Le rôle de ma vie

Aurelie Blondel

Partie 9 et 9 bis Mise à jour le 5/10

La mission numéro 1 commence. L'infirmière m'a viré ma perfusion puisque je peux manger mes repas autrement que par les veines. Et comme je mange et que je tiens bien debout, je sais que je vais pouvoir quémander mon droit de fumer.

À peine mon repas terminé, je bipe pour que quelqu'un vienne. Tiens, c'est une nouvelle tête lui je crois. Il me demande si ça s'est bien passé, je lui réponds que c'était succulent. Il rigole puis me demande si j'ai besoin de quelque chose pour avoir biper la présence de quelqu'un. Je lui demande s'il y a une fontaine à eau que je puisse remplir ma carafe et de m'emmener là où mes affaires sont rangées pour y prendre mes cigarettes. Il fronce les sourcils et me demande d'attendre un instant. Et merde, il va revenir avec une excuse à la con à coup sûr.

À ma grande surprise, il revient avec un peignoir et me demande de le suivre. «Vous n'allez pas sortir si peu couverte. Suivez-moi, vous allez pouvoir récupérer vos affaires.» Mais quoi? C'est trop bizarre, trop facile, ça colle pas.

Je décide de prendre un ton léger et fais semblant de m'intéresser à lui. «Vous êtes nouveau ici? C'est la première fois que je vous vois.» Il me refait un grand sourire et hoche la tête. «Oui, c'est mon premier service, je suis aide-soignant depuis peu. J'espère qu'ils seront contents de mon travail.» Moi oui, pas de doute, par contre, il n'a du recevoir aucune consigne du docteur Samaël qui ne va pas manquer de le mettre au chômage. Au pire, il y a une place vacante à la Criée… Je suis prise de scrupules de tirer partie de sa naïveté et de son enthousiasme mais je ne recule pas.

J'arrive avec lui devant une porte fermée à clef qu'il ouvre. Un simple placard. Mais la caverne d'Ali Baba pour moi. «Ce sont les objets perdus», me précise t'il, «Vous reconnaissez vos affaires?»

L'occasion est trop belle et pour ne pas paraître trop suspecte, je scrute ce qui se trouve dans ce placard. Des fringues, des bagues et autres bijoux, des chaussures, un chéquier, des chewing-gum , mon sac à dos… Je prends l'air le plus naturel qui soit et je commence à me servir. «Ah, ça fait du bien de retrouver des objets familiers!» Je prends une robe au pif, les chewing-gum, un collier, des boucles d'oreille que je trouve à mon goût et mon sac à dos. Je l'ouvre pour vérifier son contenu. Tout y est. Je soupire de soulagement. Un énorme soupir qui éveille son attention. «Vous pouvez faire machine arrière maintenant vous savez, vous vous rendez pas service là.» Et voilà, comme je le pensais… trop facile pour que ça marche. Je le regarde, désespérée . Il pointe du doigt mon sac à dos. «Les sorties cigarettes, c'est jusqu'à 22h, vous en fumerez pas beaucoup ce soir.» Oh putain! Il parlait simplement des clopes. Je lui fais un énorme sourire à peine exagéré et lui secoue sous le nez le paquet de chewing-gum.

«Je peux refermer le placard, vous n'avez rien oublié?»

«C'est parfait! Je ne manquerais pas de dire au docteur à quel point vous avez été professionnel et charmant.» Il rougit. C'est mignon. Je suis une garce. Je m'en fous. 


J'ai toutes mes affaires et même du bonus. Je ne suis plus perfusée et cette robe me ferait passer inaperçue tant elle n'est pas mon style. Ma décision est prise depuis l'ouverture du placard. Je me casse d'ici. Je prends le bloc note et le stylo qui me servaient à m'exprimer avant de retrouver ma voix et me signe une décharge, en glissant un mot pour l'aide-soignant afin qu'il ne se fasse pas virer alors que j'ai clairement tiré profit de la situation. Je file dans la salle de bain, je me douche, j'enfile ma nouvelle robe qui irait à ravir à une étudiante encore pucelle, je récupère les papiers médicaux me concernant au bout du lit, je fourre tout dans mon sac à dos. J'ai dans ma main cigarette et briquet, prêts à être dégainés et je prends le chemin de la sortie.

Je vois Rose qui se trouve un peu plus loin dans le couloir et ça me fait chier. Soit elle va aller cafter, soit elle va me fuir et cafter quand-même cette connasse. Fait chier. Mes cheveux encore mouillés, c'est trop grillé en plus. Je fais demi-tour jusque dans ma chambre et je fouille dans mon sac si je trouve une élastique. Je suis persuadée en avoir toujours une qui traîne mais la panique m'empêche de bien faire. Je sors tout, sauf mon portable. Il y a mon porte-monnaie. J'ai même pas vérifié si on m'avait volé mes thunes. À partir de quand j'ai arrêté de réfléchir et d'anticiper au juste? Je vais devoir rectifier le tir là. En ouvrant mon porte monnaie, j'y trouve pas une thune évidemment. Je m'attendais à quoi franchement? Par contre y a une élastique. Avec les boucles d'oreilles que je viens de récupérer, ce sera parfait. Même moi, je ne me reconnais pas.

Je reprends le chemin vers la sortie, je croise Rose qui me salue d'un Bonsoir Mademoiselle auquel j'ai envie de répondre par un doigt d'honneur et j'appuie sur le bouton de l'ascenseur. En un rien de temps, je suis dehors et libre. Je m'allume ma clope. Vertige… Qu'elle est bonne cette sensation décidément . Je sors mon portable de mon sac. Il a encore de la batterie. Nickel! Beaucoup d'appels manqués de Gérald, aucun de Romane… Tiens donc. Pas de messages. Rien venant du boulot. Méga vie sociale wouhou!

Bon, une chose est sûre, ce soir je m'offre l'hôtel. J'ai activé la map sur mon téléphone pour trouver un distributeur et retirer de l'argent puisqu'on m'a vidé les poches et séquestré mes affaires à l'hosto. Je me dirige vers le centre ville et j'éteins mon portable pour économiser la batterie. Sur place, j'ai la désagréable surprise de voir que ma carte ne s'insère pas dans le distributeur. Elle bloque. J'essaye avec un autre distributeur, même topo. Je parle à voix haute, énervée. MAIS PUTAIN DE MERDE!!!! Tu vas marcher oui!

Une voix se fait entendre dans mon dos et je sursaute. «Elle est démagnétisée ta carte, pas la peine de gueuler comme un phoque et réveiller tout le quartier.» C'est une femme qui attendait son tour pour retirer des thunes, comme moi. Je n'ai pas senti sa présence, trop préoccupée et impatiente. Elle est habillée pour aller chasser, maquillée jusqu'au bout des ongles et je l'envie. Ca me fait penser que je n'ai rien de plus comme fringues que cette robe digne d'un bal de promo, mon jean, mon sweat et mes gants. Le reste se trouve chez Romane. Je soupire et laisse la place.

Bon ben je vais me trouver un endroit discret et à l'abri pour pioncer. Je suis lessivée. Je marche sans vraiment savoir où je vais, je glisse une main dans mon sac pour me sortir une clope quand je sens le carton épais du chéquier que j'ai pris à l'hosto pour paraître crédible. Bah voilà, j'ai la solution. Ce sera nuit à l'hôtel et désolée pour le proprio du chéquier. Faut savoir où on laisse ses affaires après tout.

Je reprends et j'allume mon portable. L'hosto a essayé de m'appeler. Ils ont pas perdu de temps. Mais j'ai signé ma décharge et ils ne peuvent rien faire. Je rigole, je jubile, je suis libre. Libre de l'hosto, libre de Romane, libre de ce boulot de merde, libre de ce patron de merde. J'ai pas grand-chose et je vole un inconnu pour une nuit d'hôtel mais je suis libre. Je me sens heureuse. J'ai rarement éprouvé ce sentiment. Et c'est dans ce mood que j'entre dans le premier hôtel sur mon chemin pour demander une chambre. On me demande pour combien de nuits je souhaite séjourner dans leur établissement. Môdame!! Il vous prie. Un établissement, carrément. Je suis moqueuse et je prends la même voix hautaine que la réceptionniste. «Je n'en sais fichtre rien pour le moment voyez-vous.»

«Ce n'est pas grave Mademoiselle, cependant, votre nombre de nuitées étant indéfinies, nous ne pourrons pas prendre de règlement en espèces.» Oh putain, c'est mon soir de chance.

«Je ne me promène que rarement avec de l'espèce ma chère. Et appelez moi Madame.»

La réceptionniste bredouille, confuse. «Oui, bien entendu. Je vous présente toutes mes excuses.» Je sors «mon» chéquier et demande si cela conviendra. «Oh oui, absolument! C'est la garantie que nous demandons à nos hôtes. La suite est disponible, souhaitez-vous vous y installer?»

Une suite? Je réalise soudainement que je ne suis pas dans un petit hôtel bas de gamme mais dans du standing. Il m'aurait suffit de regarder autour de moi pour le comprendre avant et ne pas me moquer. Cependant prendre un air hautain m'a rendue crédible et la couleur du chéquier semble lui laisser penser que je suis de la haute. Y' a plus qu'à espérer qu'ils ne vérifient pas si le chéquier est en opposition à la banque sinon je suis dans la merde. Mais bon, faut pas se leurrer, dans ce style d'établissement, ils le font. Je ne me trompe pas sauf qu'il n'y a pas d'opposition bancaire sur les chèques. Et je jubile à nouveau. C'est vraiment mon soir de chance. J'ai intérêt à bien en profiter.


Je me sens pousser des ailes et je réserve la suite, avec petit déjeuner continental et service en chambre. Je précise ne pas vouloir être dérangée et n'accepter aucun appel.

Le chèque est bien enregistré, je n'ai plus qu'à suivre le groom. Un groom, rien que pour moi. Ça change de la piaule chez Romane et la puanteur de la Criée. Je comprends que beaucoup prennent goût à ce style de vie. Le groom, Appelez moi Vincent, est surpris de me voir sans bagages. Bah ouais, c'est super suspect ça et pas malin de ma part. Je lui sors un bobard comme quoi mes bagages ont été perdu à l'aéroport et que je ne sais pas combien de temps ça prendra avant que je les récupère. Je pousse même le vice en lui demandant s'il connaît de bonnes adresses pour faire du shopping. «Bien sûr Madame, je suis à votre entière disposition.» T'es sûr? «Le code pour entrer dans l'hôtel quand la réception est fermée est le 1067C, il est renouvelé tous les jours. Vous pourrez l'indiquer à votre époux.»

Je rêve où il tâte le terrain pour savoir si je suis accompagnée ou si je vais l'être? «Je suis seule Vincent, je n'ai personne à prévenir mais je vous remercie pour ces informations.»

Il m'ouvre la porte de la suite et me souhaite un bon séjour. Hop hop hop, pas si vite mon brave…

«Vincent?»

«Oui Madame? J'ai omis quelque chose?»

«En effet…»

Je lui fais signe de fermer la porte derrière lui, lui demande s'il est attendu. Il ne l'est pas, il est à mon entière disposition. C'est merveilleux. Je lui demande s'il préfère baiser ou faire l'amour. Il a compris le message. «Alors baise moi!»

Je n'aurais pas parié un centime sur ce genre de mec, trop poli, à l'entrejambe plate. Mais une fois à poil, quel morceau! J'en avais pas vu une aussi grosse depuis longtemps. Je vais revoir mes critères à la hausse finalement. Je vais bien la sentir passer. Je m'en régale d'avance. Vincent est bouillant. Ça doit pas être la première fois qu'il déglingue de la bourgeoise vu son savoir-faire. Et il aurait tort de s'en priver avec une libido et un sexe de cette envergure. Il m'attrape la nuque, arrache l'élastique de mes cheveux qu'il serre fort dans sa main. Il est déjà en érection quand il sort son sexe de son pantalon. Il ne porte pas de sous-vêtement, j'adore ça. Il me met à genoux et s'enfonce sans ménagement dans ma bouche. Il soulève ma robe et constate que je suis nue dessous. Ce qui le fait grogner et me baiser la bouche encore plus fort. C'est vraiment mon soir de chance!

Ou pas, quand j'entends que ça tambourine à ma porte. Vincent se rhabille à la hâte et reprend son air pro et formel. Mon état n'a rien d'inhabituel si on ne tient pas compte de la robe de princesse que je déteste. Je peste. Putain, j'ai envie de baiser moi et je pouvais pas rêver meilleur partenaire. Vous pouvez pas le laisser tranquille le temps qu'il me fasse jouir puisqu'il est à mon entière disposition?

Mon groom ouvre la porte de ma suite quand je l'aperçois entrer en trombe dans ma chambre, l'air furieux. Merde!

 Il a le regard noir. S'il était un taureau, de la fumée sortirait de ses naseaux. Comment sait il que je loge dans ce somptueux palace? Il m'a suivi. C'est la seule réponse plausible. Mais si tel est le cas, pourquoi ne pas m'avoir stoppé avant? Pour me faire passer pour une folle et m'interner? Ma stratégie prouve au contraire que j'ai toute ma tête… Pour me faire aller en taule pour usage frauduleux du chéquier alors? Est-ce qu'on va en taule pour ça déjà? Vraiment je ne vois pas. Mais il m'a suivi, j'en suis certaine.

«Depuis quand t'as les moyens de t'offrir ce genre d'endroit?» Il me lance ça en gueulant, bras grands ouverts, en tournant sur lui même. «C'est pas le genre d'établissement à prendre de l'argent sale.»

Je me prends cette remarque comme une gifle. J'enrage. Vincent a l'air furieux lui aussi. «En effet, nous n'acceptons pas de l'argent issu de la prostitution, c'est une question d'éthique...» Ah mais il me prend pour une pute et il est vexé, pauvre petite chose qui se sent sans valeur.

C'est vrai, il n'a aucune valeur à mes yeux. Juste du consommable. Je repense à ce qu'on faisait avant d'être interrompu, j'ai la dalle, j'ai toujours envie qu'il me baise. «Oh oh! Iris! On te parle!»

Je ne leur jette même pas un regard et d'une voix cinglante, je leur intime de dégager sur le champ. Mes yeux fixent mes orteils. Je ne veux pas croiser leurs regards, j'ai trop la rage mais plus que tout, je n'ai pas à me taire. De quel droit il débarque ici et me parle d'argent sale? Vas bien te faire foutre sale enculé.

«J'suis pas une pute…» Il tente de me couper la parole. «Ta gueule! JE parle. Toi, tu m'écoutes. COMPRIS?» J'attends quelques secondes. Pas un mot, le silence total. «J'suis pas une pute! Et encore moins la tienne. Je n'appartiens à personne. Ni à l'hosto, ni à toi, ni à mon patron. À personne. C'est clair!? Et je fais ce que je veux de MON fric! Surtout me faire plaisir! Aussi bien avec cette suite que dans cette suite! Mais peut-être que ça te dérange enfoiré? Et si j'appelais les flics pour harcèlement? Vincent…»

«Pardon Madame.» Son pardon n'est pas celui de quelqu'un qui n'a pas écouté mais celui d'avoir pensé que j'étais une pute. Visiblement j'ai été convaincante.

« Vincent, que devrais-je faire?»

«Je peux m'en occuper… L'établissement n'aime pas trop quand la police doit intervenir. Ça ne donne pas bonne presse…»

Je jubile «Alors t'attends quoi? Le déluge?»

Monsieur l'intrus semble plus furieux que jamais. Il est resté le regard fixé sur moi, plein de haine. «On en reparlera, sois en sûre. Ne crois pas t'en tirer à si bon compte.» puis en s'adressant à Vincent «Profites en bien…» En mimant une révérence exagérée à l'extrême, il quitte les lieux en claquant la porte. C'est ça, casse toi pignouf.


Je me tourne vers Vincent. Je suis toujours énervée. Il m'explique qu'il croyait que c'était un petit ami ou un mari jaloux, puis l'histoire de l'argent sale… Il se sent péteux là. Ah, ça tient à son boulot et ses petits extras hein. Tu veux des extras, tu vas en avoir.

Je le pousse sur le lit et le déshabille…


La nuit a été torride. Vincent est le meilleur amant que j'ai eu depuis très longtemps et je compte bien le revoir. Pas simplement pour la baise. Le revoir tout court. Mais pour la baise aussi. Il est d'accord avec ça. Je fume une clope sur la terrasse de ma suite. La vue est magnifique. D'ici, je perçois les contours et frontières de la ville. Je n'ai pas pris le temps de visiter au-delà de mon petit quartier. Je n'en voyais ni l'intérêt ni la beauté mais après une nuit à prendre les coups de reins de Vincent encore et encore, malgré la taille de son sexe, sans parler de son doigté qui vont me valoir de rougir devant la femme de chambre qui va facilement deviner qu'il ne s'agit pas de problème d'incontinence, je suis là et nue sur la terrasse, mon bel étalon enroulé dans les draps à même le sol, ma délicieuse cigarette post orgasmes et je vois au loin un parc qui paraît magnifique, des étendues de sables et la mer, des falaises avec ce qui semble être des sentiers. Autant de lieux qui me donnent envie de rester un peu dans cette ville juste pour les découvrir avant de m'en aller. Pour en garder le meilleur et ne pas finir aigrie.

Je pars me doucher et comme convenu, quand je reviens dans ma suite, Vincent a débarrassé le plancher en me laissant un petit mot doux. Oh c'est trop meugnon.

C'est l'heure pour moi de régler mes comptes. Gérald va prendre cher pour la scène qu'il a osé me faire et parler d'argent sale. Dire que je le croyais différent… Il disait lui même que je n'étais pas pourrie. Bullshit ouais. Et c'est chez lui que je compte les régler, et m'approprier sa zone de confort. Je l'appelle. Il décroche aussitôt. Il est de mauvais poil. Rien à foutre, pas mon problème. À dans 10 minutes.


J'entre sans frapper et m'assoies dans son fauteuil. Je pose mes godasses sur sa table basse si précieuse en espérant bien la salir. Tu m'as pris pour ta pute, y'en a pas ici, je bosse à l'œil, donc je vais me comporter comme une vraie salope.

Il commence à s'expliquer au calme et me rétorque qu'il ignorait mon côté bourgeoise friquée. Un comble monsieur blindé de thunes. Jaloux? J'ai quand-même bien l'intention de lui dire d'où vient ce fric, je ne suis pas du genre menteuse mais je veux le fin mot de sa version.

«Tu me suivais!» Ce n'est pas une question mais une affirmation. Il me répond «Oui». Oui? Oui et c'est tout?

Ah non c'est pas tout, il dit me suivre régulièrement. Beaucoup de personnes me souhaitent du mal, qu'il ne me l'apprend pas. Il sait que ça ne lui donne pas le droit de faire ça, que c'est malsain mais il ne veut pas qu'il m'arrive la même chose qu'à Magda et quand je suis partie de chez lui, il a aperçu Romane et il a flippé. À raison apparemment puisqu'il m'a retrouvé dans ma piaule chez elle, inconsciente, presque morte. Non… Te laisses pas embobiner!

J'écoute son récit à peine croyable. Pour commencer, il se pose en grand seigneur au secours de la gente damoiselle et Romane aurait tué Magda en faisant passer ça pour un suicide lié à une dépression post reconversion. Qu'elle n'est pas la première et que ça n'inquiète pas les flics puisque c'est monnaie courante. J'ai l'impression de vivre dans un autre monde là. Ça me paraît tellement gros, irréel. Allez abrège, j'ai mieux à faire que d'être prise pour une conne. Du taf à retrouver par exemple.

Gérald continue ses explications avec l'hôpital où il m'aurait déposé en urgence et qui lui aurait interdit tout contact de près ou de loin avec moi ensuite. Quand il m'a vu sortir de l'hosto dans cette robe, il m'aurait reconnu uniquement grâce à mon sac à dos et aurait décidé de me suivre. Il comptait me proposer de venir chez lui mais il a vu que je me débrouillais pas trop mal et a fait le guet. Mais oui mais c'est bien sûr!

Le truc qui l'aurait rendu fou, c'est quand il n'a pas vu le groom redescendre. Il m'avoue avoir été jaloux, avoir vu rouge.

«Me demande pas pourquoi j'ai été jaloux, je sais pas. Je t'aime pas. Enfin si je t'aime bien mais je t'aime pas, tu vois?»

«Je vois oui et tu sais quoi? C'est ok pour ta proposition, je vais loger chez toi, dès maintenant. J'utilise un chéquier que j'ai chouravé dans la placard des objets trouvés de l'hosto. Ils ne vont pas tarder à se rendre compte que je suis une voleuse et je veux pas d'emmerdes. J'en ai assez comme ça visiblement, tu seras un très bon alibi.» Et en faisant une révérence tirée à l'extrême comme lui la veille, pour bien me foutre de sa gueule, je termine avec un sarcastique «Merci mon bon prince.»

Puisqu'il semble n'en avoir rien à foutre, je continue et lui impose deux conditions: Je m'envoie en l'air avec qui je veux et où je veux, dans ma nouvelle piaule chez lui inclus. Ah, enfin une grimace … Il accepte de mauvais cœur. Parfait!

Ensuite, mon job à la Criée, c'est ciao. Il éclate de rire en me précisant que je suis remplacée depuis un moment. Parfait aussi.

Et je ne sais pas pourquoi mais j'en viens à lui parler de ma mission 2. Il se lève soudainement et d'un ton glacial, m'intime d'arrêter de remuer la merde et de laisser au passé ce qui appartient au passé. Je suis prise d'un frisson d'effroi quand il ajoute: «Tu m'en as déjà trop dit Iris, beaucoup trop… Tu gobes n'importe quoi de n'importe qui. Tu ne sortiras pas d'ici.»



Aurélie B

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