Le verre à moitié plein

sylvie_tellor

Les retrouvailles... (extrait 3 - chapitre 2 - Paris 17eme)

Mercredi. Quand j'entre dans le bistrot, la serveuse semble reconnaître en moi la fille éplorée du week-end dernier ; elle m'indique d'un signe de tête le beau brun plongé dans l'examen de son téléphone portable à l'autre bout de la pièce.

Cette fois, c'est lui qui est arrivé en premier. Je frissonne. Encore sonnée par la décision capitale prise hier avec Thomas, je ne me suis pas projetée dans ce qui pourrait se passer maintenant. A mesure que j'avance vers Marc, je peine à cacher mon trouble. Mon corps manifeste sa difficulté à absorber aussi vite que mon cerveau les aléas émotionnels de ces derniers jours. Il lève les yeux.

- Reste assis. Bonjour. Tu vas bien ?

- Très bien. Et toi, tu vas mieux ?

- Oui je te remercie, je refais surface.

Marc a l'air stressé (et moi, donc). Il bredouille quelque chose, hésite, puis finit par me demander ce que je bois. Où donc est passée sa belle assurance ?

- Comme toi, un café.

Avant même que Marc n'en formule la demande, le café coule dans le percolateur ; à n'en pas douter, la serveuse nous épiait. En semaine, qui plus est à cette heure-ci, elle n'a que nous à surveiller. Cela dit, à un autre horaire, je suis persuadée qu'elle aurait été tout autant intriguée par ce qui se trame entre nous. L'observation est la clé de voûte de son métier. Je ne vais pas l'en blâmer, si j'étais à sa place je ferais exactement pareil. Après mon effondrement de l'autre jour, j'observerais la scène en essayant de deviner ce que nous sommes l'un pour l'autre.

Pour sauver Marc de l'embarras dans lequel il semble empêtré, j'essaie de lancer la conversation :

- Alors, c'était bien chez tes parents ? Tu as pu voir toute ta famille ?

- Oui oui…

C'est bien la première fois que je le vois aussi peu bavard.

- Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Tu es bizarre.

- Rien. Je ne sais pas. Tu étais tellement mal l'autre jour, je ne veux rien dire qui te froisserait.

Je me raidis.

- Jusqu'ici ça va, je t'assure. Tu me fais peur. Pourquoi as-tu peur de me froisser ? Tu as des choses contrariantes à me confier ?

- Tout dépend de ce que tu entends par contrariantes.

Je ferme les yeux, prête à entendre ce pourquoi il tenait tant à me voir. Pourvu qu'il ne se soit pas senti le besoin de me convoquer pour me dire qu'il va se marier, qu'il va avoir un enfant, ou (pire) qu'il est atteint d'une maladie dégénérative incurable.

- Juliette ?

- Oui, je t'écoute – dis-je, en rouvrant les yeux.

- Comme tu le sais, notre brève aventure a quelque peu précipité mon départ au Costa Rica.

Inutile de retourner le couteau dans la plaie.

- Une fois là-bas, je n'ai pas regretté mon départ. Ça m'a fait un bien fou de m'éloigner de la France et de vivre une expérience différente de tout ce que j'avais connu avant. J'adore ce pays, je m'y sens presque chez moi.

- Tant mieux.

Et donc ? Il va m'annoncer qu'il reste vivre là-bas. Pourquoi prend-t-il tant de pincettes ? Ce n'est pas la peine d'en faire tout un plat.

- Au début, c'était impossible d'oublier ce que nous avions partagé ensemble. Je pensais sans cesse à toi. Chaque jour, je me retenais de t'envoyer un mail ou de t'appeler. J'ai réussi à ne pas le faire en me jetant tête baissée dans ma mission d'éco-volontariat et en surfant dès que j'en avais l'occasion…

- Et finalement, tu es parvenu à m'oublier. J'imagine que c'est une bonne chose – le coupé-je, stoïque.

- J'ai essayé comme j'ai pu. Il y a quelques mois j'ai entamé une relation avec une allemande qui travaille avec moi, mais j'ai rompu assez vite. Cela ne marchait pas, je ne voulais pas m'engager.

Toujours le même problème à ce que je constate. J'avais décelé cette faille chez Marc au moment de notre rencontre. Cette phobie de l'engagement apparaissait d'ailleurs comme l'un de nos nombreux points communs. Lui n'avait pas pu s'engager dans une vie commune avec son ex-copine. Moi, je m'y étais (difficilement) résolu avec Thomas mais avais du mal à passer à l'étape supérieure, celle de l'engagement total que représente un enfant. S'il est venu s'épancher sur ses problèmes sentimentaux, la conversation va tourner court. Je n'ai aucune envie d'évoquer de près ou de loin ses déboires affectifs.

- Je n'y arrive pas, Juliette.

- A quoi ?

- A t'oublier. Si je suis revenu, c'est avant tout pour te voir et avoir une certitude.

Quelle certitude ? Celle qu'il n'y a définitivement plus rien à attendre de moi ou bien celle que moi aussi, j'éprouve peut-être la même chose que lui ?

La serveuse a dû s'approcher à pas de velours sans que je ne m'en aperçoive. La voilà plantée à seulement deux mètres de nous. Cela devient gênant. Je lui jette un regard entendu. Quand elle a reculé de trois pas, je demande à Marc de préciser ce qu'il entend par certitude.

- J'ai besoin d'être sûr qu'il ne pourra vraiment plus rien y avoir entre nous. Parce que Juliette, je ne vais pas te faire un dessin, ce que je ressens pour toi n'a pas changé – me confie-t-il, en soutenant mon regard.

  • Merci d' avoir pris le temps de me lire :) et d' avoir noté je ne suis pas écrivain juste j' écris mes pensées , mes ressentis , par contre vous c'est autre chose tout comme un Ami à moi Edgar Alan Popol ( pseudo) qu a déja été édté aussi

    · Il y a plus de 4 ans ·
    Mcgoohanallnightlongcrop1

    prisonnier

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