L'enquête de trop
[Nero] Black Word
Il courait sans s'arrêter.
Passant entre les arbres, s'aidant de la faible assistance de la lune, il fuyait.
Pourquoi ? Il ne savait pas.
Pourquoi était-il là ? Que fuyait-il ? Son instinct lui hurlait de continuer.
Cela faisait depuis la nuit tombée qu'il courait sans s'arrêter. Ça, il en était persuadé.
Alors que ses pas s'enchaînaient à un rythme effréné, il chercha à se rappeler. Deux semaines auparavant, il était dans son bureau de détective privé à regarder s'égrainer les heures de la journée, relisant un livre d'horreur qu'il avait dévoré quand il était adolescent. En parcourant vaguement les mots, il eut un petit rire en ce demandant comment il avait pu s'effrayer seul avec une telle histoire.
Sans doute son imagination avait trop fonctionné en découvrant cet univers avec ses monstres indescriptibles à en faire perdre la raison.
Ce fut quand la faim étreignit ses entrailles qu'il se rappela le vide occupé dans ses placards. Dans un soupir, il se leva et fit le tour de la pièce, regardant son installation. Il s'arrêta face à des casiers renfermant ses notes papiers sur ses précédentes affaires, des contrats passés avec des entreprises et des particuliers où il du enquêter sur des enlèvements, des abus, des concurrents, de simples suspicions et tant d'autres. En tant que détective généraliste, il avait connu la diversité.
Et pourtant, malgré cette richesse de travail, il se retrouvait sur la paille.
Peu de demande au cours du temps, condamnant progressivement son compte en banque, l'amenant finalement à faire face à l'échéance de son logement. En silence, il repensa à la proposition d'un ami de travailler pour lui dans la déchetterie à la sortie de la ville.
Sentant qu'il commençait à se résigner, il fut tiré de ses pensées par le son strident du téléphone. Traînant les pieds jusqu'à son bureau, il se dit à lui-même que si c'était encore un mari jaloux, il changerait de métier.
Une étrange voix lui demanda de retrouver une jeune femme appelée Salomé qui aurait été enlevée durant un voyage au milieu de la campagne. Le reste des indications lui furent donnés et, le lendemain, il reçut son contrat.
800 000 dollars pour résoudre cette affaire, sans aucun renseignement sur son client. Cela ne lui plaisait pas mais il se voyait mal faire la fine bouche dans sa situation.
Il commença donc sa recherche là où cette jeune femme avait été vue pour la dernière fois. Un village encerclé de ferme et d'une usine de pierre, bordant une sinistre forêt. En observant ce tableau, il se réconforta en se disant que le lieu était, au moins, accessible avec sa vieille auto.
Passant dans des bistrots, des papeteries, des petits restos, il interpella les habitants en leur montrant une photo de la disparue ce qu'ils pouvaient dire sur elle. Malheureusement, quand il ne se prenait pas des vestes, rien ne l'aidait dans les réponses qu'il recevaient.
Ce fut durant un après-midi, quand il se posa sur le capot de sa voiture avec une bouteille de whisky, que la chance lui sourit.
Un homme au regard fatigué et ridé, au sourire édenté et vêtu de vêtements abîmés, vint le rejoindre d'un pas titubant, lui demandant s'il pouvait avoir une gorgée de sa bouteille. Il accepta en lui demandant s'il était du coin, recevant une réponse affirmative de la part de son interlocuteur une fois qu'il eût vidé un tiers de la boisson alcoolisé.
Le voyant ravi mais vacillant, déjà prêt à se laisser tomber au sol, le détective lui montra la photo, lui demandant s'il avait vu cette personne.
Ses yeux dessaoulèrent presque immédiatement, chutant aussi vite que sa jovialité. D'un geste hésitant, l'inconnu pointa la forêt d'une main tremblante avant d'attaquer le reste de la bouteille en repartant d'un pas traînant.
Il le regarda s'en aller dans une direction hasardeuse sans trop comprendre.
Après s'être garé près de la forêt, ne trouvant aucun passage praticable, il enfila ses bottes, s'arma en cas d'éventualité et se mit à marcher entre les arbres sans trop savoir quoi chercher.
Quand la nuit approcha, et quand lui se rapprocha du centre de la forêt, il envisagea de faire appel aux autorités pour savoir si une battue avait déjà été menée.
Sa marche s'interrompit quand il remarqua quelque chose d'étrange au loin. Il se rapprocha le plus discrètement possible, à l'affût du moindre son, du moindre signe. Se cachant derrière un tronc, il posa son regard sur ce qu'il n'avait qu'entrevu de loin et découvrit…
Sautant par-dessus une souche, son cœur ne fit qu'un tour. Il se rappela.
Ce qu'il avait vu. Ce qu'il fuyait.
Le souffle court, il se laissa tomber dans une clairière, s'adossant à un arbre approchant de la mort.
Était-ce l'aube ? Était-ce le crépuscule ? Et dans quelle direction fuyait-il ?
Un craquement le réveilla et il sortit son arme, la pointant sous son regard qui balayait l'horizon qui l'entourait. Mais il la baissa avec effarement et résignation quand il vit d'étranges animaux l'approcher, le faisant douter de la perception qu'il avait de la réalité.
Et il la vit elle, la femme disparut, lui faisant face avec un visage neutre. En plongeant son regard dans le sien, il commença à se rappeler de ce qu'il avait vu tout en luttant pour continuer à oublier. Le besoin de comprendre ce qui lui arrivait s'opposa à la peur de réaliser ce qui se passait.
Tenant son arme, il pointa le canon sous son menton… et tira.
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Les peurs les plus terribles ne se nomment pas. des peurs sans objet. :o))
· Il y a presque 5 ans ·Hervé Lénervé
Les plus grandes peurs viennent de l'imaginaire.
· Il y a presque 5 ans ·[Nero] Black Word
ça donne envie de lire la suite...
· Il y a presque 5 ans ·Louve
Malheureusement, je n'ai pas prévu de suite.
· Il y a presque 5 ans ·[Nero] Black Word