Les seins

My Martin

Résister

Piémont pyrénéen. Soleil, jour d'été

Ma mère lit sur le canapé, mon père est dans le jardin. Soudain, les yeux fous, il s'encadre dans la porte-fenêtre, léger contrebas par rapport à la cuisine. Il gesticule

"Les seins ! Les seins !"

Les seins ? Nous le suivons dans le jardin, sur le côté de la maison. Intense bourdonnement. Il tend le bras vers le ciel

Un nuage, une boule, une sphère, tournoie. Un essaim d'abeilles

L'essaim est en quête d'un lieu où s'établir. Il poursuit son chemin aérien. Il s'éloigne vers la casse automobile

Mon père a un copain d'enfance apiculteur, il dissémine ses ruches, les déplace, au gré des saisons, en campagne, dans les Corbières. Mon père lui téléphone. 2 CV grise, il arrive. Il ne récupère pas l'essaim vagabond



Lotissement tranquille, maisons blanches cubiques. Le jardin. Mon père désigne le massif. Bande arrondie, buissons denses, à droite de la cuisine, contre la clôture grillagée qui nous sépare du voisin. Louis -entre nous, nous l'appelons Loulou, comme sa femme. Loulou aime faire brûler des vieux papiers, dans un baril troué, rouillé, sur la place fermée, à l'arrière des maisons. Volutes de fumée grise

Brindilles vertes. Nues, sans feuilles. Segments assemblés. Dessin abstrait. Elles bougent lentement. Un insecte, long corps fin, longues pattes fines. Fragile, si fin, comment vit-il ?

Je cherche à identifier l'insecte à la bibliothèque municipale. Phasme. Étrange insecte, étrange nom



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Royaume-Uni, Zoo de Chester. Près de Liverpool, dans le Cheshire

Le zoo gère plusieurs programmes de reproduction pour des espèces en danger -dont des insectes

Terrarium. Avec une pince, le soigneur présente une blatte à une guêpe. La guêpe pique la blatte, lui injecte son venin pour la paralyser. Elle entraîne sa proie dans un flacon de verre empli de gravier. Elle creuse, dépose la blatte zombie et pond un œuf dans le flanc de la prisonnière. Elle se retire, compacte le gravier pour protéger le nid. Au fil des jours, dans le corps de son garde-manger vivant, la larve se développe. Elle prend soin de ne pas dévorer les organes vitaux



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11/2018

Un chercheur américain étudie les interactions entre les blattes américaines et les guêpes émeraudes. Pour éviter de servir de repas aux larves des mantes, les blattes utilisent des techniques de combat



La blatte américaine (Periplaneta americana) risque de finir zombifiée par la guêpe émeraude (Ampulex compressa)

Avec ses mandibules, la guêpe saisit sa proie à l'arrière de la tête et à deux reprises, la pique

au niveau des ganglions thoraciques. Elle paralyse les pattes avant de la blatte

à la tête. Elle injecte son venin dans le cerveau

Zombifiée, la blatte continue à vivre, passive. La guêpe émeraude la traîne dans un trou, dépose un œuf et rebouche l'entrée

La larve de la guêpe dévore vivante la blatte



31 octobre 2018. Université privée américaine Vanderbilt, Nashville, Tennessee. Kenneth C. Catania, biologiste et neuroscientifique -né en 1965. Revue Brain, Behavior and Evolution -neurobiologie évolutive

Face à l'attaque de la guêpe, la blatte ne reste pas sans défense

Sur des vidéos à haute vitesse, le chercheur décèle des réactions de la blatte, invisibles à l'œil nu. La blatte élève son corps, met hors de portée son cou. Avec ses pattes arrière épineuses, elle donne des coups, frappe la guêpe à la tête. Puissants, les coups de pattes boutent l'assaillante hors du voisinage

Kenneth Catania cite Rick Grimes -série télévisée "The Walking Dead". L'Apocalypse a transformé la quasi-totalité de la population en zombis. Mené par l'officier Rick Grimes, un groupe d'hommes et de femmes tente de survivre



Capturée, la blatte résiste encore. A l'aide de ses pattes, elle pare le dard de la guêpe, cherche à la blesser avec les épines qui recouvrent ses pattes

Après la première piqûre, lorsque la guêpe va délivrer la seconde attaque, son abdomen est proche de la mandibule de la blatte. Elle mord la guêpe. Pour se protéger, la guêpe garde en hauteur les pattes qu'elles n'utilisent pas, à distance de la tête de sa proie



Si elle reste passive, les chances de survie de la blatte sont estimées à 14 %

Si elle se bat, 60 %

Pour ne pas finir zombi, une seule stratégie : se battre. Vigilance. Se protéger le cou. A plusieurs reprises, frapper l'agresseur à la tête



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Mante religieuse blanche avec des parties roses. Hiératique, la femelle se tient sur une branche. Présenter un nouveau mâle ou non ? La femelle est imprévisible

Elle attaque le mâle et le dévore

Ou elle le laisse approcher. Le mâle monte sur elle, s'accouple. Soudain elle se retourne et lui arrache la tête. Le corps sans tête reste accouplé



Avec circonspection, le soigneur introduit le mâle dans le terrarium, prêt à l'exfiltrer en cas d'attaque

Le mâle monte à l'assaut. Il s'approche de la femelle immobile, grimpe sur son dos, s'accouple. Le soigneur veille, le temps passe. Les soigneurs se concertent. Après un temps jugé décent, le soigneur enlève le mâle avec sa pince et le ramène à l'abri, dans son terrarium solitaire

Ponte. Éclosion. Une grappe de mantes miniatures



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07/2016. La femelle mante religieuse dévore le mâle

La consommation du mâle aide la femelle dans la production des œufs

Biological sciences. Revue Proceedings of the Royal Society B. Étude du comportement de la mante chinoise (Tenodera sinensis). Espèce originaire de Chine

Vers 1895, la mante chinoise (Tenodera sinensis) est introduite en Amérique du Nord -régulateur des ravageurs. Depuis lors, l'espèce se répand à travers la majorité du territoire de Nouvelle-Angleterre et les États du nord-est des États-Unis

Ses oothèques sont vendues en jardinerie. L'oothèque est la membrane rigide qui enveloppe la ponte de certains insectes ou arthropodes -la blatte ou la mante religieuse

L'oothèque contient 20 à 100 œufs. L'éclosion se produit après 2 à 8 semaines. Une fois éclos, les juvéniles se dispersent dans la nature. A la fin de l'été, les mantes sont adultes et se reproduisent d'août à septembre



Les chercheurs injectent des acides aminés radioactifs dans l'organisme de plusieurs mâles. Ils les séparent en deux groupes : après la reproduction, la moitié des mâles est préservée

L'autre moitié est laissée en compagnie des femelles

Les scientifiques comparent la radioactivité dans le corps des femelles



Lorsque le reproducteur est ingéré, un transfert de matière s'opère dans le corps de la femelle, les œufs, les tissus de certains organes -les ovaires. Davantage d'œufs sont fertilisés



En se faisant manger, le mâle perd la possibilité de participer à la production d'autres juvéniles avec d'autres femelles

La consommation du mâle n'est pas obligatoire, elle se produit entre 13 à 28 % des cas

Afin de multiplier les partenaires, le géniteur s'échappe après la copulation

Le choix du mâle est simple : il accepte de se sacrifier, seulement s'il a de faibles chances de se reproduire à nouveau. Lorsque les mâles sont plus nombreux que les femelles, la compétition est rude

Alors le mâle décide de s'investir au maximum. Il se laisse dévorer ; le sacrifice, stratégie gagnante pour le mâle



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Amours tumultueuses

Le mâle se fait arracher et dévorer la tête lors de l'accouplement. Dévoration du mâle, car Le nombre d'œufs pondus est lié à la disponibilité en protéines

Le sacrifice n'est pas indispensable. Si le mâle s'échappe, moins d'œufs



Lorsque le mâle a été décapité, ses organes génitaux continuent de fonctionner quelques instants. Ils dépendent de centres nerveux relativement autonomes ; sans cerveau, ils achèvent le travail



Revue Biology Letters. Mante "Springbok" Miomantis caffra (Nouvelle-Zélande). Dans 60 % des cas, l'accouplement commence par l'agression du mâle, envers la femelle

Avec ses éperons -griffes antérieures, il perce l'abdomen de la femelle, entraîne une perte d'hémolymphe (liquide, rôle de sang pour les invertébrés). Non mortelle, la blessure laisse une cicatrice noire sur le flanc de la femelle

Pendant qu'elle se remet de sa blessure, le mâle se sauve



La mante a la capacité de se reproduire seule, par parthénogénèse. Sans avoir été fécondés par un mâle, les œufs se développent et donnent naissance à des femelles

Parthénogenèse thélytoque -qui engendre de femelles ; elle survient, lorsque l'ovocyte parvient à se développer sans fécondation préalable. La descendance est uniquement composée de femelles, clones de leur mère



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01/2017. Les mantes orchidées Hymenopus coronatus

forêts tropicales d'Asie du Sud-Est -Malaisie, Indonésie

Dimorphisme chez les mantes orchidées Hymenopus coronatus et chez les mantes orchidées jaunes Helvia cardinalis. Les femelles sont plus grandes que les mâles

Le gigantisme facilite la prédation, alors qu'une petite taille permet aux mâles d'éviter les prédateurs



Les mantes orchidées ressemblent parfaitement à des orchidées

Muséums d'Histoire Naturelle de Cleveland (États-Unis, Ohio), d'Australie et d'Allemagne. Article publié dans Scientific Reports. Étude de l'évolution des insectes Hymenopodidae

Les femelles sont devenues plus grandes que les mâles pour favoriser leur capacité de prédation et contrairement à d'autres arthropodes, non la reproduction

Pour éviter les prédateurs, les mâles sont restés de petite taille

Chez d'autres espèces, les femelles sont plus grandes que les mâles -plus grand espace abdominal pour stocker les œufs

Le gigantisme des femelles renforce leur accès à une variété de proies, ainsi qu'à une source régulière de pollinisateurs

Plus imposantes, les mantes orchidées descendent des fleurs, sur lesquelles elles se confondent parfaitement et se suffisent à elles-mêmes. Par leur seul aspect, elles trompent leurs proies. Leur taille attire de gros pollinisateurs -des abeilles



Les mâles bougent souvent, notamment en période de reproduction

Afin de trouver une partenaire sexuelle, ils se déplacent de fleur en fleur

Grâce à leur mimétisme, ils évitent les prédateurs

Les mâles deviennent adultes avant les femelles -arrêt précoce de leur croissance



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03/2013. Malaisie, Indonésie

Après sept mues, la mante orchidée femelle atteint une longueur totale de 6 cm à l'âge adulte

La mante orchidée Hymenopus coronatus se transforme en une fleur séduisante. Elle possède deux pattes antérieures dites ravisseuses,destinées capturer ses proies -les insectes pollinisateurs



Pour survivre, de nombreux animaux se fondent dans le paysage, se dissimulent aux yeux des prédateurs -les papillons qui une fois repliés, ressemblent à des feuilles mortes. Mimétisme défensif

Certaines espèces se rendent invisibles ou inoffensives, pour mieux capturer leurs proies -les fleurs carnivores. Mimétisme agressif

Depuis plus d'un siècle, les scientifiques s'interrogent sur le mimétisme pratiqué par la mante Hymenopus coronatus -la mante orchidée

Ses quatre pattes locomotrices ont l'apparence de pétales blancs et roses. L'animal les agence, afin de ressembler à une orchidée, sur une feuille, sur une branche

La mante

se rend invisible des prédateurs -les lézards, les oiseaux

ou pour attirer des insectes pollinisateurs

ou pour les deux objectifs à la fois ?



Janvier 2011. Malaisie. Université Macquarie (Australie, Sydney). James O'Hanlon. Article dans la revue American Naturalist

James O'Hanlon érige trois piquets avec en haut, soit une mante orchidée, soit une vraie Asystasia. Pendant un temps donné, il relève vers quel piquet se dirigent de préférence les pollinisateurs

Le camouflage est utilisé pour chasser. La mante attire plus d'abeilles et de papillons que la fleur qu'elle imite

Dupés, les hyménoptères sont attirés par la mante. Au péril de leur vie, ils s'approchent, sans se rendre compte du danger

Ils viennent plus nombreux, de plus loin vers la mante, plutôt que vers la plante Asystasia intrusa

Proposée en premier lieu par le britannique Alfred Russel Wallace 1823-1913 -ami et rival de Darwin, la théorie "se camoufler pour chasser" s'avère exacte



Au moyen d'un spectromètre portable, James O'Hanlon compare les couleurs présentées par 14 mantes orchidées Hymenopus coronatus, aux couleurs de 13 espèces de plantes sympatriques -même région géographique, même ancêtre commun

Pour des longueurs d'onde visibles par les pollinisateurs hyménoptères volants -abeilles et papillons. Les plus à même de butiner les fleurs étudiées

Les couleurs de la mante ne sont pas différentiables de celles des plantes. Le mimétisme est redoutable



D'ordinaire, les insectes qui utilisent un mimétisme agressif se dissimulent sur une fleur et attendent le passage d'une proie. le végétal est l'agent d'attraction

Le mimétisme de la mante trompe-t-il les oiseaux et les lézards ?


  • La nature est bien faite, mais comme elle est cruelle !

    Cependant, je me souviens d'un après-midi d'été au bord de la mer. J'étais en famille, et d'un seul coup, nous avons tous, sur la plage, été envahis pas un essaim très important, de petites abeilles. Ces abeilles conduites par leur Reine - du moins je le suppose - cherchaient de quoi faire une nouvelle colonie. Elles étaient donc très nombreuses, mais aucune ne nous a touché ! Moi, je n'ai pas bougé, je les aime elles ne me font pas peur, je sais que si nous ne les embêtons pas, elles n'attaqueront pas. D'ailleurs elles ont continué leur vol un peu plus loin dans les rochers.
    Par contre mon petit fils a couru se mettre à l'abri dans l'eau, nous avons bien ri. Un joli moment ma foi !!

    · Il y a presque 3 ans ·
    Louve blanche

    Louve

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