Le trompe-l'oeil de la passion (suite 3)

feline

Quand tout commence...

Il va s'en dire que Julia ne se fit pas prier pour lui répondre, il fallait qu'elle aille jusqu'au bout. Elle voulait savoir ce que tout cela cachait ! Pourquoi l'obsédait-il à ce point ? Tant d'émotions se chamboulaient en sa présence, elle devinait qu'il était celui qui allait bousculer sa vie.

Julia était éteinte depuis tant d'années, c'était une mère, une épouse mais la femme voulait reprendre sa place, elle réclamait qu'on s'intéressa à elle, qu'on lui prouve qu'elle existait...

Julia répondit à Thomas en lui indiquant qu'il était bien mauvaise langue, contrairement à ce qu'il croyait, elle avait pensé à eux car le temps était mauvais pour leur retour. En reponse, il lui précisa qu'il n'avait jamais été mauvaise langue...La boite de Pandore venait de s'ouvrir...

Il n'était pas du genre à tourner autour du pot alors il aborda le sujet fatidique de la discothèque.

Cette fois, la stratégie consistait à s'excuser, un méa culpa pour lui dire qu'il s'en voulait d'avoir agi de la sorte, qu'il n'avait pas voulu lui manquer de respect, à la limite de ne pas savoir ce qu'il lui était passé par la tête...

Julia souriait en lisant son message, effectivement il devait maintenant marcher sur des œufs et se racheter une conduite pour lui montrer qu'il n'était pas le goujat qui avait osé lui proposer de faire un petit tour aux toilettes. Le plus risible aurait été s'il avait prétendu que ce n'était que par pure galanterie afin de lui tenir la porte ou son côté héros, lui assurant qu'elle ne se ferait pas agresser.

Elle décida de la jouer humble plutôt que de passer pour la femme outrée par de tels actes, elle aurait trompé personne et surtout pas lui. Ce n'était plus une enfant, certes ils avaient dix ans d'écart mais elle était loin d'être tombée de la dernière pluie...

A son tour, Julia tenta de se justifier par rapport à leurs mails houleux... Elle lui expliqua que son agressivité et sa méfiance étaient dû au fait qu'elle savait qu'à l'époque il communiquait également avec Clara. Elle l'imaginait sans peine lui tenant probablement les mêmes discours. Non pas qu'elle souhaitait une quelconque exclusivité mais au moins de la franchise. Elle était curieuse maintenant de connaître la vérité sur cette histoire et pourquoi il avait agi ainsi.

Elle savait qu'il ne lui dirait pas la vérité, qu'au mieux il s'arrangerait pour minimiser sa part de responsabilité. Effectivement, il insinua que Clara s'était méprise sur ses intentions. « Mais bien sur, à qui veux-tu faire croire ça ? »

Thomas avait le don de changer de conversation quand le sujet l’embarrassait et n'étant pas homme à se démonter facilement, il enchaîna en lui demandant si elle avait quelqu'un en ce moment. Quelle drôle de question ! Julia avait déjà du mal gérer son emploi du temps alors avoir « quelqu'un »... Ce n'était vraiment pas à l'ordre du jour...

Les mails défilaient à longueur de journée leur permettant de mieux se découvrir, mieux se défier. Elle aimait l’ambiguïté dont il abusait dans ses mails, elle faisait de même et le jeu continuait.

Julia redécouvrait l'ivresse des prémices d'une relation, la joie à l'arrivée d'un message, l'excitation mélangée à l'angoisse de pas recevoir une suite.

 Julia le testait, elle voulait savoir jusqu'où il était capable d'aller. Elle était du genre cash, la franchise ne lui avait jamais fait défaut. Certains diraient que c'était sa qualité, d'autre son défaut. Elle prenait un certain plaisir à lui rentrer dedans, à lui prouver qu'elle n'était pas un mouton, qu'avec elle, ce serait différent, il ne l'impressionnait pas outre mesure...

Thomas lui avouera par la suite qu'il recherchait ce genre de caractère. Il avait besoin de trouver un adversaire à sa hauteur, quelqu'un qui lui remettrait les pieds sur terre, qui résisterait à sa domination. Bien évidemment, ce combat était hautement excitant pour les deux.

 Julia aimait le lire jour après jour, elle souriait même quand il lui racontait des bobards, elle réagissait comme une mère face à son enfant qui lui ment, c'était si mignon et si touchant...

Rien n'était commun dans leurs échanges, il n'y avait pas une conversation mais deux en parallèle, l'une où chacun parlait de sa vie, son quotidien et l'autre bien plus frivole.

C'était la première fois que Julia parlait de sexe aussi librement avec un homme. Il la titillait, lui parlait de fantasme ou phantasme comme il dirait...

Il la testait continuellement, la poussait dans ses retranchements et elle se laissait faire, elle aimait que Thomas lui parle de sexe. Il s'y prenait si bien...

Il avait le don de parler aux femmes, il savait susciter leur envies... Avec lui, il ne devait pas y avoir de barrières et encore moins au niveau sexuel.

Au bout de tant d'années de vie commune, elle avait fait comme la plupart des femmes, elle avait mis le sexe de côté. On entend souvent « le sexe ne fait pas tout dans une vie de couple » mais qui à oser dire ça ?

Le sexe ne devrait pas être tabou, le sexe, c'est avant tout deux corps qui s'unissent, partagent des émotions, de l'amour. C'est un échange entre deux êtres qui se donnent du plaisir, qui fusionnent. Pourquoi est-ce qu'on oublie cela au fur et à mesure du temps ? Pourquoi est-ce que cela devient à la longue une sorte de corvée ou un devoir ? Pourquoi est-ce que le couple ne parle jamais de sexe ou de leurs envies  ?

Au fil du temps, Julia pensait qu'elle était devenue frigide, elle n'avait plus envie de faire l'amour, plus aucune envie. Elle culpabilisait de cette situation, cherchait des réponses au niveau médical. Était-ce la suite logique lorsqu'une femme devient maman, oublie t'elle qu'elle est avant tout une femme avec des besoins ?

 Julia était confuse, perturbée... Elle était derrière son écran à lire des messages tantôt sensuels, tantôt crus. Elle était en transe, comment c'était possible qu'avec la distance qui les séparait, un homme puisse la mettre dans un état pareil. Chaque parole de Thomas la mettait sans dessus dessous, il savait comment lui parler, il devinait ses fantasmes. Elle même n'aurait osé avouer qu'elle attendait qu'on lui fasse ce qu'il lui décrivait.

Un jour, il lui fit s'imaginer un scénario, lui arrivant à son travail, se glissant sous son bureau, elle aurait préalablement mis une jupe. Il lui décrivit chaque détail, sa culotte qu'il lui ôterait délicatement et ferait glisser le long de ses cuisses. Il s'approcherait doucement de son sexe et doucement, tout doucement sa langue s'immiscerait à l'intérieur en formant de petits cercles, il jouerait délicatement avec son clitoris, il n'oublierait rien, aucun recoin. Il n'aurait qu'un but celui du lui procurer du plaisir jusqu’à ce qu'elle le supplie d'arrêter ou bien de continuer jusqu'à une jouissance extrême.

Ce jour fut une révélation pour Julia, elle n'était pas frigide, c'était un fait... Le problème ne venait pas d'elle.

L'été se profilait, Julia et Thomas s'écrivaient toujours autant, ils se demandaient comment ils feraient pendant les vacances ? Il faudrait faire une pause. A première vue, cela ne semblait pas compliqué...

 Cependant ils se parlaient depuis mois et forcément au fil du temps, des liens se créent. Lire ses mails était devenue une drogue mais Julia ne voulait rien lui laisser entrevoir. Elle ne voulait pas de grandes déclarations, elle aimait ce double dialogue, elle ne voulait rien gâcher... Ils parlaient de sexe, de fantasmes, elle savait pertinemment qu'un jour il faudrait concrétiser. Elle réalisait qu'elles pouvaient être les conséquences sur sa vie, parler est une chose mais cela restait virtuel, il n'y avait rien de répréhensible en soi mais se voir, impliquerait de franchir un cap.

Julia était pragmatique, cet échange de mails en cachette depuis des mois était déjà en soi un mensonge. Selon elle, l'infidélité n'était pas qu'une question de physique. Elle en était consciente, elle n'avait rien fait pour arrêter le jeu, elle était responsable...

Même si elle admettait que son mariage était voué à l'échec avec ou sans Thomas, elle risquait de tout précipiter en allant plus loin. Mais ce n'était pas à l'ordre du jour...

De son côté, Thomas était plus ouvert, plus réceptif. Il n'était pas du style à réprimer ses désirs, ses sentiments. A la différence de Julia, il ne cherchait pas à garder une distance. C'était dans son caractère, il voulait tout et tout de suite et toujours plus... La meilleure façon de le décrire serait de se reporter à la définition de son signe astrologique: le Gémeau...

  La dualité de la personnalité des Gémeaux fait qu'il est difficile de les comprendre. Ils apparaissent parfois enflammés, inconstants, capricieux et susceptibles. Ces traits de caractères font qu'il est difficile pour les Gémeaux de finir ce qu’ils commencent.  Le Gémeau recherche toujours l'endroit ou les gens qui pourront les aider dans leur quête du savoir. Brillant, plein d'esprit et sociable, le charme des Gémeaux garantit qu'ils seront le centre d'attention dans n'importe quelle foule. » 

Une pause s'imposait. La question de se voir à la rentrée avait été évoqué, Thomas devait emménager dans son nouvel appartement. Ils consentirent que l'absence de contact imposée par les vacances estivales allaient être une bonne occasion pour faire le point sur la situation...

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