Marvin

Bon, c’est pas gagné. Le Super Visor du Mac trouve que je ne donne pas tout au boulot ! Mais c’est quoi donner tout au boulot ? Il est ouf ce mec ? Déjà, je me lève à pas d’heure pour aller bosser, genre deux heures de l’aprem ! Et ce petit con prétentieux de chez « J’m’y crois » trouve à redire ! Je t’emmerde : huit heures sans broncher pour un pauv’ neuf cents euros et je ne serais pas à fond ? Ben ! Oui mec, je me lève pour tes horaires d'esclavagiste et je taffe. Je deviens colérique quand on me cherche, non mais ! Alors silence, t’es pas La vérité, t’es qu’un naze ! Et j'm'en fous, j'ai d'autres choses qui me préoccupent.

La petite sœur de Marvin est super belle et quand je la vois qui passe dans l’allée de l’Europe en bas des immeubles, je me demande si je vais partir au Japon. Nan, sérieux, cette meuf est magnifique. Elle s’appelle Mona, Moon qu’ils disent ses potes. Attends je t’explique : elle a les cheveux jusqu'au creux des reins, noirs, épais, larges, qui brillent. Elle a des seins à faire mourir d’y penser et des jambes immenses que t’imagines autour de toi et tu dreams. En plus elle se la pète pas, elle dit « Bonjour, Jules » en baissant les yeux. C’est une reine. Je la kiffe, tu peux pas savoir. L’autre soir Marvin me dit quand j’arrive en bas de l’immeuble, après le Mac Do :
- C’est l’anniv de Mona samedi, ça tombe pile, elle a parlé de toi, tu veux venir ?
Et moi, je m’apesanteure, je me vrille, je me pulvérise et je le regarde comme un crétin.
- Ta sœur… demande… si… je viens, à son anniv ?
- Ben, oui quoi ? Elle demande. C’est en fonction des gens qui viennent qu’elle fait la bouffe, quoi. Les gâteaux et toutes ces conneries.
- Oui, enfin… je sais pas…
- Quoi tu sais pas ? Pauv’ tache, tu sais pas quoi ?
- Heuhhh… Oui, je viens. Elle aime quoi ta sœur ?
- Quoi, elle aime quoi ?
- Oh, Putain ! Tu fais chier, elle aimerait quoi comme cadeau ?
- Je sais pas moi, un narguilé ?
- Attends là, tu me fais quoi comme embrouille ? Un narguilé ? C’est toi minus qui veut une pipe ?
- Ouais, bon, elle aime les bagues avec des trucs qui dégomment. Tu vois ?
Oui, je vois. Elle aime les bijoux qui dégagent, des trucs brillants qui scintillent. Et je me dis que rien n’est trop beau pour elle et que le Japon se prend des kilomètres dans la vue et qu’il s’éloigne à la vitesse d’une comète qui a peur de la terre. Et je vois les yeux de faons de Mona qui regardent le collier que je lui offre, et ses cils qui s’affolent et mon cœur qui s’arrête et sa voix qui devient grave et ses yeux qui se relèvent vers moi et ses mains qui tremblent en prenant le collier et la boule à facettes qui s’arrête de tourner et les Fender qui s’arrêtent aussi et les copines de Mona qui chialent et mes potes qui la bouclent et Guetta qui explose et moi qui l’enlace et elle qui m’embrasse et merde ! Ma mère qui gueule du balcon qu’il n’y a plus de pain.
C’est trop dur, c’est trop con. Mona, le Japon, Mac Do, ma mère ! Putain mais qu’est-ce qu’ils ont à me bouffer ma race ?