L'île onirique
Florence Garel
On raconte qu’il existe quelque part une île dont rêvait la mer. Elle l’avait demandé au ciel. C’est une île sauvage et inhabitée par l’homme. Les animaux y vivent en toute quiétude et seuls leurs cris résonnent et troublent le calme qui règne constamment dans ses lieux. Le vent mugit dans la nuit en une longue plainte lugubre à hérisser les cheveux sur la tête de ceux qui auraient la chance de s’y aventurer.
D’énormes rochers se hérissent semblant avertir les bateaux de passer leur chemin, contre lesquels les vagues viennent se fracasser à grands éclats. D’un autre coté, des falaises imposantes trônent. Nul endroit sur cette île n’apparaît un phare pour avertir toute embarcation du danger et aucune sécurité ne leur est permise contre les récifs pointus qui entourent l’île. Néanmoins s’étend entre deux énormes rochers une petite plage emplie de galets et une autre de sable blanc brûlant. L’une mène à une forêt, l’autre permet d’arriver jusqu’à de hautes montagnes qui surpassent de loin le Mont Everest et le Mont Blanc. La plus vertigineuse rappelle le Kilimandjaro.
La forêt sombre dans laquelle pénètre peu de lumière malgré le temps éblouissant et le climat installé sur cette île évoque les bois des contes de fées où se perdent les petits garçons et les petites filles. Cependant personne ne s’y perd car les seuls habitants présents sont les insectes et les animaux qui le connaissent complètement. Les petits animaux : mammifères, reptiles, y construisent leurs territoires Mais cette forêt est loin de ressembler à une jingle comme la forêt amazonienne. Des renards se glissent entre les arbustes à la recherche de proies. Des loups se promènent en meute maîtres craints des autres animaux. Des cerfs superbes broutent de l’herbe et montrent avec défis leurs bois. Des écureuils bondissent de branche en branche pendant que des paresseux s’y pendent de leurs longs bras poilus.
Malgré leurs différences et leurs particularités, ces animaux vivent dans la tranquillité. Si un visiteur tend l’oreille, il peut entendre le clapotement de l’eau derrière des buissons épais, provenant d’un étang, une eau clair et lipide, seul bruit qui vient troubler celui des animaux. Des oiseaux aux larges ailes planent dans le ciel bleu. Certains viennent se poser sur les branches des arbres, d’autres vont sur les rochers. Ils vont où ils veulent ; c’est leur domaine. L’eau coule pour se terminer en un magnifique torrent évoquant les chutes du Niagara. La forêt est immense et on pourrait croire qu’elle renferme quelque chose de magique. Les arbres qui y poussent sont de hautes tailles, immenses, et dépassent de très loin les arbres rachitiques qui poussent dans les villes.
Ce sont des arbres pleins de vie au tronc épais, d’une écorce solide, tous centenaires, certains millénaires et indestructibles avec de belles branches souples. Inutile de chercher à leur donner des noms, cela briserait le charme. Quelques-uns d’entre eux peuvent même sans prétention rivaliser avec un baobab. Ils ont assez de place malgré leur taille pour se développer. Les plantes qui y poussent et pullulent sans gène sont toutes aussi vivantes. Même des fleurs poussent sur le sol alors que la mousse verte et parfumée telle un cousin sommeille au pied des arbres. De larges sentiers naturels serpentent formant un véritable labyrinthe.
Cependant, cette île aux premiers abords paradisiaque renferme un sombre secret. Derrière la forêt, près des montage, cachée dans les colline se dresse une mense bâtisse hérissée de créneaux, tout droit sortie d’un film d’horreur, semblable à un château du Moyen Age. Nul ne sait se qu’il renferme et si quelqu’un l’habite mais il se pourrait que ce soit la bête sombre de cette île. Une immense porte, des tours gigantesques, des fenêtres étroites et sombres, des murs vertigineux : voilà les éléments principaux pour le décrire. Ce château ne renferme sans doute rien de bon comme secret mais personne n’a jamais pu le savoir et il vaut mieux qu’il en soit ainsi.
Car cette île dont rêvait la mer, comme pour toutes les choses, a une part de mal. Mais il n’y a aucun trésor dans cette île. Elle fascinerait tout de même les hommes si jamais elle vint à être connu. Ainsi, elle gagne à le rester comme l’étrange château qui se dresse dans ses terres. Ile de rêve, île de merveille, garde ton mystère ! Cependant, elle ne peut se préserver éternellement des intempéries. Comme pour tout, cette île a eu une naissance, alors elle connaîtra aussi un jour la mort. Cette naissance s’est produite voilà bien des siècles. Il n’y avait rien alors que la mer infinie et bleue.
Un jour, alors que la mer était plus triste qu’à l’ordinaire, le vent vint se poser juste au-dessus d’elle. La mère dit au vent qu’elle voulait une île. Mais pas une de ces îles reliées à la terre où manipulée par les hommes. Non, une île sauvage, unique et inconnu. Une île que rien ne pourrait détruire, où il n’y aurait que la paix et la tranquillité. D’abord ce ne fut qu’un misérable petit îlot. Elle devait grandir et s’épanouir pour devenir la plus belle île du monde. Pendant de longues années, elle resta inhabitée. Pas d’animaux, ni d’insectes et les arbres n’étaient pas encore très grand. Les premiers animaux arrivèrent presque tous en même temps. Ils étaient très petits et très faibles. Malheureusement, ils ne survécurent pas longtemps.
Des métamorphoses s’opérèrent pendant des centaines d’années. Le climat changea et devint plus doux plus vivable. Les froids violents disparurent tout comme les fortes chaleurs pour laisser place à un climat plus tempéré. L’île s’agrandit et changea plusieurs fois de forme tout au long de son évolution. Les montagnes apparurent bien pus tard. L’eau fut le seul élément toujours existant. En effet, il y avait toujours eu de l’eau. La plage est très récente et a été produit par la mer qui s’éloignait. Les galets ont été rejetés et se sont agglomérés naturellement. Des algues viennent parfois s’y accrocher et repartent lorsque la marée retombe. Celle-ci recouvre entièrement les deux plages lorsqu’elle est haute.
La bâtisse est apparue peu après. Nul ne sait qui la construite et à qui elle appartient. Elle fait, comme on dit, partie du paysage. Si quelqu’un a pris connaissance et est venue s’installer sur cette île ? C’est un secret. Quoi qu’il en soit, elle n’a absolument rien à voir avec le projet de départ. C’est la croix de cette île. Cependant, elle ne durera certainement pas aussi longtemps. En effet, cette bâtisse à cause des dégâts causés par le temps commence à tomber en ruine. D’ici une cinquantaine d’année, elle n’existera sans doute plus. Les animaux, eux aussi mourront et finiront par tous s’en aller. Ainsi, l’île redeviendra déserte et elle se laissera mourir à moins que n’apparaissent de nouvelles races.
Voilà l’histoire de cette île que la mer raconte au vent. Elle le supplie de la lui offrir telle qu’elle le désire. Le vent souffle sur les vagues et remonte. La mer attend, anxieuse et craintive qu’il prenne sa décision. Le vent semble hésiter. Il a bien compris ce que veut la mer. Soudain, il s’élance, passe sur la mer et revient. « Tu auras ton île » » ; lui promet-il. Puis s’en va, laissant la mer pleine d’espoir.