Le samovar (délirant)

mazdak-vafaei-shalmani

J'ai chez moi un samovar en cuivre des plus exquis, une merveille de l'architecture artisanale persane recouverte de l'étrange histoire de mes pères. C'est un samovar couvert d'une peau dorée au bord duquel je devrais m'installer pour passer mes longues soirées d'hiver, et boire le breuvage qui a vu grandir mes ancêtres. Encore au début du XX ème siècle, toutes les familles persanes possédaient ce vieux truc qui fonctionnait avec du charbon, un bidule, qui n'a jamais servi à se réchauffer, mais à préparer du thé, liquide sans lequel l'iranien ne serait pas persan. Il est peu dire que sans les apports énergétiques du thé, les femmes iraniennes n'auraient pas le même regard, ce regard effronté et sévère : un mélange charmant entre de grands yeux noirs, et une pilosité conséquente au niveau du sourcil. Ce regard lui offre une telle beauté que les tapis persans ont fait de la femme iranienne leur égérie, alors que la République islamique a renoncé à voiler cette partie de leur visage, recouvrant de tissu que le haut de leurs cheveux qui, il est vrai, n'en méritait pas tant. Par ailleurs, la pilosité des iraniens est une grande fresque historique que décrit l'art iranien. L'inconscient populaire se représente l'iranien comme un barbu, en réalité, c'est un gorille. Déjà sur les vases de l'Empire Perse, les premiers barbus de l'univers, les archers Perses, partaient de Persépolis pour aller s’effondrer sur les ruines des cites grecques renaissantes pendant les guerres médiques. Aujourd'hui, les portraits géants du Guide Ali Khameney qui s'étendent sur  les immeubles de Téhéran, et sur lesquels la barbe du patriarche s'élève du sommet du ciel pour retomber au plus profond du sol, rappelle au monde "diabolique", que même affamé par quelques 20 années d'un embargo injuste, l'homme iranien portera toujours sa barbe. Les passants pourraient lui rappeler qu'à force de trop s'approcher du soleil, il pourrait se brûler les ailes, ou dans son cas, la barbe.

Bon, enfin ce thé quelle Merveille ! C'est surtout parce que je vis ici aujourd'hui que je m'émerveille autant  de ce colorant au goût de thé réchauffé avec du charbon. Je me servirais de ce samovar pour faire un autodafé avant qu'on me jette au feu

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