Les écrivains

crywalker

Un poème drôle et dramatique qui parle d'écrivains que j'aurais voulu être.


Que j'aimerais être un écrivain brillant au style ampoulé.
Je passerais des coups de fils aimants toute la journée.
J'aurais un titre ronflant qui me tiendrait éveillé,
Au moins trois nuits par semaine, je demanderais à la lune,
D'écrire mes sonnets au sommet avec un Mont Blanc pour plume.

Ou un écrivain solitaire, pour écrire des vers moroses,
Qui aurait une belle estime de soie, enfin.
Il écrirait ses vers à l'endroit, à l'envers puis ferait une prose,
En attendant qu'un phare éclaire ses alexandrins.

Un écrivain alcoolique qui enflammerait ses lecteurs, 
Avec sa science friction et son art si chaud en primeur,
L'ivre écrirait ses salades sur des feuilles de chou,
Et brulerait l'essence de ses poèmes à devenir fou.

Un écrivain maudit qui ne dirait mot aussi, 
Mais aussitôt non dit, les écrirait plissés
Dans la solitude glaciale de son taudis
Les membres engourdis et l'enfer à repasser.

Un écrivain sans importance et tout serait en ordre
Comme un condamné sur sa potence, le cou luisant
Qui jouerait son dernier accord avant que la corde
Ne rompe le cou sous sa tête, de noeud coulissant.

Ou je finirai prisonnier d'une photocopieuse, 
Harcelé par des pages vierges et pieuses.
Je me copierai moi-même, me viderai de mon sens
Dans une hémorragie de signes, que rien ne panse.

Je ne suis pas écrivain, hélas !
Et pourtant j'écris si fort dans l'espace, 
Mais personne ne m'entend,
Personne ne m'entend.

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