Les porteurs d'eaux et les dunes mortes
peterpanpan
La vie s'éraille de mots qui se cherchent et qu'on trouve trop peu.
- Il faudrait vous créer ! Dit la vie. Mais les mots sont des frères jaloux. Ils veulent seuls être les porteurs d'eaux de nos déserts.
Mais comme la vie est adultère, elle accouche en secret des fils du plaisir. Ils naissent bâtards, mais connaissent mieux leur mère que les légitimes idoles du soleil.
La mère est mère, et tous ses fils lui sont donnés dans la douleur. Elle les aime.
De chacun d'eux elle adore la souffrance qu'ils lui ont donnés. Et son amour pour eux grandit à mesure que le souvenir de cette souffrance s'oublie : car elle sait que cette souffrance était le plus haut fond d'elle-même, et seuls ses fils lui en rappellent les pointes.
Les dignes porteurs d'eaux avancent dans la lumière, pour faire reconnaître l'honneur et la beauté de leur mère. Par eux, elle peut être compris. Mais en secret quand le froid des dunes empêche les beaux gestes de verseurs, elle regagne ses fils de l'ombre, qui la connaissent plus qu'elle. Ensemble, ils se comprennent, dans l'indicible parole de leur mystère.