Les photos à disparaître
mallowontheflow
À King's Cross, comme chaque fin d'année, c'était l'effervescence. Les amis allaient se quitter pour deux mois, les familles se retrouveraient... Il y aurait dans quelques minutes des scènes de retrouvailles comme des scènes d'au-revoirs. Et dans un coin, un vieil homme tenait un gros paquet dans ses mains, emballé grossièrement. Il attendait son petit-fils sur le quai impatiemment : celui-ci allait enfin revenir de Poudlard, école où il venait de rentrer au début de l'année. Il allait passer les vacances chez son grand-père et tous deux en étaient ravis car ils avaient toujours été très proches l'un de l'autre ! Après plusieurs minutes d'attente qui lui avaient parues très longues, le train entra en gare, luisant comme toujours, il n'avait jamais cessé d'impressionner le vieux Cracmol. Le gamin ne tarda pas à descendre du train, les joues encore pleines de bonbons… Il repéra tout de suite son papi et s'élança vers lui, un grand sourire aux lèvres.
- Papi, Papi ! Regarde ! J'ai eu la carte de Harry Potter !
- Super ! Fais attention, si ta mère te voyait elle te gronderait…, répondit son grand-père sur le ton de la confidence.
- J'suis pas gros, j'en profite !
- T'as raison, t'as raison…, répondit-il en riant.
Les yeux du petit se posèrent alors sur le cadeau que le grand-père tenait, et ils s'illuminèrent aussitôt, reflétant la curiosité du jeune Poufsouffle.
- C'est pour moi Papi ?
- Hein ? Ah le paquet… J'allais oublier ! Bien sûr, c'est pour mon petit-fils préféré, qui d'autre pourrait bien le mériter ?
Les deux hommes complices allèrent s'installer sur un banc non loin et le plus jeune déballa son cadeau, avec la hargne d'un jeune enfant de onze ans pressé de voir ce que son grand-père lui avait réservé. Sous l'emballage aux motifs assez abstraits se trouvait une boîte et il en sortit un assez gros appareil photo magique, qui si on se fiait à son allure pouvait bien avoir quelques siècles de retard ! Mais le jeune élève de Poudlard n'en semblait pas moins éblouit.
- Merci Papi j'adore, il a l'air génial ! s'exclama le jeune garçon.
- Cet appareil est dans la famille depuis bien longtemps… Prends en soin Allan.
- Tu peux compter sur moi, affirma Allan, mais il n'écoutait déjà plus beaucoup ce que lui disait son grand père, excité de pouvoir l'utiliser.
- Tu ne dois prendre que les gens que tu aimes en photo Allan sinon elles seront fades, inintéressantes, pas vivantes, tu vois ? ajouta le grand-père. Et si tu remarques que la personne sur la photo n'est plus en couleur, cela signifie que la personne sur la photo est sur le point d'être tuée mais qu'il n'est pas encore trop tard… N'oublie jamais ça Allan.
Mais le petit garçon, trop emballé à l'idée de pouvoir prendre son grand père en photo, n'avait écouté que d'une oreille les paroles de son aïeul. Il appuya sur un des rares boutons de l'appareil et un flash se déclencha, suivit d'une fumée violette qui sortit de l'objectif, le grand-père souriait, Allan était comblé.
Le vent soufflait dans la brousse, faisant siffler les feuilles des arbres et taire les oiseaux. Et au milieu de cette campagne britannique s'élevait un grand et vieux manoir, inhabité depuis des années, mais qui tenait encore debout et n'avait aucune trace extérieure de délabrement.
Il faisait bien sombre à l'intérieur du manoir des Barbary ce soir-là, bien que la nuit ne fut pas encore tombée. À l'entrée, aucun bruit ne se faisait entendre, mais si l'on s'enfonçait un peu dans les ténèbres de ce château on pouvait percevoir des rires. Un rire féminin principalement, assez doux.
- Hihi. Allan, Allan ? Où es-tu ? Allez, arrête, ça ne m'amuse plus ! dit la voix, dont les paroles n'étaient pas crédibles car elle riait en même temps.
Alors que la jeune fille ne cessait rire, un flash envahit la pièce où elle se trouvait. Elle sursauta, surprise, puis se remit à glousser de plus belle, son rire résonnant dans le manoir presque vide. Un garçon s'approcha alors d'elle et se glissa derrière, la prenant tendrement par la taille, puis lui déposa un baiser sur le coin des lèvres. Il sortit le polaroid de l'appareil et l'agita devant la fille ;
- Je t'ai encore eue ! Je vais plonger la photo dans le chaudron, on va avoir un très joli album.
Le jeune homme brun se dirigea vers une cheminée où le feu crépitait follement, et plongea la dernière photo qu'il avait prise dans le liquide, qui se mit à produire des bulles assez bruyamment. Sur un fil étaient étendues une dizaine de photos en noir et blanc… Toutes avaient pour sujet la jeune fille, toujours souriante dans sa longue robe blanche. On la voyait chanter, danser, aller embrasser son photographe… Ces photos, à l'apparence pourtant très joyeuse, manquaient cruellement de couleurs. Allan accrocha la photo qu'il venait de réaliser sur le fil à la suite des autres, et ses yeux bleus ne purent s'empêcher de les parcourir en brillant : il était si amoureux de la jeune femme ! Il l'avait rencontrée à Poudlard lors de sa cinquième année. Il était à Poufsouffle, elle à Serdaigle et en quatrième année, mais ils ne s'étaient quasiment jamais quittés depuis leur rencontre ! Ils profitaient de leurs rendez-vous pour prendre des photos, ne se lassant jamais de leurs nombreux albums.
- Allan ? Tu es dans la lune encore !
- Pardon Becky, je pensais à toi…
Becky sourit et caressa la joue de son fiancé de ses longs doigts fins et ce dernier repoussa une mèche blonde qui cachait le visage de la jeune fille. Ils se regardèrent quelques instants silencieusement quand un bruit se fit entendre à l'étage, les sortant de leurs pensées. On entendait des sortes de pas, mais cela ne dura que quelques secondes. Anxieuse, Becky regardait en haut, ses yeux noirs avaient l'air affolés.
- Qu'est-ce que c'est ? s'inquiéta Becky.
- Sûrement trois fois rien ! Je vais aller voir, attends ici, ne t'inquiète surtout pas.
Allan embrassa Becky puis s'éloigna, la laissant seule dans la vaste salle, adossée à un fauteuil. Il emprûnta plusieurs escaliers avant d'arriver à l'étage, le manoir avait l'air d'être un véritable dédale ! Ses pas s'entendaient certainement dans presque tout le manoir. Une fois arrivé en haut, il pénétra dans un couloir sombre dont toutes les portes étaient closes. C'était le seul couloir où l'on pouvait accéder, les autres étant condamnés par des planches. Il aurait été facile de les détruire mais Allan doutait que le bruit puisse venir de là. Une à une il tenta d'ouvrir les portes du couloir mais il finit par conclure que sans clé il n'arriverait à rien. Après tout, c'était peut-être simplement son fléreur qui se baladait dans la maison. La voix de Becky l'interpella alors ;
- Allaaan ? Tu reviens ?
- J'arrive, je redescends, il n'y a rien !
Le jeune homme redescendit à l'étage du bas, à nouveau excité à l'idée de faire de nouvelles photos avec sa dulcinée. Ses pas résonnaient sur l'escalier en pierre, le dernier qu'il devait descendre. En approchant de la salle il se prépara à faire une nouvelle petite frayeur à Becky. Collé à un mur pour éviter qu'il ne la voit, il surgit tout à coup dans la salle en criant ;
- Bouh !
Il commença à rigoler de sa petite blague, lorsqu'il s'aperçut que seul son écho lui avait répondu. Becky n'était pas dans la pièce, elle avait du aller se cacher dans un autre coin, elle aussi prise de l'envie de continuer le jeu.
- Où te caches-tu encore ? Mon amour ? Ce jeu va se retourner contre toi ! Je vais finir par te trouver, t'attraper et…
Allan continuait de parler tout seul, ignorant la cachette de sa fiancé, il la cherchait dans les moindres recoins de la salle, persuadé qu'elle se trouvait quelque part cachée en train de rigoler. Dans la pièce, le feu qui crépitait follement quelques instants avant s'était éteint, ne laissant giser que des cendres au fond de la cheminée. L'homme s'arrêta alors de rire, ce petit jeu ne l'amusait plus et on pouvait même soupçonner un petit peu d'angoisse dans ses yeux. Il se dirigea d'abord vers la cheminée et tenta de rallumer un feu mais rien ne se passa malgré ses tentatives enchainées. Lassé, il finit par se contenter d'un simple mais efficace «Lumos» pour mieux discerner les différents éléments de la pièce. Il n'avait pas vraiment fait attention à l'aspect du manoir en arrivant, trop absorbé par ses photographies et surtout par son modèle. La grande bâtisse appartenait à la famille de Becky et c'était la première fois qu'il venait y traîner. Plus personne n'y vivait depuis des lustres, mais mis à part la poussière sur les meubles ça ne se voyait pas tellement. Il y avait un canapé rouge et deux fauteuils assortis au milieu de la pièce, en face de la cheminée. De nombreux tapis gisaient au sol, la décoration était simple mais en bon état. Allan s'arrêta alors sur un détail, stoppant son analyse du salon pour y guetter une quelconque trace de Becky. Il avança sa baguette pour mieux voir et se pencha. Un objet était tombé par terre. Son appareil photo magique. Et les photographies alors ? Où étaient t-elles ? En levant les yeux il remarqua que le fil qui les tenait avait disparu. Allan commençait à avoir peur. Ses yeux se reposèrent sur l'appareil qui se trouvait par terre, il déposa sa baguette à côté de lui et saisit sa machine de ses mains moites. Heureusement, l'appareil était toujours en bon état, au grand soulagement d'Allan qui y tenait presque autant que son propre cœur, surtout depuis la mort de son grand-père.
- Désolé Papi, je vais y faire plus attention, promis, chuchota Allan, brisant le silence qui régnait.
Le jeune homme reposa sa main sur sa baguette lorsqu'il sentit quelque chose l'effleurer, il jeta alors aussitôt un regard nerveux sur cette chose. Il s'agissait en fait d'une des photographies, la seule restante visiblement. Allan la saisit et la porta à hauteur de son visage. Ce dernier s'éclaira et Allan ne put s'empêcher de sourire en voyant Becky sur le polaroid. Celle-ci sourait, puis se mettait à tirer la langue, et souriait à nouveau... Allan caressa la photo de son index puis fronça les sourcils. Il venait de remarquer que la photo était sombre, fade et plus il la fixait plus il avait l'impression que les couleurs quittaient la photographie. La photo et l'appareil lui échappèrent alors des mains, l'une tombant en douceur tandis que l'autre atteint le sol dans un fracas, et le visage d'Allan devint livide.
"Tu ne dois prendre que les gens que tu aimes en photo Allan sinon elles seront fades, inintéressantes, pas vivantes, tu vois ? Et si tu remarque que la personne sur la photo n'est plus en couleur, cela signifie que la personne sur la photo est sur le point d'être tuée mais qu'il n'est pas encore trop tard… N'oublie pas ça Allan."
Les paroles de son grand-père résonnaient douloureusement dans sa tête.
Allan se releva d'un coup. Par où devait-il commencer ? Becky s'était faite enlevée, ça lui paraissait évident à présent, mais il n'avait aucune piste. Qui aurait pu vouloir du mal à sa petite amie ou même à lui ? Il n'avait jamais été du genre malveillant et détesté, ou même du genre populaire, avec des ennemis autant que des amis. Il s'était toujours senti apprécié et bien entouré. Du côté de Becky c'était pareil, du moins pour la période à Poudlard, car il devait bien reconnaître qu'elle restait assez mystérieuse et implicite lorsqu'elle parlait de sa famille. Les mains sur la bouche, il commença à faire les cents pas dans le salon, puis plutôt que de réfléchir il préféra agir en fouillant la maison. Il se doutait bien que cette méthode ne serait pas très efficace mais il ne trouvait pas mieux, avec le peu d'indices dont il disposait. Allan mit du temps à tout explorer, le manoir était très grand ! Dans sa quête, il retomba sur le couloir aux portes fermées. Quand il s'apprêta à faire demi-tour, sachant qu'il ne pourrait entrer dans aucunes de ces pièces, il vit alors que celle du fond était légèrement entrouverte. Méfiant, il s'avança vers le bout du couloir, lentement, comme s'il ne voulait pas faire de bruit. Une fois arrivé, il posa la paume de sa main à côté de la poignée et poussa la porte doucement. Cette dernière grinça jusqu'à ce qu'il cesse de la pousser. La lumière qui émanait de la salle éblouit Allan : c'était une des seules pièces du manoir contenant des fenêtres. Allan entra. Il remarqua aussitôt que la pièce était quasiment vide : il y avait seulement un lit et une grande armoire sombre. Il s'assit sur le lit, soupira … Il avait exploré tout le manoir, où pouvait-il bien chercher encore ? Il devait trouver un moyen de retrouver sa fiancée au plus vite. Devant lui une des fenêtres de la chambre était grande ouverte, le vent s'engouffrait dans la pièce, faisant frémir un épi sur le sommet de sa tête. Le soleil brillait, les nuages le dissimulait à peine … Ce temps lui rappela les nombreux après-midi passés avec Becky à courir dans les champs, à danser au milieu des fleurs, à s'embrasser entre les tournesols … Un oiseau gazouilla alors, sortant Allan de ses pensées. Le jeune homme entendit alors une sorte de sifflement aigu assez désagréable … Cela semblait venir de l'armoire. Allan se releva en poussant un soupir et ouvrit l'armoire. Une sorte de gyroscope s'y trouvait, il tournait à grande vitesse sans s'arrêter et il semblait que le sifflement vienne de cet objet. Allan reconnut l'objet tout de suite. Il le prit dans sa main et celui-ci s'arrêta de tourner en faisant du bruit. C'était le scrutoscope qu'il avait offert à Becky en lui faisant jurer de faire bien attention à elle, un jour où elle avait du partir en voyage sans lui. Si le scrutoscope se trouvait là c'est que Becky ne devait pas être bien loin, il avait enfin une petite piste, un petit indice. Il referma sa main sur le scrutoscope avant de le glisser dans une de ses poches et d'entrer dans l'armoire. En s'asseyant, il sentit quelque chose. Ca semblait fin et allongé. Il l'attrapa et essaya de discerner l'objet : il s'agissait d'une baguette, la baguette de Becky. La porte se referma alors quasiment toute seule et le garçon se retrouva dans le noir le plus complet. Presque aussitôt il ressentit une brusque sensation de changement. Il était sûr d'avoir changé de lieu, bien que tout autour de lui était resté identique. Il n'osait pas ouvrir l'armoire, il ressentait une sensation de bien-être, comme si rien ne pouvait lui arriver dans cette armoire. Allan entendit alors des pas, puis il semblait que quelque chose tombait dans la pièce où il se trouvait. Suivirent des pleurs et une voix masculine menaçante.
- Tu vas rester là le temps qu'elle arrive. Et je te préviens, si il débarque, on le tue.
D'autres voix se firent entendre, apparemment ils étaient plusieurs. Allan sentit un frisson le parcourir dans son armoire. L'homme avait dû parler à Becky, et il ne pouvait pas aller la voir, sinon il se ferait tuer. Il devait trouver une solution, vite. Il supplia d'abord l'armoire de le faire retourner dans l'ancienne pièce et l'objet sembla l'entendre. Le silence revint, Allan sortit de l'armoire et retourna s'assoir sur le lit, la tête dans ses mains.
- Alors, on a peur ?
Cette voix mesquine venait de sortir de la bouche d'une femme âgée d'une quarantaine d'années, ou un peu moins. Elle regardait sa « proie » avec mépris. Cette proie, c'était Becky. Depuis maintenant presque une heure elle était enfermée dans une pièce, surveillée, et sans baguette. Plusieurs hommes l'avait surveillée, mais à présent cette femme avait pris le relai, c'était la seule à lui adresser vraiment la parole depuis le début. En entrant elle était d'abord restée silencieuse, observant Becky d'un mauvais œil, puis elle avait commencé à parler. Elle restait debout, tournant autour de la jeune femme.
- Cela fait longtemps que nous ne nous sommes pas croisées… Tu dois bien te souvenir de moi non ?
Becky resta muette mais fit une sorte de sourire nerveux : évidemment, elle se souvenait d'elle, elle ne risquait pas de l'oublier. Elle avait dû voir cette femme il y a déjà plusieurs années pour la dernière fois, mais son visage resterait encrée toute sa vie dans sa mémoire, elle en était sûre.
- Tu as… gâché ma vie, reprit la femme sans se soucier des non-réponses de la jeune fille. Sans toi, j'aurais été beaucoup plus libre, plus populaire… C'est ce que j'étais avant toi. Tu n'imagines pas comment on me traitait à Poudlard, comment les autres élèves étaient avec moi dans cette école de… trolls.
- Ce n'était pas ma faute ! rétorqua Becky.
- Bien sûr que si, siffla la femme. Pas directement, certes, mais si tu n'avais jamais existé j'aurais eu une vie bien plus heureuse et riche.
- C'est toi qui m'a fait exister.
- Et alors ? Tu l'as regretté toi ? Tu as eu la belle vie non ? À te pavaner avec… Comment se nomme t-il déjà… Allan, c'est ça ?
- Comment tu… tu le connais ? s'étonna Becky.
- Moi ? Non. Mais d'autres, oui. J'ai de bonnes sources, crois-moi.
Becky fronça les sourcils. Que lui voulait-elle ? Que lui voulait sa mère ? Certainement pas du bien en tout cas. Visiblement, elle voulait se venger d'elle. Elle voulait se venger d'elle pour l'avoir eu alors qu'elle faisait encore ses études à Poudlard. Becky n'y était pour rien, mais sa mère était tellement bornée qu'elle savait qu'elle ne pourrait lui faire entendre raison. Tout ce qu'elle pouvait faire c'était attendre en espérant que son Allan vienne l'aider. Allan… Où était-il ? Que faisait-il ? Est-ce qu'il la cherchait au moins ? Oui, Becky en était persuadée. Il la cherchait, c'était obligé. Elle savait qu'il tenait trop à elle. Mais allait-il la trouver ? Elle avait fait exprès de laisser tomber son scrutoscope dans l'armoire alors que les hommes l'emmenait, mais elle doutait que cela suffise.
- Alors, dans la lune ? se moqua la femme. Je vais te laisser rêver un peu de lui, je reviendrai.
Sur ces mots, elle s'éloigna, laissant Becky sous la surveillance de plusieurs hommes. Ils avaient tous des baguettes et elle non, elle ne pouvait rien tenter. Elle ferma les yeux et se mit à penser à Allan, espérant qu'il allait pouvoir la sortir de là sans se faire tuer.
Allan était toujours assis sur le lit, le visage entre les mains. Ses pensées se bousculaient dans son esprit, sa tête était dans un désordre complet.
- Qu'est-ce que je dois faire ? Si j'y vais, je me ferai tuer. Mort, je ne serais d'aucune utilité à Becky, c'est ridicule d'y aller comme ça sans réfléchir… Il faut trouver autre chose…
Allan réfléchit encore plusieurs minutes, plus le temps passait plus il devenait anxieux, ses jambes se mettaient à trembler. Il ne pouvait pas la laisser là-bas, il ne pouvait pas rester sans rien faire. Il ne supporterait pas de la perdre, surtout en ayant rien fait pour tenter de la tirer de là.
- Je dois lui envoyer quelque chose.
C'était la seule solution que trouvait Allan. Il devait parvenir à envoyer un objet à Becky, un objet qui l'aiderait à se sortir de là où elle était sans lui attirer davantage d'ennuis. Il sortit la baguette de Becky, la tourna dans sa main… Cette baguette en bois de rose dont Becky ne s'était encore jamais séparé paraissait faible sans sa propriétaire. Allan se leva. Il refouilla tout le château, mettant les pièces sans dessus dessous pour tenter de trouver un objet qui pourrait aider sa bien-aimée. Mais ce n'était pas évident de trouver un objet dans ce manoir, si grand mais finalement si vide, mis à part quelques pièces. Il retourna donc dans la pièce où se trouvait l'armoire, désespéré de n'avoir rien trouvé. Son fléreur vint alors se frotter contre ses jambes, il s'était fait discret jusqu'ici, mis à part le moment où le bruit à l'étage venait peut-être de lui. Il lui sauta sur les genoux, réclamant un câlin.
- C'est pas le moment minou…
Le chat à la queue de lion miaula. Depuis tout petit, Allan l'emmenait partout où il allait. Enfin non, le chat le suivait partout en fait. Il lui avait souvent été utile d'ailleurs, particulièrement à Poudlard… Allan fit alors un lien entre la baguette qu'il tenait dans sa main et le fléreur qui se trouvait sur ses genoux. Et s'il mettait son fidèle animal dans l'armoire avec la baguette ? Son chat était très intelligent, comme tous les fléreurs d'ailleurs, il saurait donner la baguette à Becky. La grosse faille dans le plan était que les ennemis pourraient se douter de quelque chose en voyant un chat avec une baguette entre les dents, forcement. Mais il ne trouvait rien de mieux, c'était ça ou tenter d'y aller lui même, ce qui revenait à se suicider finalement, ou presque. Il ne lui restait qu'à espérer que le chat se débrouillerait, peut-être amadouera-t-il ceux qui gardaient Becky emprisonnée, après tout pourquoi pas ? Il était assez doué pour ça. Allan prit le fléreur dans ses bras et lui chuchota quelques mots, même si c'était certainement inutile … Il ouvrit la porte de l'armoire à disparaître, mit son chat dedans et lui tendit la baguette. Il caressa la douce fourrure du chat avant de fermer la porte de l'armoire. Il ne lui restait plus qu'à attendre. Il resta planté devant l'armoire, tremblant, et anxieux. Si dans une dizaine de minutes Becky n'était pas dans ses bras il irait lui même … Même s'il devait y perdre la vie.
Dans l'armoire, le chat était resté tranquille, il savait ce qu'il avait à faire, ou du moins il s'en doutait. Même ses yeux perçants ne voyaient rien d'autre que du noir dans cet armoire. Une fois qu'il eu l'intuition qu'il était arrivé dans la bonne pièce, il miaula, essayant de dissimuler au mieux la baguette. Des pas s'approchèrent de l'armoire au bout de quelques secondes sans qu'il ait eu à miauler à nouveau, et le chat aperçut le visage d'un homme.
- Tiens, y a un minou dans l'armoire. C'est qu'un chat, il ne devrait pas être trop dangereux, si ?
La créature sauta hors de l'armoire, c'était si facile d'être un chat ! L'homme n'avait pas essayé de l'en empêcher. Il s'avança. Becky était juste devant lui… Allait-il réussir la mission que Allan lui avait confié ?
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Allan ne tenait plus. Il s'était toujours dit que s'il devait perdre Becky un jour il ne s'en remettrait pas, mais il ne s'attendait pas à se sentir un jour aussi mal et impuissant. Elle devait croire qu'il l'avait laissé tomber, il ne se pardonnerait jamais de ne pas l'avoir sauvé si elle ne s'en sortait pas. Il faisait les cent pas dans la pièce, soupirant régulièrement. Il ne savait pas combien de temps s'était écoulé, il n'en avait aucune idée. Mais il savait qu'il ne tiendrait plus longtemps sans aller dans l'armoire voir lui même ce qu'il se passait… La pensée d'entrer dans l'armoire et d'aller voir dans l'autre pièce ce qui se passait ne voulait plus sortir de son esprit.
C'est d'ailleurs ce qu'il fit à peine une minute après. Il ouvrit la porte de l'armoire. L'intérieur paraissait froid et sombre, plus qu'avant à son goût, mais il y pénétra et s'assit au fond en ignorant ce qu'il ressentait, et sortit sa baguette de sa poche. Quelques secondes plus tard, il se dit qu'il devait être arrivé… Il poussa doucement la porte de l'armoire, se demandant ce qu'il allait apercevoir. La pièce serait-elle rempli de gens leur voulant du mal ? Ou n'y aurait-il que Becky ? La porte était complètement ouverte à présent, il pouvait regarder. Dans la salle, il n'y avait plus Becky, mais seulement un siège vide. Allan s'extirpa de l'armoire, un peu soulagé de ne pas tomber sur quelqu'un munit d'une baguette qui lui voudrait du mal, mais décontenancé de ne pas avoir retrouvé Becky. Il se dit que peut-être il avait eu tord finalement. Il aurait du aller dans l'armoire bien plus tôt, et aller la secourir, coûte que coûte. Il ne vit aucune trace non plus du fléreur. Pas de poils, rien. L'idée que tout ça ne fut qu'un cauchemar lui traversa l'esprit, mais il décida de ne pas tomber dans cette pensée, c'était trop dangereux s'il attendait de se réveiller… Des pas se firent alors entendre, ils ne ressemblaient pas à des pas féminins, ils semblaient plus lourds, plus… Menaçants. Le cœur d'Allan se mit à battre plus fort, mais il n'eut pas le temps de se cacher. La porte s'ouvrit d'un coup et Allan aperçut un homme dans son encadrement. Il leva sa baguette pour se défendre, mais c'était trop tard, l'homme fut plus rapide que lui ;
- Avada Kedavra !
Un éclair vert illumina la pièce. Allan eut à peine le temps de le voir qu'il sombra, après avoir eu une dernière pensée pour Becky.
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Dans le manoir, tout était calme, encore plus qu'avant. Plus personne ne s'y trouvait, mais l'armoire s'était réouverte toute seule. Dans le silence, un hululement se fit alors entendre… Un hibou sortit alors de l'armoire sombre, emportant avec lui quelques feuilles et brindilles qui venaient d'on ne sait où, et laissa tomber une lettre sur le sol. Cette lettre était destinée à Allan, mais il était déjà bien trop loin pour pouvoir la lire. Entre deux gazouillements d'oiseaux, le vent put s'engouffrer assez dans la pièce pour déplier la lettre, qui était en fait un simple bout de parchemin plié grossièrement. Si quelqu'un s'était trouvé dans la pièce à ce moment là, il aurait pu lire ces mots ;
Allan,
Je suis saine et sauve, ton fléreur était une excellente idée, quoiqu'on a quand même eu un peu de mal à s'en tirer ! J'ai pu sortir et transplaner, je suis chez tes parents, j'ai d'ailleurs une excellente nouvelle à t'annoncer. Rejoins-nous vite.
Je t'aime.