Mages parmi les hommes ; ainsi naquit la légende (extrait)
Emmanuel Buriez
Le jeune guerrier regarda le corps du forgeron qui gisait sur le sol.
Une fois de plus, Stronger avait été contraint de tuer pour survivre.
Toujours affolé, il entendit les premiers soldats arriver.
Stronger saisit l'épée en or, il saisit aussi une ceinture fourreau, puis se précipita vers la porte qu'il ouvrit brusquement sur son passage.
Plusieurs soldats étaient en train de courir vers la forge lorsqu'ils l'aperçurent.
Stronger se mit à courir du plus vite qu'il pût, attachant la ceinture fourreau à sa taille.
Le chef de camp jeta un coup d'œil dans la forge.
- Il a tué le forgeron et volé mon épée ! Rattrapez-le ! Tuez-le !
Stronger courrait à toutes jambes, à toute allure, chaque foulée fournie était un pas de plus vers la liberté.
Il courrait vers la côte.
La mer était en marée descendante, ce qui signifiait que la mer était loin.
Encore un mauvais coup du sort...
Stronger continuait à courir, son épée était un poids inutile puisqu'il ne pouvait pas s'en servir, mais il la garda à sa taille.
Les soldats accourraient.
Il devait rejoindre la mer. Sa liberté en dépendait.
Une liberté si souvent espérée par les siens, si souvent rêvé par lui-même.
Il allait y arrivait. Il y arriverait...
J'y arriverais !
C'est mots lui parcoururent l'esprit avec force, avec une volonté rare.
C'était la réussite ou la défaite ; mais dans ce cas, la défaite s'était la mort.
Ses poursuivants n'étaient plus qu'à quelques mètres derrière lui.
Son cœur battait à tout rompre, le souffle lui manquait, un lourd point de coté martela ses côtes avec forces.
Il allait s'effondrer...
Non il fallait qu'il réussisse, au moins en l'honneur des siens.
Il leur devait bien ça ; il était le seul survivant, le seul qui à jamais se souviendrais, comme tous les enfants soldats il n'avait pas de famille, il n'avait pas d'amis, pas de fille dans sa vie qui faisait chavirer son cœur, lui seul pouvait continuer à honorer la mémoire de siens.
Les enfants mort au combat.
Il se souvint des corps étendu au sol, il se souvint des coups de fouet de leur martyre, il se souvint de la mort du marabout...
Ses poursuivants allaient l'écorcher, il était désormais à portée de lance, et les fuyards esclave n'avaient jamais de cadeau.
Il n'en pouvait plus ; il s'écroula au sol.
Les larmes lui venaient aux yeux ; il tremblait, mais ce n'était pas de peur.
Il tremblait de fureur.
Ses muscles se contractait sans même qu'il ait eu à y mettre de la volonté, ses doigts se crispaient sur le sol.
Sa mâchoire serrée aurait probablement pu déchiqueter un os de buffle.
Une émotion qu'il ne connaissait pas auparavant était en train de naître dans son esprit ; une émotion vive, une émotion douloureuse.
La haine de toute sa sombre splendeur brillait en lui.
Une haine d'une fureur rare ; une haine terrifiante ; une haine pure.
Ses poursuivants l'avaient rattrapé, l'un d'eux s'avançait sur lui.
Il réussirait à fuir, il se l'était promis. Son cœur et son âme en fureur, il se releva.
Un silence se posa...
Ses poursuivants s'approchèrent de lui...
C'est à se moment que Stronger se mit à frapper ; à frapper fort, ses coups étaient destructeurs, sa force était multipliée ; mais le Denryu n'y était pour rien, s'était sa haine qui le guidait ou plutôt qui le dirigeait.
Il sentait des obstacles sous ses coups, de la dureté, il entendait des bruits à chaque impact ; il ne voyait rien, la haine l'aveuglait.
Encore et toujours, il frappait ; et bien après que son dernier poursuivant ait succombé sous ses coups, c'est-à-dire le chef de camp ; il continuait à frapper...
De l'eau salée sortit de ses yeux... Il pleurait.
De nouveaux poursuivants firent leur apparition.
Ils étaient plus nombreux, et même avec la fureur de la haine qui coulait en lui, le jeune garçon ne parviendrait pas à les battre.
Il se remit à courir...
Il n'avait plus de point de coté ; il n'était plus essoufflé, il avait retrouvait sa vigueur.
Cette fois s'était bien lui, s'était le Denryu... Il s'était de lui même activait dans ses veines.
La plage se couvrit de soldat, ils surgirent de partout, tant d'hommes en action pour essayer de rattraper un enfant qui mesurait à peine un mètre cinquante, et qui plus ait un esclave...
Il était à quelques mètres seulement d'une pirogue; encore quelques pas !
Une lance se planta là ou était Stronger il y a un dixième de seconde.
Il bondit en avant, saisit la pirogue et poussa de toutes ses forces, cependant celle-ci glissa sur le sable aussi facilement que si elle avait été dans l'eau.
Une fois aux abords de l'océan, il s'élança...
Les vagues, hautes comme un homme, étaient nourries par la force de l'océan.
Stronger passa la pirogue au travers du mur de vague qui se dressait sur toute la longueur de la côte.
Des piquets fusaient autour du jeune garçon, un, vint même lui frôler la tête et rebondir sur sa pirogue.
Il ramait ; la pirogue cependant avançait plus vite qu'elle ne l'aurait du.
Ses bras étaient fins, ses muscles ne tiendraient pas la distance face aux soldats qui s'élancerait à sa poursuite, cependant il ne se découragea pas, il continua à ramer, à ramer encore, à ramer toujours...
La pirogue avançait vite, très vite.
Beaucoup trop vite pour que ses simples bras à peine musclés en soient responsables.
Le Denryu avait pris possession de l'embarcation.
L'enfant soldat arrêta de ramer, la pirogue avançait de plus en plus vite sans qu'une seule rame ne la pousse.
Ses poursuivants avaient pris à leur tour des pirogues ; mais il était trop lent.
Des dauphins firent des bonds hors de l'eau, ils semblaient suivre l'embarcation, tel des protecteurs bienheureux.
La pirogue s'éloigna ; tout comme la côte qui peu à peu s'effaça.
Un nouvel horizon ouvrait ses portes.
Les sourires des dauphins accompagnaient Stronger vers sa nouvelle destinée.
Stronger, était enfin libre...
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Emmanuel Buriez, extrait roman publié 2011 : Mages parmi les hommes ; ainsi naquit la légende 2006