Maintenant, elle est parfaite
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Nous la regardons, telle une brindille blanche enroulée dans un lit de coton. Nous sourions pour ne pas pleurer, nous respirons pour ne pas mourir.
Elle est là, elle nous regarde de ses yeux clos. Comment fait-elle ? Je ne sais pas, mais elle y arrive. Je me sens suffoquer sous son regard vide.
Toi aussi tu me regardes, tu fixes mes yeux rouges d'avoir pleuré, mes lèvres tremblantes de faux sourires. Elle est si parfaite là, à nous présenter son rire faiblard. On ne l'entend même pas, il est comme lointain, comme inexistant. C'est comme si nous venions de l'inventer pour qu'elle nous pardonne.
Tu me prends la main, comme pour m'empêcher de sauter dans un trou et m'y enterrer. Tu sais que maintenant j'en serais capable. Toi aussi, tu le pourrais.
Pantin sans vie, je sens mes doigts se refermer sur toi, et tu te tais, avant même de parler.
Je suis désolée.
Mais ne t'inquiète pas, elle est parfaite. Il n'y a plus rien à changer. Maintenant, tout le monde parlera d'elle, et jamais il n'y aura d'horreur à son égard. Car elle est parfaite.
Je veux que tu lui envoies un baiser, maintenant, pour moi. Ne gâche pas tout, embrasse là, devant moi. Fais-moi déculpabiliser.
Je n'ai rien fait ? Tu te trompes.
Tu me vois, tu fixes mes yeux injectés de sang, de noirceur. S'il te plait, dis-lui au revoir.
Nous regardons une foule noire l'approcher, comme des prédateurs près à lui arracher les yeux, les cheveux, le sourire.
Ce sourire qui n'a jamais existé...
Je pleure encore, tellement.
Je deviens un lambeau de peau larmoyant, fou.
C'est trop tard.
Ils ont refermé le cercueil.
Mais maintenant qu'elle est morte, elle est parfaite.