Main de Fer sous Gant de Velours

chleurk

Il referma doucement la porte derrière lui et quitta l'appartement sur la pointe des pieds. Elle dormait toujours. Du moins le croyait-il. Il l'avait laissée, allongée sur le dos, la respiration calme et régulière. Elle avait retrouvé, dans son sommeil, un visage enfantin, un soupçon d'innocence, et tant de charme qu'il l'avait regardée dormir pendant des heures. Et il venait de la quitter sans un bruit, disparaissant dans la lumière rosée du petit matin.

Elle ouvrit un œil, puis l'autre. Son visage se fendit d'un sourire narquois. Elle n'avait pas dormi. Pas une seule seconde. Elle avait senti son regard sur sa peau, sa main dans ses cheveux, le délicat baiser qu'il avait posé sur ses lèvres avant de quitter le lit. Il était parti sans un mot. Il pensait ne plus avoir besoin de parler. Il était persuadé qu'elle et lui se comprenaient d'un seul regard. L'imbécile !

Elle s'enroula dans le drap bleu ciel qui recouvrait le lit et se leva doucement, avec une grâce féline qui n'appartenait qu'à elle. S'installant au bureau, elle ouvrit un tiroir, fouilla dans les papiers, renversa les pots à crayons, et trouva enfin ce qu'elle cherchait. Un petit carnet noir enfoui sous une pile de factures. Un objet simple, banal, qui passerait facilement inaperçu pour n'importe quelle personne. Elle l'ouvrit et sourit en découvrant la liste de noms qui noircissait chaque page. Enfin ! L'aboutissement de presque six mois d'une enquête incessante et épuisante.

Elle remit le bureau en ordre, rassembla les piles défaites, referma les tiroirs jusqu'à ce qu'on ne puisse plus distinguer aucune trace de sa fouille. Elle enfila son chemisier brun et son pantalon crème et glissa le carnet dans son sac à main. Puis elle se rendit dans le salon et appuya sur une latte de parquet spécifique, déclenchant ainsi un mécanisme qui révéla un coffre-fort dissimulé derrière un tableau. Elle avait le code depuis plusieurs semaines déjà. Aussi, lui fut-il aisé de déverrouiller la serrure et de fourrer les liasses de billets et les quelques bijoux dans un attaché-case vide. Elle referma le coffre, remit le tableau en place et attrapa sa veste. Un coup d'œil dans le miroir lui permit de rectifier sa coiffure et son maquillage. Elle embrassa la pièce d'un ultime regard et sortit, claquant la porte derrière elle. Dans la poubelle la plus proche, elle se débarrassa discrètement de ses papiers d'identité et de son portefeuille avant de remonter la rue d'un pas vif, aérien, et disparut dans la foule qui se pressait sur le trottoir.

Il l'avait laissée, sûr et certain de la retrouver en rentrant. Elle venait de partir avec la certitude implacable qu'ils ne se reverraient plus.

Naître. Se Créer. Mentir. Partir. Recommencer.

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