré tout à disparaitre peu à peu, de l'ordre de 3% chaque année. Les effets bénéfiques du refroidissement très progressif de l'air ne pourraient commencer à agir sur la température des océans que bien des années plus tard. Le résultat de ces fragiles combinaisons fut soumis à l'ordinateur imaginé par Spencer Tracy. La courbe indiquait un point critique en juin 2430.

On poursuivit les recherches de Spencer et l'ordinateur avec obstination indiquait le point critique en juin 2430. Puis le protocole changea. Les ultimes recherches laissèrent apparaitre un affaissement critique du taux d'oxygène dans l'atmosphère: 19,6% les 22 et 23 juin, puis un seuil extrêmement bas au 24 juin. Ce jour là, très exactement, le taux d'oxygène passerait à 19,500000000000000003%.

Ensuite, tout doucement, de manière imperceptible, le taux remonterait. L'essentiel étant qu'il ne redescende jamais au dessous de 19,50 %. L'équipe Spencer, comme on les appelait encore, prit alors une décision incroyable. On décida de ne pas avertir les autorités. A quoi cela aurait il servi ? Les choses étaient enclenchées, rien ne pourrait désormais dévier le cours du destin. L'ordinateur Spencer Tracy était si sophistiqué que l'on était capable de prévoir au jour près l'évolution de la courbe. Avec pour la journée du 24 juin, cette énorme sueur froide en perspective. On était alors en 2423. L'énergie produite par la fusion était d'une propreté absolue. L'activité humaine n'interagissait plus avec son environnement ou de manière très marginale. Le phytoplancton synthétisé dont on aurait pu reprendre la production n'aurait été d'aucune utilité car sa fonction vitale de production d'oxygène/captation du C02 ne pouvait être synthétisée. On avait affaire à du faux plancton en quelque sorte, tout juste bon à produire du pétrole mais rien d'autre.

Comme on ne savait pas non plus agir sur l'atmosphère pour dégager le C02 accumulé au cours du temps et encore prisonnier, il n'y avait pas d'alternative. On avait fait ce qu'il fallait mais les dès étaient jetés. La balle était en l'air, on la suivait des yeux , on pensait savoir de surcroît où elle retomberait, très précisément.

C'est pourquoi on décida de pas diffuser ce type de recherche, du moins en dehors des cercles habituels.

Le monde était en paix. Le règne de L'Amérique semblait ne pas devoir connaitre de fin depuis que la Chine était retournée à ses âges sombres. En Europe, la dénatalité, les vagues successives d'immigration incessantes depuis le milieu du XX ème siècle avaient profondément transformé le continent. Les sunnites, majoritaires, imposaient leurs lois sur ce continent. Peu à peu les habitants originaires d'Europe avaient émigrés à leur tour vers les plaines Australes et les Amériques. Le français, l'allemand étaient des langues mortes. Le monde était désormais divisé en trois zones bien distinctes : le Pacifique de Los Angeles à Sydney, le monde Arabo- atlantique de Londres-Berlin-Paris-Madrid-Rome-Bagdad et la zone de l'Asie suivant une ligne Moscou-Pékin.

L'Amérique continuait donc de régner sur un monde apaisé où chacun avait finalement trouvé sa place. On continuait malgré tout, au sein des milieux intellectuels, à adorer la vieille Europe un peu à la manière dont on avait adoré au XIX ème siècle la grandeur déchue de l'empire romain. Mais, aux yeux de l'Amérique, l'Europe était un monde englouti, définitivement perdu.

Le reste du monde était apaisé et joyeux, du moins celui qui seul comptait aux yeux des Américains : le leur. C'est la raison pour laquelle, en ce matin de mars 2426 lorsque Makevitch avait annoncé la nouvelle à Suzanne et que celle çi s'était exclamée :

Oh my God! . Elle pensait sans doute au Dieu de l'Amérique et des américains.



Les calculs de Spencer Tracy étaient faux. Presque rien. le taux de 19,5000000003% serait bien atteint le 24 juin, sauvant la terre de justesse mais avant cela, oui avant cela, l'ordinateur établissait désormais avec une extrême précision, qu'au cours de la journée, un seuil très légèrement plus bas serait atteint. Ce seuil s'établissait à 19,500000000000%. L'évènement se produirait aux environs de 15h 30, heure de Los Angeles, 21h 30, heure de Sydney, 13h30 heure de Paris. Durant ce jour, une part infime de ce jour, peut être une heure pas davantage, l'air de la planète toute entière serait irrespirable. Comment faire pour ne pas respirer ne serait ce que cinq minutes?

On aurait pu pallier au problème en produisant de l'oxygène, ne serait ce que pendant une heure; ça on savait faire. On savait faire pour trois mille personnes, peut être dix mille et dans un espace limité, mais pas pour dix milliards d'hommes et de femmes, pas sur la terre entière. Makevitch avait cru devenir fou ce jour là.


Depuis, chaque jour l'ordinateur de Spencer Tracy trace invariablement sa même courbe. Et depuis trois ans il manque une après midi, une heure à l'humanité pour poursuivre sa route.


Makevitch pense à Simon, son filleul. Simon était un encore un enfant lorsqu'ils s'étaient vu pour la dernière fois, chez ses parents, à Paris. Makevitch pense à ce mariage qui aurait lieu le 22 juin. C'était Simon qui lui en avait parlé, il y a une semaine à peine. Makevitch avait failli lui dire de venir, il s'en était voulu énormément de ne pas l'avoir fait, mais cela n'était pas envisageable.

Il pense depuis le ciel à Georges, son ami d'enfance. Georges est sans doute plus heureux désormais. Il pense à ce petit gosse sur son tas d'ordures qu'il avait rencontré lors d'un de ses voyages en Afrique. Il pense à sa cousine Isabela, à Jorge, à Tai ming, à Svetlana, la fille de sa première épouse russe. Il pense à tous ces gens, ces êtres qu'il aime. Chacun dans ce vaisseau pense aux mêmes êtres, au même moment. Il est 22 h 30, heure de Sydney. Les 534 sont en route vers Europe. L'énorme vaisseau vient de s'élever dans un fracas terrifiant.

Selon les derniers calculs,à cette heure là, le taux d'oxygène était remonté à 19,500000002%. Il avait manqué à la terre 58 minutes. 58 minutes durant lesquels toute vie s'était arrêtée à jamais.


Hélène a les yeux fixés au plafond du grand vaisseau. Elle a posé sa tête tout contre la poitrine rassurante de son mari. Les enfants dorment encore. Elle a compris et ne pleure plus. Mais il y a encore une chose qu'elle désire savoir tandis que le vaisseau file dans le noir de l'espace.

Si nous étions restés, nous serions morts. Mais maintenant qu'il n'y a plus de danger, pourquoi ne pas rentrer ?

Parce que la terre est une planète morte, Hélène, lui répondit Jonathan. Nous devrions tout d'abord attendre des mois avant de pouvoir revenir à cause des émanations en provenance de milliards de corps en décomposition. Hélène eut un frisson, elle pensa soudain à ses parents, mais elle se sentait si hébétée, comme en dehors d'elle même, étrangère à son propre corps et à son esprit, qu'elle ne parvenait plus à éprouver une quelconque émotion.

Mais il y a autre chose encore,dit Jonathan. La fusion nucléaire est une énergie qui nécessite une maintenance quotidienne et des techniciens parfaitement formés. C'est, à l'échelle de la terre, des centaines de milliers de techniciens. Nous ne les avons plus, nous n'aurions pu les conserver en vie, même cinq minutes. Les systèmes centraux vont peu à peu se déliter, mais le coeur de ces systèmes continuera malgré tout à fonctionner, libérant, en dehors de tout contrôle, des quantités énormes de radiation. Il n'y a rien a faire contre ca. Nous sommes condamnés à partir. Les enfants dormaient profondément. Ils grandiront dans ce vaisseau, songea Jonathan, et après ? Après ? Europe, la planète gelée était la seule issue...De l'oxygène affleurait en grandes quantités sous la glace; il faudrait le capter, l'emprisonner. C'était une étape, la seule possible. Une étape vers quoi? Personne n'en avait la moindre idée.


Brice sortit de l'eau et s'agrippa à l'embarcation. Il ôta son masque, débrancha le tuyau d'oxygène.

Il venait de passer une petite heure sous l'eau. Il était à la recherche d'une ancienne épave. Un client qui voulait retrouver la trace d'un rafiot ayant appartenu à son grand père. Il espérait récupérer des trucs, une montre, un bracelet,une chaine, des souvenirs quoi. Le gars avait de la tune et il adorait son grand père. Alors Brice avait plongé. Il n'avait rien trouvé aujourd'hui, mais il était parti trop tard, sur le coup des 21h...il faisait déjà nuit depuis longtemps. Mais ce soir la lune était pleine, alors il s'était dit : - putain, l'autre il va me bouffer si j'y vais pas! Ca faisait trois jours qu'il le tenait en haleine. Avec une bonne lampe torche et la lune ça devrait le faire. Mais ça n'avait pas fait. A 21 h 15, le temps d'arriver, il s'était mis à l'eau. Une heure après, il était remonté. Il était même très exactement 22 h 25. Un plongeur sait toujours avec une extrême précision l'heure qu'il est, le temps passé sous l'eau, tous ces paramètres sont essentiels à une bonne gestion de l'oxygène. Et puis, surtout, il s'était dit : - putain,travailler la nuit, quelle vie de dingue! Et pourtant, Brice avait besoin d'argent, il y retournerait demain, ça dépendait aussi du client. Il était payé à la tâche alors c'était comme il voulait...Il devait bien être le seul ce jour là à plonger à une heure comme ça dans la baie de Sydney. C'était un jour bizarre, pas de ceux qu'il aimait bien. Un temps lourd, gris, un temps à moustiques. Quand il reprit pied sur son zodiac, il se sentit un peu chavirer.

Putain, Brice, t'as fait le con s'était il dit dans sa barbe. t'es remonté trop vite! Et puis ça avait passé.

Brice démarra le moteur mais le bruit de celui ci fut soudain couvert par une terrible détonation.

Il leva les yeux vers le ciel. Un vaisseau gigantesque s'élevait dans l'air dans un vacarme assourdissant. Brice était debout sur son Zodiac, les bras ballants, le visage tourné en direction des nuages. On y voyait presque comme en plein jour, la lune se balançait, énorme,dans le ciel et illuminait tout l'espace.

Putain, c'est quoi ça....

Putain, c'est quoi ce truc?


Au bout d'une minute, l'engin avait disparu.

Brice y songeait encore lorsqu'il fut à moins de cinq miles de Sydney.

Putain, répéta t il pour la centième fois. Drôle de journée!

Il se claqua une main derrière le cou. il avait senti quelque chose qui le dérangeait. Un moustique?


Non, Brice, un moustique c'est pas possible.






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