L'écrivain

Nil Draloscona

On écrit parce qu'il n'y a rien à dire. Du néant, nous vient une folle envie de remplir. Une vaine démesure. Pourtant on ...

  On écrit parce qu'il n'y a rien à dire. Du néant, nous vient une folle envie de remplir. Une vaine démesure. Pourtant on raconte, c'est rassurant. Tel les prémisses du langage chez le nouveau-né, l'écrivain s'exprime. Percuté par le réel, il lance un appel. Peut-être qu'au travers du chaos quelqu'un d'autre entendra son cri. Un bien faible cri, quelques traits organisés en symbole artificiel, quelque part. Inscrit sur un support sensible, à peine tangible. Un cri, comme un appel à l'aide à travers l'espace et le temps. "Y'a-t-il un lecteur ?" Ou faut-il endosser les deux rôles, coincé dans un jeux de binôme au même visage. Un cri dans un champs, le même cri dans une forêt, un écho dans la vallée, un murmure dans la montagne, rien dans l'espace, rien dans l'univers. Qu'en est-il sous l'eau ? Pourtant une force fait gratter l'écrivain dans la matière. Remuer avec un outil dans la chose. Si la mémoire est une illusion percistante, alors, l'eau qui permet à l'écrivain d'agir, se souviendra de l'état qui la poussé à s'exprimer et le message devient intemporel, éternel. Gravé dans l'être comme dans la pierre. Là l'écrivain est grand, son cri, perceptible. Durant un moment, entre l'instant et l'éternité, l'écrivain est lu; Sans le savoir, comme toujours. Peu à peu ou brusquement son message autrefois pure, s'efface. En réalité il demeure mais nul ne peut le remarquer à présent. Toujours là, on ne peut le discerner, la matière se l'est appropriée le laissant incompréhensible. Dans l'infini, les choses éphémères sont éternelles. L'écrivain unique, rongé par la présence de ce symbole invisible, sentira une force étrange l'animer. Tel un pantin, il tracera ce symbole à nouveau, pour la première fois.

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