lettre ouverte à HYPSATOU SY
Patrick Ewonde
Je déteste les victimes quand elles respectent leurs bourreaux (Jean-Paul Sartre) Dans l'émission le Grand 8 sur D8, les chroniqueuses exprimèrent leur avis sur les propos à conotation racistes de Willy Sagnol à l'endroit des joueurs africains. Audrey Pulvar estima que Willy Sagnol véhiculait des clichés insupportables sur le joueur type africain dépourvu d'intelligence Votre sang ne fit alors qu'un tour. Vous fûtes alors prise d'une crise d'hystérie, vous éructâtes avec une violence inouïe comme si votre vie de bobo Parisienne en dépendait, vous hurlâtes parmi un tas de boue : « C'est insupportable d'entendre ça. On fait des polémiques avec tout et avec rien. Il a été maladroit, peut-être. On ne peut pas faire le procès à Willy Sagnol d'être raciste. Je n'y crois pas une seconde. Que le joueur africain ne soit pas cher, c'est une vérité. Que le joueur africain soit puissant, on le sait. Il ne dit à aucun moment que les noirs ne sont pas intelligents. Faut arrêter de sortir les phrases des contextes parce que j'imagine une seconde ce qu'il est en train de vivre, ce type qui joue tous les jours avec des noirs aussi » A la vue de cette vidéo supprimée depuis par la Chaîne D8, mais heureusement numérisée par un internaute prévoyant, mon sang se glaça, le temps se figea. J'eus alors l'impression de recevoir au mitan du cœur une décharge de plusieurs milliers de volts. J'étais groggy comme plusieurs milliers d'africains et d'africaines ulcérées et anéanties comme l'atteste le mécontentement qu'elles exprimèrent alors sur votre page Facebook où elles vous vilipendèrent en des termes d'une rare violence. Vous n'êtes pas au tribunal de l'inquisition, et loin de moi l'idée de me muer en quelque procureur de la république. Je ne suis pas Fouquier-Tinville, l'accusateur public du sinistre tribunal révolutionnaire post-1789, qui désignait les Français à la vindicte populaire et réclamait que leurs têtes furent guillotinées sans aucune forme de procès. Mon objectif n'est pas de réclamer votre tête, il est de vous réclamer les excuses au nom d'une communauté que vous avez humiliée et sacrifiée sur l'autel de vos intérêts personnels. Au nom de quoi et de qui seriez-vous tentée de me demander avec la meute de quelques africains atteints du fameux syndrome de Stockholm ?? Au nom de qui vous excuseriez-vous ? Je m'en vais vous le dire Madame Au nom de tous les miens, au nom de l'armée supplétive des tirailleurs Sénégalais créés en 1857 à Saint-Louis du Sénégal, par le gouverneur Faidherbe. Au nom de tous ces tirailleurs qui pendant plus d'un siècle participèrent aux deux premières guerres mondiales ainsi qu'à la défense et à la conquête de l'empire colonial Français et n'obtinrent que le dixième du solde attribué aux anciens combattants Français. Au nom de tous les miens, au nom de ces mêmes tirailleurs Sénégalais massacrés par l'armée Française au Camp de Thiraoye en 1944 au Sénégal, parce qu'ils réclamèrent simplement leur argent après avoir combattus aux côtés des français face à L'Allemagne Nazie, oui en leur nom, je demande que vous vous excusiez lors de votre prochaine émission sur D8 le mercredi 12 novembre Au nom de tous les miens et plus que jamais au nom de ces infortunés tirailleurs Africains, humiliés historiquement et moqués au 20 ème siècle dans des publicités abjectes Y a Bon Banania qui les représentaient les yeux exorbités, le nez épaté avec d'épaisses lèvres écarlates et le sourire extra large. Des affiches honteuses "Y a Bon banania" pullulèrent sur tous les murs de France et contribuèrent à la déshumanisation du nègre, à sa dévalorisation, à sa chosification, aux stéréotypes racistes qui façonnèrent forcément l'imaginaire des Sagnol de tout genre. Senghor votre compatriote eut d'ailleurs ces mots passés à la postérité : « J'arracherai les rires banania sur tous les murs de France. Au nom des millions de noirs réduits en esclavage pendant 400 ans , et morts à fond de cale ou lors de la traversée de l'océan atlantique( Le plus grand cimetière de l'humanité) je vous prie de vous excuser d'avoir avalisé, accrédité et défendu avec une rare violence les propos à connotation raciste de Willy Sagnol Au nom de ces millions de noirs esclaves dans les plantations d'outre-mer, et victimes expiatoires du code noir institutionnalisé par Colbert en 1685 sous louis XV et qui définissait le nègre comme un bien meuble. Au nom de ces femmes noires intrépides et résistantes ci-dessous qui me viennent à l'esprit. J'en oublie une foultitude. Faites acte de contrition. Au nom de La Guadeloupéenne SOLITUDE (appelée la mulâtresse) qui combattit en 1802 contre l'armée de Napoléon venue rétablir l'esclavage dans les caraïbes. Elle entendit l'appel du général LOUIS Delgrès, et combattit à ses côtés, un bébé dans le ventre. Elle fut pendue par l'armée Napoléonienne, le lendemain de son accouchement. De nombreuses femmes Guadeloupéennes livrèrent d'ailleurs des combats à l'armée de L'empereur au péril de leur vie. Elles préférèrent selon leur devise : Vivre libre ou mourir. Au nom de Myriam Makeba, résistante de première heure contre le régime d'apartheid D'Afrique du Sud qui annula son passeport alors qu'elle était à l'étranger. Elle ne put de ce fait se rendre aux obsèques de sa mère. Son pays fit d'elle une apatride à cause de ses prises de position contre l'apartheid. Devenue citoyenne du monde, elle obtint finalement dix passeports de dix autres pays. Au nom des amazones du Dahomey (ex BENIN) du roi BEHANZIN qui combattirent l'armée Française avec force détermination. Elles résistèrent longtemps à l'oppression de la France venue colonisée le Dahomey. Au Nom de ROSA PARKS, cette résistante noir américaine qui contribua à l'annihilation de la ségrégation raciale aux États-Unis en refusant de céder sa place à un blanc dans le bus. Au nom de tout africain qui s'est senti blessé par vos propos éructés, clamés avec une hystérie folle à une heure de très grande écoute. Au nom de Malcom X qui dichotomisait le nègre en deux états : Le nègre des champs et le nègre de maison. Inutile de vous préciser dans quelle catégorie la majorité d'africaines et moi-même vous situons... Vous vous en êtes sans doute rendu compte sur votre page Facebook. Je salue d'ailleurs ici la colère de mes sœurs africaines à votre endroit. J'exhale leur profond mécontentement à votre endroit. Au nom des indigènes Kanaks et des nègres venus d'Afrique qu'on exposait comme des bêtes sauvages dans des zoos humains lors de l'exposition universelle de paris en 1931 Au nom du peuple haïtien, première république noire en 1804, indépendance qui lui coûta très chère puisqu'elle fut sommée de dédommager la France de 150 millions de francs or, en échange de son indépendance. Somme Qu'Haïti remboursa de 1825 à 1946. AU nom de Toussaint Louverture, résistant Haïtien déporté au fort de Joux dans le Jura, parce qu'il voulait que son peuple fût libre. Il laissa à la postérité ses mots poignants empreints de lyrisme : '' Déracinez avec moi l'arbre de l'esclavage'' Au nom de Jean-Jacques Dessalines résistant Haïtien qui vainquit l'armée Napoléonienne du Général Leclerc en 1802 Au nom de tous ces résistants Haïtiens et Guadeloupéens massacrés par l'armée Napoléonienne en 1802, parce qu'ils s'opposèrent au rétablissement de l'esclavage par Napoléon qui déclarait en 1802 au conseil d'état : ''Je suis pour les blancs, parce que je suis blanc. Je n'ai pas d'autre raison, et celle-là est la bonne» Au nom des officiers noirs exclus de l'armée par Napoléon, dont le père d'Alexandre Dumas Au nom de Granny NANNY des Neg Marrons, figure emblématique de l'esclavage en Jamaïque qui fit échouée plusieurs attaques britanniques par son sens tactique et contribua à libérer huit cent esclaves. Au nom de ces indigènes des colonies Françaises de L'Afrique Équatoriale victimes de l'appétit vorace de Jules Ferry principal artisan de l'expansion de l'empire colonial Français. Il justifia la colonisation des terres africaines par ces termes ‘' Les races supérieures ont des droits et des devoirs de civilisation en vers les races inférieures'' ou encore : ‘' A quoi sert-il d'avoir inventé le bateau à vapeur, si ce n'est pour apporter la civilisation ?'' Au nom de tous ces forçats du travail morts en construisant à la main la ligne de chemin de fer Congo -Océan qui reliait Pointe-Noire à Brazzaville dans les années 30. Trente-huit indigènes nègres mourraient pour un kilomètre de voie ferrée construite. 20000 Congolais furent morts au total en construisant cette ligne de chemin de fer. Au nom de ces forçats du travail, vous devez faire acte de contrition. Au nom de tous ceux et de toutes celles qui quotidiennement se battent pour annihiler les préjugés racistes, les stéréotypes sur l'homme noir bête de somme, monstre physique dépourvu d'intelligence qui parle petit-nègre comme dans Tintin au Congo. Je conclus par ces mots de Jean-Paul Sartre : "Je déteste les victimes quand elles respectent leur bourreau." Puissent ces mots, réveiller votre conscience soporifique et conduire la brebis égarée que vous êtes dans des sentiers de vérité. Puissent ces propos de Sartre, susciter en vous de l'émoi et vous débarrasser pour toujours du satané « syndrome de Stockholm dont vous êtes manifestement atteinte.