Mémoire II
Emma Scott
Elle aurait sans doute dû refermer le dossier, clore une fois pour toutes cette affaire qui, en outre, n'avait pas tant d'importance.Elle gardait le souvenir d'une photographie en noir et blanc, une scène figée par le temps où la voix de l'homme pourtant résonnait à ses oreilles. Elle revoyait les mains noueuses de la vie aux champs, la puissance dans le bras, la vivacité dans l'oeil. La cheminée en arrière-fond semblait posée là, pas même mise en valeur par les trois chérubins qui, au pied de leur père, semblent impatient de voir Marie descendre pour venir les veiler. Le temps où le père-Noël n'était pas là, vêtu du commercial affligeant qui désaltère chaque génération depuis lors...
Les traits de la femme assise à ses côtés semblent pétrifiés par l'angoisse : s'agit-il de celle du nouvel appareil immortalisant l'instant où celle de cet homme, craint par tous, de toute façon ? Se ressaisissant, elle fouille méticuleusement la boîte afin d'y trouver le cliché. Derrière l'oeuvre figure le nom de chaque personnage, leur place dans le coeur de l'enfant qui perdit bien trop tôt ses parents... pendant la guerre, accident de train!!! Hé oui, ce train-là, chargé de tant d'angoisse errante, un train emplie de vies bientôt achevées... Ce train-là n'est jamais arrivé!!! L'issue n'auait pas été differente, moins de souffrance endurées malgré out, mais la différence tout de même....
Referment la boîte, elle sourit en direction du ciel ; à cette heure, perdue dans une solitudedésespérée, elle sait enfin : elle sait que lui, l'homme qui n'a compté que pour moitié dans le coeur de cete vieille femme, remariée après un veuvage trop précoce, est bien celui dont naquit sa branche de famille, laissant croitre de beaux bourgeons comme autant d'enfants. Une belle portée, trois mômes que leur mère nourrira au sein jusqu'à ce que l'ainé, celui de l'autre lit, puisse enfin ramener le salaire.
Quoi d'autre que le temps pour parfaire l'injustice du reniement. Peut-être pas facile de faire de lui son aieul, mais qu'importe ? Le frisson qui lui parcourt l'échine ne ment pas! Elle sait! Enfin!
J'aime la description de la vieille photographie. Vies brisées, la vie qui reprend, avec ses noeuds et ses découvertes.
· Il y a presque 13 ans ·aile68
Un très joli texte encore une fois
· Il y a environ 13 ans ·Nadège
Merci beaucoup à vous 2.
· Il y a environ 13 ans ·Emma Scott