Les ponts

guillaum

Relations interpersonnelles présentées sous forme de ponts. Le texte est à la première personne simplement pour que le lecteur s'identifie. Entrez dans la pensé d'une personne inconsciemment seule.

Comment se rendre de l'autre côté si je ne peux utiliser ce pont ? Satané pont, je n'arrive pas à leur faire confiance. Ils ont l'air solides, tout va et viens puis tout d'un coup, sans avertissements, ils lâchent. Et lorsqu'ils lâchent, ce n'est pas qu'un peu. Ils lâchent tout. Des avenirs, des liens, des amours… Non, c'est définitivement trop dangereux. Pourtant ce pont à l'air solide… Mais pourquoi est-il là ? D'autres existent déjà, je les vois et ils ont tous l'air beaucoup plus solides que celui-ci. Pourtant encore hier j'en ai vu un qui semblait d'une solidité peu commune s'effondrer. C'était celui voisin au mien. Faut croire que ça n'était qu'une façade. Pourquoi ai-je si peur des ponts ? À quand remonte cette géphyrophobie ? J'en ai pourtant traversé des ponts, certains plus tremblants que d'autres. Plusieurs me sont encore accessibles, mais je ne les entretiens plus vraiment. Je garde un souvenir très clair de chacun de ces ponts, autant les plus solides que ceux qui n'ont duré qu'un temps et puis, il y a ce pont. À vrai dire, je ne sais s'il a seulement un jour vraiment existé. Ce pont était merveilleux, je m'y sentais libre et accueilli. L'air y était léger et la température parfaite. Le temps semblait s'arrêter sur ses planches. Un vrai paradis. Toutefois, ce paradis s'est, petit à petit, transformé en rêve, puis en un vague souvenir dont il ne me reste maintenant que des lambeaux vaporeux. Serait-ce la source du problème ? Ça n'a pourtant pas de sens. Pourquoi un vague souvenir aurait-il provoqué une si grande peur chez moi ? La réponse doit se cacher ailleurs. Pourtant rien d'autre ne me vient. Serais-je la source du problème et si oui, est-ce réellement un problème. Dois-je absolument traverser ces ponts ? Oui il le faut, sans quoi le temps devient long sur cette berge. Combattre pourrait être la solution. Non pas en me forçant à aller sur un pont, je ne suis pas fou, il pourrait tout de même lâcher. Non, je vais plutôt chercher des indices près des vieux ponts que je connais. La recherche ne me mène pourtant à rien. Aucun indice n'apparait. Tous semblent tout à fait normaux et en état normal pour des ponts que j'aurais laissés à l'abandon ou négligés pendant quelques années, puisque c'est bien ce que j'ai fait. Tout semble en ordre sauf une chose. Un espace vide entre deux autres ponts. Ceux-ci sont pourtant habituellement séparés d'égale distance. Or entre ces deux ponts, il y a assez d'espace pour en mettre un autre. Comme si un avait tout simplement disparu. Serait-ce ? Non impossible. Je vais voir et tout semble normal pourtant. Aucune fondation ne semble avoir déjà été sur les lieux, aucune trace d'ancrage pour le pont. Puis, un léger mouvement au coin de ma vision. Dans l'eau près de la berge, un petit objet semble pris et joue dans le courant. Au loin une simple tache rouge ondulante, comme un tissu se tortillant au gré du courant. Je m'approche. Ce n'est pas du tissu, mais qu'est-ce que c'est. Je me penche pour mieux voir et soudainement je me souviens. Ce foutu pont. Il a existé et s'il était paradis en apparence s'est avéré en réalité une vraie descente vers l'enfer. Ce foutu pont. Il n'avait n'y été construit, n'y détruit. Ce foutu pont. C'est la pire espèce de pont, il ne fait que disparaitre sans réels avertissements. Ce ne pouvait pourtant pas être la cause. Ce pont, je n'en ai jamais eu peur. Je l'ai d'abord aimé, intrigué, puis je l'ai haï et ai choisi de l'oublier. Petit à petit, j'ai déchiré son souvenir jusqu'à n'en garder que des rêves vaporeux. Mais maintenant le souvenir est revenu, tout entier à cause de cette foutue cochonnerie rouge. Pourquoi était-elle là ? Ça n'a aucune importance, j'ai mieux à faire ; redétruire ce souvenir qui donne un goût si amer en bouche. Tout allait bien je me promenais, le ciel bleu, l'air frais et léger. La journée était merveilleuse, comme à l'habitude. Puis soudain, une légère brise. Étrange, jamais il n'avait venté auparavant ici. Je m'en souciai peu et continuai ma traversée tout en contemplation. Toutefois le vent se leva de plus en plus et le ciel s'assombrit. Avant que je ne m'en rende compte, une vraie tempête éclate. Le pont ne lâche pas, il ne bouge même pas. Je me retrouve en panique. Que faire ? Continuer la traversée ou rebrousser chemin. Je me ressaisis en me disant que rien n'était à craindre, le pont semblait très solide. Je décidai de continuer, croyant avoir fait la majeure partie du chemin. Je me mis à courir, la pluie s'intensifiait, mais l'autre extrémité du pont ne semblait jamais vouloir s'approcher. Puis, tout à coup, plus rien. Le pont se déroba sous mes pieds et je me retrouvai dans l'eau tourmentée par la tempête. Complètement désorienté, je me cognai la tête sur je ne sais quoi et perdit conscience seulement pour me réveiller sur ma berge avec cette chose en main. Aussitôt sur pied, je la lançai au loin dans l'eau et je choisis de tout faire pour oublier cet endroit, en raison de quelconque sentiment de trahison, d'abandon, voir même de rejet qui me venait en y pensant. La tâche fut fastidieuse et de longue envergure, j'en cessai de retourner voir mes autres ponts, trop occupé par cette tâche ingrate, mais nécessaire qui m'avait été imposée par ce foutu pont. Il me fallait l'oublier parce que c'était une aberration dans ma vie où tout avait toujours été selon le dessin qui m'avait été décrit de ma vie. Maintenant tout était à refaire, puisque je me rappelle. Je ne sais pourquoi, mais la même impression me revient en y pensant, bien que l'évènement fût oublié puis soit remémoré des années plus tard, rien ni avait changé. Ce n'est toutefois n'y trahison, abandon ou rejet que je ressens en réalité maintenant que j'y pense. Est-ce que le mot existe pour ce ressentiment ? Plus j'y pense, moins je vois d'autres possibilités pour ma peur des ponts. Mais comment y pallier ? Jamais un autre pont ne m'avait fait ces ressentiments. Serait-ce la peur que l'histoire se répète. Tout de l'autre côté semble attirant pourtant, du bon temps semble m'y attendre. Je ne parviens pourtant pas à le faire, et je doute un jour pouvoir complètement oublier ce foutu pont maintenant. 

  • Les joies, les écueils de la vie. Belles métaphores !

    · Il y a plus de 5 ans ·
    Louve blanche

    Louve

    • Merci du commentaire :)

      · Il y a plus de 5 ans ·
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      guillaum

  • Il s'agit de mon premier essai depuis un bon bout de temps en écriture. Si une critique vous viens à l'esprit, n'hésitez pas à m'en faire part, je ne cherche qu'à m'améliorer.

    · Il y a plus de 5 ans ·
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    guillaum

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