Lettre I
Sandra Von Keller
Ma Chère Dolores,
Je crois qu'il n'y a rien de pire que de devoir marcher avec des pompes de merde qui absorbent l'eau comme une éponge. Depuis quelques temps, je suis comme qui dirait à la rue et j'en subis les conséquences. Et pourtant, je travaille la nuit... Pendant que des gros porcs me passe dessus, je fais des rêves de luxe. C'est mon moyen d'échapper à toutes ces sales images. Tu sais... toutes ces méthodes de corps et d'esprit ça marche bien. De se dire qu'il est ailleurs...
Mais parfois ça dérape.
Un sale type m'a frappé très fort parce-qu'il disait qu'il avait l'impression de baiser une morte et que j'étais toute molle. Je m'étais évadé trop loin... Alors ma puce, selon les conséquences, je ne connais pas les tiennes mais je crois que mon conseil peut s'appliquer en général. Je te conseillerai donc de ne pas laisser ton esprit vagabonder trop loin... Tu vois ce que je veux dire ?
Je te connais bien que trop. Je sais que ton échappatoire préféré est de rêver et te perdre je ne sais où. Ne perds donc pas le contrôle ma chérie. Sois là et ailleurs. Mais pas complètement... C'est dangereux.
Tu comprends ? Je suis sincère, je ne plaisante pas, déconne pas. Purée je m'emporte. C'est juste que j'ai peur. Peur pour toi. Pas pour moi... c'est fini ce temps là je crois. Je suis arrivé à un stade où la pourriture et le vice m'envahit tellement que le danger me semble naturel et donc je sais le dompter. J'ai beaucoup plus peur du calme que de la tempête, tu me connais. Et puis je ne peux plus aller au delà maintenant... Je suis dans le grand trou noir et j'en bouffe de la misère je te le dis...
J'ai du vendre mes meilleurs disques et mon poste... Tu sais celui qu'on trimbalait toujours pour faire chier les gens prés de la fontaine, à faire la guerre du meilleur son. C'était le notre baby ! Ouais ! M'enfin voilà quoi... J'ai tout perdu... Je ne sais pas si je dois en rire ou en pleurer. Tu me connais, moi et ma dérision... Mais merde... Je ne dirais pas que je me complais dans le gouffre où je traîne en ce moment... J'ai les yeux bouffés de larmes à t'écrire, là, tu verrais ça, c'est laid, je ressemble à un panda. Je te jure que je pleure !
Je sais que tu ne m'as jamais vu faire ce truc donc je t'assure quoi... Il parait qu'une femme qui est vraiment belle doit savoir pleurer en beauté. Je dois probablement être la plus immonde des pleureuses. Enfin je ne veux pas que tu éprouves de la pitié ou quoi que ce soit d'autres. J'ai juste besoin, de parler, d'écrire et puis t'es la seule à comprendre mes petites voix et à m'aimer comme je suis.
Tu sais quoi... Je venais de me faire quelques billets... Mais on me les a fauchés, ça m'apprendra à trop les laisser traîner dans mes petites paumes de fillette. Ça dépasse ces choses là et ça me dépasse aussi. Bon, c'est cool, la poste a bien voulu m'offrir le timbre, je crois qu'ils ont eu pitié. Vu dans l'état que je suis...
J'espère que tu as toujours la même adresse. Evidemment, la mienne est inexistante. Mais tu peux toujours tenter l'Enfer, elle arrivera forcément à bon port ! Je vais te laisser car il se met à pleuvoir, j'ai pas envie que toutes ces petites lettres coulent et ne ressemblent plus qu'à une tache immonde même si ça serait beau tient, ça me ressemblerait. Bordel. Il faut que j'y aille.
Je t'embrasse ma Dolores. Tu me manques.
Je t'aime.
Livia
Ps : Ceci n'est pas ma dernière lettre. (Enfin, j'espère)