Le serpent siffle, je crache en retour

Ferdinand Legendre


Je marche dans l'allée, le ciel coule, entre gris, noir et lourd, n'offrant nulle ouverture, il me tient à la gorge comme tes mains m'avaient empoigné entre deux va-et-vient.

Tiens, le chemin est pavé de feuilles de cendres tombées, celles qui n'ont pas disparu dans l'air.

La condensation fait pleurer le plafond, les corps glissent les uns contre les autres, aux murs la vieille pierre, témoin muet, moins de fumée depuis l'interdiction.

Vos yeux me regardent mais ne me voient plus.

Que reste-t-il alors ?

Dehors, ça tonne, ça fait vibrer les vitres, évider les pitres et les pointes mauvaises,

Acide, comme une blague aux funérailles, comme une mauvaise baise.


Le serpent siffle, je crache en retour,


Égo meurtri, de bonnes intentions pétri. Je n'ai pas fermé la porte, alors ils entreront, j'espère qu'ils n'auront pas tout pris.

Ils viendront voler ce qui peut l'être, briser le brasier, sous les ongles sales, griffer les braises et,

Sans une once de recul, tirer dans la foule.


Frappe, frappe, depuis la houle,


Prends soin de l'enfant, berce-le près de l'enceinte, afin qu'il sache enfin que du son comme de certaines autres choses, jamais l'on ne se cache.


Frappe, frappe encore,


Respire-moi, embrasse-moi le corps, afin de ne pas te salir, je ferai un effort.

Tu lis entre les lignes, je suis à moitié mort,  ton verre à moitié vide, je te trouves bien hâtive,

Mêle-moi si salive et frappe-moi encore, je veux nous sentir vivre.


Le serpent siffle, je crache en retour,


Et tant de flots de mots viennent me recouvrir, connaître vos pensées signifie vous ouvrir, rallumer un pétard avec un allume-gaz, ne plus jamais dormir, comme après deux-trois taz, se laisser emporter, tu vois, par le désir, Je ne suis à portée, je plane, vais choisir, une réalité qui n'est que la nuit tard, ouvre donc la fenêtre, il y a trop de fumée, de fantômes, de brouillard.


Le serpent siffle, je crache en retour,


Sur son visage, drapé d'insolence, je n'attends pas pour danser que la musique se lance, j'ai déjà, dans la cavalcade, oublié le venin, encaissé les saccades et je me couche, ma sœur, dans des draps plein de sueur,


Et puis ça recommence.

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