Les Mémoires immobiles

Ferdinand Legendre

Une capsule entre les dents, je fais semblant de fumer,

Et lorsqu'au travers toi je peux me tenir droit et assumer,

Ces pleines lunes successives,

mimer ma chute sans ton cœur abîmer

c'est que tu peux lire en moi, même la peau grimée.


 Quelques vagues courbées sans bruit et sans élan,

Semblent nous rappeler ce qui ronge nos pairs,

Et l'éreintant concours de ceux qui veulent taire,

Les pages et les plages, les lignes entre les blancs.


Où glissent alors les flots de mots dans le ressac ?

Ceux qui vont s'oublier comme ce rocher massif,

Qui devient plus infime, au point dans les récifs,

De ne plus exister ?


Les écrits étranglés des maîtres de nos nuits,

Qui tiennent par la main nos yeux couverts de vin

Ces écrivains enfin qui n'ont eu d'écrits vains,

Ni ne connaissent l'ennui ?


Vois comme l'anonymat disparaît et révèle,

A nos regards humides, les attitudes immondes,

A ressort est pandore et toutes les toiles du monde,

Sans énergies nouvelles.


Des mémoires immobiles derrière d'absents visages,

Et devant nous les vagues et ta main dans la mienne,

Elles semblent nous souffler quand elles vont et viennent

Quelques heureux présages.

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