Lettre au Sud

Grégory Veilleur

Cher Petit Sud,


Je ne suis pas sûr de pouvoir rester assez longtemps pour te regarder changer de nouveau.

J'étais pourtant intrigué de voir ton herbe pousser lentement au rythme de la saison, impatient de voir tes jonquilles sortir timidement, puis tes muguets fleurissant poliment avec le parfum de leur printemps.

J'étais même avide de revoir tes routes brûlantes sous le soleil cuisant, tes odeurs d'après-midis à l'atmosphere lourde et aux orages grondants, la saveur musicale de tes soirs ou il fait bon danser, le claquement des piscines aux odeurs de chlore qui se calment et s'applanissent sous la lune gonflée de cratères.

Je n'étais pas pressé que l'on soit encore ensemble à l'arrivée de ta mélancholie, tu sais, quand tu laisses jaunir tes feuilles, quand tu commences à te négliger. Tu as l'air tellement triste quand tu fais cela, comme stoppé en plein élan de générosité fruitée.

Cette année, je ne voulais pas te voir souffrir, quand consumé par ton affliction de froid et de pluie, tu te livres, petit légume, au gel et au verglas.

Quand tu fais pleurer les gens, torturés de ne plus goûter à l'astre solaire, puis quand lassé de ta barbarie, tu te montres magnanime et bon de nouveau, en inversant la donne, et en redevennant doux comme ton printemps.


Petit Sud, je ne serai pas là.


Un autre soleil m'attend quelque part.  

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