Le royaume

belthane

Tout partait de travers au royaume du Petit Nicolas. Lui-même semblait ne plus marcher droit. Son peuple refusait de « travailler plus pour gagner plus » et le montrait en descendant dans les rues de l'éternelle capitale. Le monarque ne supportait plus les bouffons des ondes qui le brocardaient sans cesse et les avait fait congédier par quelque sous-fifres se proclamant avec fierté « redresseur de torts ». Pour couronner le tout son équipe de preux gladiateurs participant à un tournoi prestigieux aux confins du monde connus, avait subit une déconvenue inversement proportionnelle à sa légendaire victoire douze ans plus tôt.

L'été s'annonçait décidément bien plus agité qu'a l'accoutumée et les vacances fort méritées du Petit Nicolas risquaient de se voir chamboulées voir raccourcies. Pris d'une colère subite et d'un désarroi grandissant le maître du palais perdait de vue ses priorités à savoir combler de bonheur son peuple. Ainsi mercredi il mit de l'ordre dans son agenda, faisant passer à la trappe une entrevue prévue de longue date avec la représentante d'une contrée voisine, dont les relations de proximités s'étaient envenimées depuis que la Crise, cette grande pimbêche, avait décidé de souffler un vent de récession sur le monde. Jeudi, alors que l'équipe de gladiateurs était définitivement éliminée du tournoi, le monarque jugea préférable de s'entretenir avec un des gladiateurs déchu plutôt que de recevoir les représentants de divers ordres chevaleresques aux missions sanitaires et charitables.

Avec la grève et les manifestations, le royaume était vraiment sens dessus dessous et personne ne semblait en mesure de remettre les choses dans l'ordre. Satrapes, nobliaux, connétables, chroniqueurs et autres obséquieux semblaient tous obnubilés par l'échec du tournoi plutôt que par les voix tonitruante de la rue. On en viendrait presque à espérer la fin de ces joutes sportives afin que les passions retombent et qu'enfin ceux qui nous gouvernent s'occupent des problèmes du peuple. Force est de constater qu'il manquait quelque chose au Petit Nicolas que même sa grande muse et troisième épouse n'était en mesure - avec sa voix timorée mais harmonieuse - de lui donner ; le sens de l'humour et de l'autodérision.

Car à ce rythme, le ballet incessant des futilités risquait de se terminer en cataclysme politique. Qu'elle idée saugrenue avait-il eu en congédiant ses bouffons ? Heureusement pour le salut du royaume on ne se débarrasse pas aussi facilement que cela d'un bouffon, l'un d'eux fut même capable de rendre le sourire au Petit Nicolas. Mais cela c'est une autre histoire.

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