L'ombre sur la peau

loinducoeur

Peut-être ne l'ai-je jamais vue cette ombre... tout cela est-il fruit de mes songes nocturnes ?

J'y pense soudainement alors que ma main glisse de ta fesse encore chaude d'être restée sous la couette. J'aime cette sensation de capturer un instant de grâce aussi furtif soit-il. J'aime l'idée en fait de ce qui ne me quittera pas, aussi loin puisses-tu t'enfuir. C'est idiot de ma part non ? 

J'ai envie de croire que ce souvenir palpé s'ajoute aux autres, sans vraiment les effacer. Il est là tout prêt de moi, dans un recoin de ma tête alourdie de pensées sombres, et j'y tiens. C'est une bouée de sauvetage, témoin de ce que tout n'est pas encore perdu, tant que tu seras cette tiédeur dans ma main. J'aimerais te promettre que rien ne pourra jamais la remplacer mais pourquoi y croirais-tu ? Ma mémoire me trahit bien assez pour qu'il ne soit plus question d'être honnête. Je ne suis pas toujours moi, tu le crois.

Cette nuit, j'ai perdu la trace de nos désirs. Je me suis laissé porter bien trop loin vers demain et je m'y suis retrouvé vide de ton amour. Un voyage inutile et trop long pour mon corps défendu qui me laisse exsangue dans ces draps défraichis. Je voulais savoir ce que l'on nous réserve pour plus tard. Comme un enfant incapable d'attendre, j'aurais voulu que tu me réveilles et que tu me prennes contre ta poitrine douce. Et mourir là.

Mais l'ombre est sur ta peau comme elle est dans ma tête, impossible à saisir. J'attends que le soleil perce les volets qui nous cachent de la rue. J'attends que tu soupires en te tournant vers moi. Un matin de plus dans l'intimité de ton corps, et je pourrais ne plus y penser. Je resterai ébahi, les yeux fixant un plafond hors de portée, dans l'impossibilité d'une cavale.

Malgré tout, je lutte avec une évidente lâcheté pour ne pas te réveiller. Et je comprends que le temps, cet ennemi invisible, joue contre moi, contre nous. Souvent, il s'amuse à nous plonger dans une folle obscurité, alors même que nous sommes encore enlacés de plaisir. C'est dans ces instants là que la peur me prend d'être ailleurs. 

Je suis fragile, tu le sais. Et l'ombre qui déjà quitte ta peau m'indique assez bien que la distance est là, entre nous, comme un signal que demain ne durera pas.

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