Liège
irae
Liège,
à longer se bout de Meuse
des reflets de phares et péniches endormies.
le vent précipité sous les ponts
fait sa ronde le long des halages
et s'aperçoit la tour des finances
ou la tour Paradis
preuve qu'on ne manque pas d'humour ici.
Liège,
le son de tes concerts
toutes ces fêtes, ces cries chauds
ville de l'héroïne et des mendiants
tu noies ton centre dans la pisse
et tires des sales tronches dans tes fanges.
Tu fais mine de me serrer la main, me frappe
et vole mon portefeuille.
Qu'importe que tu sois pauvre
je le suis aussi
et me transporte dans le fado.
Liège,
je brûle mes dernières cartes
peut être.
C'est la fatigue qui me bouscule
et inonde ma tête.
J'ai pris suffisamment de trains alcooliques
dans les bars, les nights, les balcons, seul
dans la gueule béante de Bruxelles
capitale-arrache-cœur
Et pourtant les nuits traînent les mêmes allures
si vite usées.
Les jours sont des années passées en seconde.
aux terrasses comme dans mon lit
je grignote la même peur
et tente d'articuler le pantin.
Liège, Bruxelles ou ailleurs
c'est pareil
l'état d'urgence
et la couleur de la pluie
je porte toujours la même veste
les même t-shirts sans motifs surplombé d'une chemise
et change de pair de pompe tous les deux ans.
Sur mon bureau la même pile de bouquin à lire
au coin du mur la même guitare et le même blues.
J'écris des chansons que j'oublie
et perds le sens des poèmes.
Je ne pense qu'à mon adolescence
et à me blottir dans des seins.
Liège,
je lèche la sève du bitume
à la recherche de liqueurs
et me plante dans les parcs
emmerdé par les moustiques
à attendre comme toujours
aumônier d'amour
à des heures folles de solitude
d'autres nuits à l'abri de soi
Liège,
je connais mon héritage
laisse-moi encore crécher un peu
le loyer je le paye de ma chair
je me paume, je m'abime
à chercher des express vers ailleurs
me calme aux anxiolytiques
bois trop mais ne fume plus par peur de mourir
c'est idiot
j'ai les guibolles de mon père
le même sommeil
et prends un peu d'avance avant que le cerveau ne déraille.
Ma ville, zone grise
prête-moi ton cœur
tu es un jazz triste
et je veux te danser
Ma ville, contemple
le ciment est en moi
depuis que ne m'émeu plus que tes artères.
Tout me dépasse et me tente à la fois
Liège, Bruxelles,
l'œil de la mort,
ma voix, mon visage
les plaines où poussent les tours.
les voyages longs courrier
ceux qui les empruntent
et l'esprit qui nous surplomb.
Alors Liège.
parfois je me balade
sans fric dans le portefeuille,
juste de quoi prendre une canette
et me pose le long du halage
et matte la tour paradis.