Le taxi-moto

ishiro

Saigon novembre 2013

C'est en novembre à Saigon, je devrais dire Ho Chi Minh mais tout le monde dit Saigon, alors je fais de même. Il fait très chaud et très humide, mes pieds son gonflés, l'atmosphère est lourde, partout du bruit incessant, celui des motos-honda ( genre de petites mobilettes ) très prisées localement et dans tout le Vietnam, des klaxons, des autos qui essayent de se frayer un chemin parmi tous ces deux-roues. Jeanne mon amie Vietnamienne chez qui je réside va partir à un rendez-vous ce matin, elle me confie à un taxi moto de sa connaissance pour me transporter dans Saigon, avec plusieurs étapes dont une dans un musée du centre ville et l'autre à la poste centrale. Cet homme ne parle ni anglais ni français, en fait je devrais plutôt dire : je ne parle pas le vietnamien. Il me donne un casque en souriant, il a de belles dents un peu jaunies, sans doute par le tabac, des beaux yeux doux et rieurs, une peau qui ressemble à du parchemin bruni, il porte des tongs. Nous voilà partis, l'air d'un coup devient plus agréable avec le vent de la vitesse, je me tiens avec la main gauche à l'arrière de la petite moto, qui n'est pas jeune non plus, nous roulons dans les ruelles d'abord, puis sur les routes de la cité. Partout il y a "les autres", les deux-roues, plein , partout, dans tous les sens, curieusement je n'ai pas peur, cet homme me donne confiance et pourtant je ne le connais pas, on ne parle pas le même langage, je suis loin de chez moi, je suis seule et je me sens libre, libre !

Je pourrais rouler toute la vie comme cela, abandonnée à l'incertain, sans avoir besoin de dire quoi que ce soit, avec la fraicheur du vent.

Cet instant est magique et pourtant très banal pour ces millions de vietnamiens qui ne circulent que comme cela. Bon je n'ai pas parlé de la pollution, mais elle est là partout et va de pair avec la circulation de toutes ces motobylettes. L'air est comme voilé en permanence de ce fait.

Il me dépose devant le musée et m'attends à l'ombre d'un arbre et allume une cigarette. J'aime son regard franc qui n'est pas fuyant et vous transperce en plein dans les yeux et toujours souriant.

Je profite de ma visite au musée au calme, il n'y a pas grand monde, le contraste avec la rue est saisissant, les horreurs de la guerre ont été un peu gommées, le musée présente une vision édulcorée de la période. Quelques statuettes attirent mon attention, de jolis costumes, un pirogue, et me voilà de retour sur la moto, mon chauffeur m'attends et me reprends en croupe. Les rues de Saigon sont à nous, il conduit bien et jamais nous heurtons quoi ou qui que soit : je n'en serais pas capable je pense , le trafic est impressionant.

Quand enfin il me dépose devant chez Jeanne, je pense : déjà fini !

Le temps n'avait plus d'importance, seul l'instant présent comptait, rouler, sentir le vent sur la peau, sentir cette présence toute proche, se laisser conduire et guidée dans l'incertain, l'inconnu, la vie, l'insouciance, la légèreté...

Enfin ma vie reprends son cours.

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