Lettre à un(e) parfait(e) inconnu(e)

chleurk

Lettre à un(e) parfait(e) inconnu(e)

Bonjour à toi qui, assis(e ?) ou debout, lis ces quelques phrases, sans doute dénuées de tout sens.

Je ne sais qui tu es, si tu es homme ou femme, jeune ou vieux, avec ou sans enfant.

Je m'adresse à toi au travers de cette lettre car on a déposé devant ma porte cette valise. Elle contient un peu de tout. De l'intéressant et du plus banal, des vêtements, des carnets, des stylos.

D'où viens-tu, étranger/étrangère ? De quel pays ou planète éloigné(e) arrives-tu ? Car tu n'es pas d'ici. Les mots inconnus tracés par toi à l'encre noire, les morceaux de tissu ne m'apprennent rien sur tes origines.

Peut-être es-tu, comme moi, un peu perdu(e), peut-être te demandes-tu qui je suis, d'où je viens, ou je vais. Je me le demande souvent moi-même. Mais trêve de bavardage, je vais tenter de découvrir qui se cache derrière tes hiéroglyphes calligraphiés minutieusement.

-          Tu ne dois pas mesurer plus d'un mètre soixante-dix car tes vêtements me vont.

-          Tu es plutôt mince, disons du S/M, 40 en taille à tout casser.

-          Au vu des découpes et du style, je te donne entre trente et quarante ans.

-          Tu n'as pas d'enfants, car un parent ne se déplace jamais sans une photo de siens.

-          Tu es triste, déprimé, la joie de vivre t'a quitté(e) : tu ne portes que du noir, du gris ou du marron.

-          Ton écriture penchée et soignée montrent ton amour du travail bien fait, ton éducation et, potentiellement ?, te désigne comme femme. Mais je connais des hommes qui écrivent joliment (ça existe !).

A mes yeux, tu es une femme, sans emploi, sans perspective d'avenir. Je t'appellerais bien Valérie, Natalie ou Sandrine. A moins que tu ne sois un respectable monsieur prénommé Jean-Marc.

Disons que tu as trente-cinq ans, que tu vis en banlieue. Tu aurais bien aimé te marier et fonder une famille mais on t'a lâchement abandonné(e) sans espoir de retour.

Tu n'étais pas médecin, mais plutôt secrétaire. Va savoir, peut-être étais-tu professeur. Pourquoi pas un peu des trois ?

Tu lis des romans suintant de romantisme et des polars glacials et meurtriers. J'ai d'ailleurs bien aimé ton dernier livre de chevet. Toi aussi tu as remarqué l'incohérence de la page 324 ? Et la faute d'orthographe ou de frappe au début du chapitre 4 ?

Inconnu(e), ma sœur, mon frère, tu me ressembles.

Si tu voulais bien venir chez moi récupérer ta valise… J'habite dans ton immeuble, au même étage que toi. Ramène-moi mon chat si tu le trouves par hasard dans l'escalier. Il est roux. Comme le tien, si je ne m'abuse. Les poils orangés t'ont trahi(e). Arrive vers dix-huit heures, je t'attendrai avec impatience. N'oublie pas les clés, elles sont dans la poche droite de ta veste, celle qui est trouée au niveau du col.

Bien à toi, affectueusement,

Ta moitié schizophrène

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