Le Serpent et le Rat
Laurent Ottogalli
Une femme serpent promenant s’en alla,
Aux détours du hasard, petit rat rencontra.
Le si vilain rongeur sous le charme tomba :
En un et deux coups d’œil, elle l’hypnotisa…
La sublime reptile, en le considérant,
Par ton et par stature, le trouva repoussant.
La suite est plus futile, en se contredisant,
Pardon, mais par nature, le vit appétissant.
Lui, tout tremblant, encore plein de stupeur,
Pour la première fois, sentit battre son cœur,
Oubliant ce que font les serpents aux rongeurs,
Il l’aimerait, c’est promis, lui ferait son bonheur.
N’écoutant que son cœur, par ses larmes versées,
Par ses rires, par ses pleurs, elle fut bouleversée.
La faim pour l’amour pouvait donc s’inverser,
L’ordre bien établi serait donc renversé.
À l’aimer sans compter, elle le condamna,
À l’œil, elle le garda, et avec s’amusa :
Elle, serpent, lui, rampant ; elle, diva, lui, ingrat,
Lovée autour du petit rat, et moins deux l’étrangla,
Lui, étouffant, séditieux, mais de force, elle s’enlaça. ..
Tel l’enfant capricieux, son beau jouet cassa,
En l’air le jeta, le rejeta, puis à force s’en lassa,
Laissant le rat contrit, prostré au coin du bois,
D’autant plus que par là, devinez qui passa:
Un serpent bien plus beau, un serpent genre boa,
Avec lui s’enivra, vous savez quand on boit…
Mais s’éveilla bien vite avec la gueule de bois…
Quand elle voulut sur les « i » mettre les points,
Que croyez-vous qu’elle trouva ? Rien ! De rat, point !...
Le bonheur nouveau, au rongeur avait souri :
Il avait rencontré, plus conforme, une souris…