L'espion qui m'aimait.

redisblacklove

« De la douceur que son corps dégageait jusqu'à la profondeur de son regard, je sentais l'amour en moi qui se propageait dans tous mes membres. »

J'avais maintenant l'habitude d'être à cet endroit précis, chaque lundis, toujours à la même heure.

9h22, pas une minute de plus ou deux de moins. 


Quand on rentre dans une routine, il en est presque impossible d'en sortir. Sauf que moi, je n'aurais voulu casser celle ci pour rien au monde.


Elle était toujours là elle aussi. C'est pour cette raison que je ne pouvais manquer à ce rendez-vous hebdomadaire fictif.


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"La plus belle des sensations était celle que je ressentais chaque lundis matins : ses yeux posés sur moi lorsque je m'avançait dans cette allée qui me paraissaient interminable sous le coup de la pression. Ce regard qui me rendait dingue au point que mon cœur s'accélérait à se décoller de mon corps."


Je me sentais terriblement stupide d'agir comme tel, que mon être se perde et que ma gêne le remplace en une fraction de seconde juste avec la subtile attention qu'elle me portait.

Bien évidement, ça ne se voyait pas, et j'en étais rassurée.

Je n'aurais pu imaginer de quelle manière dissimuler ma timidité et mon malaise si elle avait su l'effet qu'elle me procurait.


Certains serraient passés devant comme l'on passe à côté d'un siège vide dans le bus ou dans le train, mais on ne pouvait ne pas la remarquer, même avec toute la volonté négative du monde.

Malgré sa discrétion, il était impossible de ne pas entendre la musique qui tentait de s'évader de son casque audio, de ne pas apercevoir la froideur et la rigidité de son visage, d'ignorer sa beauté naturelle qui semblait prendre toute l'ampleur de cet espace à travers ses traits singuliers.


Ces mêmes petits détails qui m'avaient fait craquer dès la première fois où je les avaient vu.


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Nous nous connaissions plus ou moins à présent, j'avais franchit la barrière de l'Inconnue et tu étais entrée dans ma vie, cette fois ci pour de vrai.

Puis, quelque temps après, il y eu ce premier soir. Celui du commencement du printemps synonyme de changement.

Tu avais modifié les règles : plus rien de nos habitudes était pareil. C'était toi qui te livrait pour différencier des jours précédents où c'était moi qui le faisait, tu te mettais à nu. Les rôles étaient inversés.

Je pensais d'abord à un rêve, puis je songeais à une hallucination.

C'était tellement irréel que les choses soient différentes à ce point en aussi peu de temps et surtout aussi parfaitement faites.


J'avais toujours eu cette part de naïveté que je n'arrivais à distinguer de moi même.

Je pense même que ce soir là, elle était à son apogée.


J'étais littéralement en train de planer. Tout y était : la sensation, les émotions, les papillons dans le ventre, la gorge nouée qui m'empêchait de sortir un son de ma bouche, la légèreté et le plus important, tes bras autour de mon corps.

Je demeurais au summum de mon extase durant cette minute de rapprochement physique qui avant, n'était qu'un pur fantasme.

Mais comme après chaque lévitation de notre âme hors de notre corps, il y suit une redescente.

Cette même chute que je n'avais pas prévue aussi rapide et violente : je m'étais explosée contre le sol, la tête la première, après une chute libre dont les kilomètres qui me séparaient de la terre ferme étaient incalculables. 


Mes sentiments n'en avaient été que décuplés alors que ma boîte noire elle, souffrait de son absence aussi précipitée et inattendue.


Encore aujourd'hui, je suis dans l'ignorance et j'en souffre.


Peut être pour toujours, car je sais que tu ne pourras sortir de mes pensées.


Je t'ai aimé comme personne n'aurait pu le faire, je t'ai désiré et même imaginé de toutes les manières possibles.


Si j'avais su que de ressentir quelque chose pour toi pouvait être si intense, j'aurais fait en sorte de te rencontrer plus tôt, parce que c'est une sensation qui fait mal mais qui intérieurement comble une personne.


Tu n'es pas celle que tu penses être, tu es bien meilleure que ça. Mais même cela, tu l'as fuis.


Je ne serrais jamais en colère contre toi, mais triste.
Triste parce que tu as refusé l'amour.
Peinée parce que je sais à quel point j'aurais pu te faire planer, comme j'ai plané avec toi.

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Parce que j'espère peut être secrètement que je suis maintenant dans un monde parallèle : que je vais à nouveau sortir de ce bus et que tu serras à nouveau là, sur ce banc à m'attendre un soir de printemps.

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