Les deux frères 2
Al Prubray
Il se tourne vers son radio réveil : les chiffres rouges indiquent 3 heures. Il soupire et tente de ressaisir le rêve qu'il vient de faire et qui s'effiloche déjà. Il n'en perçoit plus que le regard bleu du vieillard et des bribes de phrases,...Puis tout s'évanouit en quelques secondes. Il pose ses pieds sur le parquet et sort de la chambre. Dans la cuisine, l'interrupteur déclenche le bourdonnement sourd du néon. Il réchauffe son café au micro ondes accroché au mur, et le boit presque brûlant. L'amertume finit de le réveiller. Dix minutes plus tard, il traverse l'allée et s'engouffre dans la voiture de police qui l'attend et démarre en trombe.
« Alors, en forme? » demande Bertrand, le sourire aux lèvres.
Antoine l'examine . Blond autant qu'il est brun, plus grand que lui, Bertrand affiche encore toute la prestance du jeune homme fringant qu'il a été. Mais un teint pâli et des rides plus marquées qu'à l'habitude l'intriguent.
« T'étais où avant la ronde ? demande- t-il.
- Ça va, rétorque Bertrand. Tu vas pas commencer tes leçons de morale, on a passé l'âge, grand frère. » Et il saisit dans sa poche de chemise une drôle de cigarette roulée qui répand rapidement son odeur âcre caractéristique.
« T'as bouclé un vendeur d'herbe, récemment ? questionne Antoine.
- Tout juste, frérot ! Faut bien trouver des compensations dans ce métier, tu n'crois pas? On est déjà bien mal récompensé pour ce boulot ingrat , alors il faut bien se ménager de petits avantages ! »
Le mois dernier, un collègue embarrassé était venu voir Antoine, pour régler une question de "petits avantages" qu'extorque régulièrement son frère aux dealers de la ville. Les caïds de la ville commençaient à s'agacer sérieusement de ces désordres et la police avait besoin d'eux pour abreuver la une des médias de "saisies record" et faire du chiffre pour répondre aux injonctions de la hiérarchie . A 40 ans, son cadet se comportait encore comme le sale gamin qu'il avait été dans les cours d'école de la banlieue lyonnaise.
« Ecoute, ....commence-t-il.
- Regarde! » le coupe Bertrand .
Dans le faisceau de leurs phares, apparaît ce qu'ils prennent d'abord pour une bagarre. Cinq hommes en cercle tiennent quelqu'un qui se débat et crie. Les deux flics s'éjectent de la voiture mais la bande d'individus, comme averti par un sixième sens, déguerpit en un clin d'oeil. Seule reste à terre, une jeune femme brune, hébétée et gémissante, les vêtements en lambeaux. Antoine s'approche d'elle tandis que Bertrand s'engouffre dans les rues du voisinage.Il disparaît, réapparaît. Il s'éloigne de plus en plus, mû par une colère frénétique.
« Ça va pas se passer comme ça, rage-t-il, je vais leur montrer à ces salauds là! »
Antoine se penche sur la victime :
« Ça va ? » Elle grimace un sourire. Il lui sourit mais s'inquiète de son frère :
« Eh ! Bertrand !Où tu vas ? Attends moi! Eh ! Laisse tomber, ils ont dû filer! »finit-il par crier.
Mais Bertrand n'écoute plus. Ivre de colère, il est transporté par l'envie d'en découdre.
Soudain, au coin d'une rue, il est frappé par derrière. Son arme tombe au sol.Puis, trois types, armés de barre de fer, se jettent sur lui et le roue de coups.
«Au secours Aidez moi! »
Stoppé dans son élan pour aller secourir son frère, Antoine se retourne. A 30 mètres de lui, il voit la jeune femme traînée par deux hommes vers une berline à la porte arrière ouverte.
L'atelier me propose cette version...
· Il y a environ 5 ans ·Al Prubray