L'héritière de Belladone (Rouge Glace)

Caïn Bates

         Le poison s'était dissipé à l'aube et, à peine avait il disparu de son organisme, Hobbes était sorti du camp sans un mot. Aussi discret qu'il puisse être, il n'avait pas pu échappé aux murmures de l'herbe écrasé et du vent qui soufflait sur son visage. Il m'avait sous estimé et ne ferai pas deuxième fois la même erreur. Malgré lui, la nature me guidait à chacun de ses pas et il ne pourrait pas me semer même en pleine nuit. Malheureusement pour moi, ce n'était pas ce qu'il avait prévu, c'était un piège. Une fois assez loin pour ne plus être à portée de cri du campement, il s'est arrêté et s'est assis devant l'entrée d'un petit terrier. Je ne pouvait plus avoir de doute, il savait que je l'avais suivi et quelqu'un d'autre devra payer si je ne me décide pas à assumer mes actes. 
         Je suis sorti de ma cachette, ma lame sorti de son fourreau et les mains bien en vue, je me suis approchée de lui. Avant même que j'apparaisse, il regardait déjà dans ma direction, il avait toujours su où j'étais. Son regard pénétrait toujours plus mon âme tandis que je m'approchais de lui, le bleu de ses yeux devenait toujours plus aveuglant et ses crocs sortaient lentement de la commissure de ses lèvres. Son visage prenait largement la forme de ses moments de rage subite. Il tendait une de ses mains vers ma gorge, elle était maculée de sang frais. C'est dans celle ci que j'ai placé le manche du kukri qu'il avait fait gravé, lame contre ma poitrine. Pendant de longues secondes, le bois était devenu silencieux, je ne pouvait entendre que les grognements qui s'étouffaient entre ses dents. Ses yeux restaient grands ouverts, ses doigts peinaient à se serrer sur le cuir tressé, sa mâchoire se tordait. J'ai fermé les yeux, attendant son prochain geste. 

        Il n'a pas bougé pendant toute la minute qui suivi, j'ai donc ouvert les yeux et j'ai était surpris de voir l'expression de son visage: un mélange de terreur et de douleur silencieuse. Quand j'ai enlevé mes doigts de la lame, elle est lourdement tombée à nos pieds sans que son corps ne trahisse la moindre réaction.         Derrière lui, un homme et deux femmes nous observent, l'homme arbore d'énormes bois sur la tête et les femmes portent des peaux animales sur leurs têtes et les épaules, l'une un renard, l'autre un loup. Je ramasse le kukri d'un geste vif et le pointe vers eux et m'approchant. Les fianas ne me font pas peur, j'ai trop souvent croisé leurs routes pour savoir qu'ils ne sont pas aussi coriace qu'ils paraissent le sembler. L'homme pointe la direction d'Hobbes, toujours sans un mot, et se tourne pour s'éloigner avec ses deux complices. Une fois éloignés, je regarde par dessus mon épaule et aperçoit des petits éclats brillants dans le dos de mon tortionnaire, des épines, probablement empoisonnées, plantées dans sa nuque, aux clavicules et au creux du dos. Voilà qui explique donc sa soudaine paralysie.

        Je n'ai plus une minute à perdre, ils se dirigent vers le campement de la Meute. J'assène à Hobbes une série de coups de poings violents dans le dos, ce qui le fait chuter au sol, avant  d'enjamber le cadavre éventré d'un lièvre et de me précipiter vers notre abri pour récupérer mes affaires dans ma tente. Au diable le Loup de givre, au diable la Meute et au diable les hommes. Je suis à nouveau libre... 

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