L'élu du coin

Jean Claude Blanc

hommage à nos élus ruraux, souvent bénévoles, mais tellement indispensables; un pays à te dire, un pays à aimer

     L'élu du coin

 

L'élu du coin, faut pas chercher

On l'a bien vite repéré

Rien qu'à son pif, son air benêt

Boire des canons, ça le connait

 

Même conseiller municipal

Mène plus loin, en général

Mais pas question de capitale

N'a pas l'allure, ni le mental

 

Cons citoyens, lui serrent la pogne

C'est un notable, un peu ivrogne

Quand faut causer dans le micro

N'en mène pas large, trouve pas ses mots

 

Comme ses compères, clan des rougeauds

Suce pas de la glace, mais du pernod

Pour être élu, considéré

Faut faire un trait sur la santé

 

Mon copain maire, dans le Velay

Toujours voté, sans concurrence

La gourmandise est un péché

S'enfile liqueurs, en abondance

 

« Se fait porter », chaque élection

Candidater, la traduction

Personne, l'égale pour la chopine

Va s'arrêter, c'est une ruine

 

« Etre défenseur des libertés »

C'est un costard, trop grand pour lui

Ce qu'on demande, c'est pas sorcier

Tout goudronner, sans un centime

Manque de pouvoir, on est refaits

 

Pourtant, s'est fait des relations

A ses porteurs de commissions

Connait ministres et grands patrons

En fait, conviés aux gueuletons

Mais c'est utile, pour le piston

 

On vient le voir à la veillée

Discrètement, vante ses prouesses

C'est un coup de main, qu'on vient quêter

De ses discours, s'en tape les fesses

En est de même, des tigresses

Rentrent leurs griffes, pour les caresses

Pardonnez-moi, si je digresse

Sa politique des grands travaux

C'est de curer les caniveaux

Faire des coupes sombres, dans le budget

N'est pas content, l'administré

 

On est bien loin des ministères

Les délégués, sont là pour plaire

Car dans le royaume, y'a pas de mystère

T'es de la haute, ou prolétaire

 

Pas bien gâtés par la loterie

Y'a plus personne dans le pays

Même les édiles, pleins de vertus

Ils n'y croient plus au petit Jésus

 

Mais qui va donc, leur succéder

Maitre dans l'art de déconner

Le philosophe, risque un couplet

« Indispensables, sont enterrés »

 

Bat la campagne, mais pour la forme

Est accueilli comme grand homme

Pensez, médailles, légions d'honneurs

C'est bien le signe, qu'a de la valeur

Lui, sans manière, se met à table

Nous en raconte des pendables

 

Politicien, c'est pas son truc

N'est pas sorti de son village

Députation, et avantages

C'est pas pour lui, lustres des trouducs

 

Dans ce hameau, près du Gerbier

Y'a que des joncs et des genêts

Pour être admis, faut jouer au con

Trinquer pour bonne réputation

 

Si par malheur, ta grand-mère

Considérée, cuisse légère

Tu te présentes, tu fais la une

T'es même sûr, rester dans l'urne

 

Ça tient à rien, parcelle de gloire

Faut être bien né, pas faire d'histoires

Se la boucler, jouer l'abruti

Boire la coupe, jusqu'à la lie

 

Se faire élire, jamais gagné

Surtout si t'es un peu bronzé

En pénitence, t'es reluqué

Regards en coin, pour te narguer

En « Haute Bigue », pas de soucis

Ici on tourne, au « Kiravi

Gros rouge qui tâche, laisse pas de trace

De s'estourbir, ça nous délasse

 

Les jeunes conscrits, toujours transmettent

Us et coutumes de leurs ainés

Chantent le mai, pour faire la fête

Car être élu, veut dire givré

 

Sont invités, autorités

Monsieur le curé, maire aviné

Ils sont des nôtres, même nos hôtes

Car lèvent leur verre, comme les autres

 

J'y monte souvent en pèlerinage

Pas pour la Vierge, c'est qu'une image

Les vieux volcans, encore s'agitent

A moins que je tienne, une de ces cuites…

 

Finalement, c'est plus marrant

Le théâtre off, coûte pas cher

De nos manies, spectacle vivant

Y'en a qu'en font des séminaires

 

Travesti Maire, marchand de pain

Comme par miracle, lève son levain

A des journées de 24 heures

Vendre ses baguettes, bureau des pleurs

 

Trouve le moyen, de festoyer

Faire les bistrots, pour s'engueuler

Pour un chemin mal empierré

Pas rancunier, paie sa tournée

 

6 ans, c'est long, ou pas assez

Pour satisfaire ses citoyens

A peine élu, c'est le chantier

Faut boire un coup ou se tirer

 

On est tenté de continuer

Pour sa belle œuvre accomplie

Voudrait encore la peaufiner

De son passage, on paie le prix

 

Amis de France et de Navarre

Ceux du Velay, du Vivarais

Tous gaulois, au rouge blase

On tourne plus à la cervoise

Des traditions, on est bavards

JC Blanc               janvier 2014 (pour mes Amis des Puys perdus)

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