Ménagez-vous!

Jean Claude Blanc

Ainsi parlait bougna fouchtra...

                        Ménagez-vous !

Si la vie vaut plus un clou

C'est ma règle, vous l'avoue

Fouine plus mon nez partout

N'allez pas me chercher des poux

Ne veux pas me rendre fou

Car la santé avant tout

 

L'avarice fait des jaloux

La discorde entre époux

Qu'en avez dans le caillou

SVP ménagez-vous

N'en suez plus sous le burnous

Pour finir dans un trou

 

J'éprouve un certain dégoût

Pour époux qui filent doux

Mes problèmes, les résous

On est sali que par la boue

Tords le cou à mes courroux

Tant mon ventre, ça le noue

Me dévore comme un loup

 

Restez seuls en liberté

Plutôt que mal accompagnés

Préférez les amitiés

Les rencontres inopinées

Amourettes finissent en drame

Gardez-vous des gentes dames

Vous possèdent, souvent vous damnent

Pacs d'alliance, à coups de tatanes

Si du fric toujours en panne

 

Pourquoi se faire du souci

Lorsqu'on n'a pas un radis

Craignant que d'être saisi

Par conscience qui nous nuit

Atteignant notre pur esprit

Sorte d'huissier, qu'à pas de prix

Payez-le à coups de fusil !

N'ai pas vu un coffre-fort

Suivre de près un corbillard

Plus de besoins, une fois mort

Feu de paille, les dollars

 

Me défile face aux critiques

Me donneraient la colique

Néphrétique, frénétique…

Donc pour ça pas bon public

Parodier les politiques

 

Passé l'âge me faire de la bile

Laisse ça aux mercantiles

Qui ne sont jamais tranquilles

De leur fric en empilent

Dont le cours est versatile

 

Cessé de croire aux sentiments

De me faire du mauvais sang

Ça conduit droit au néant

Les promesses, que du vent

 

Difficile de vivre en paix

En nous villes policées

Où on se fend de bonté

Pour des haineux émigrés

En retour mal remerciés

Lâchement se font sauter

 

Pourtant pas plus con qu'un autre

Brave chrétien, j'ai les mains propres

Prie les saints et les apôtres

Et la Vierge en sa grotte

Vainement frappe à leur porte

Que le diable sans doute m'emporte

 

Bien tout fait ce qu'on m'a prédit

Deux gamins que je chérie

Une femme qui m'a trahi

Même si je vis à crédit

Sûr d'atteindre le Paradis

 

Mais question humanité

Faut pas trop m'en demander

Solidaire le suis pour moi

Partage pas le même repas

Avec ceux qui crèvent de froid

 

Le passé m'a enseigné

Faut savoir raison garder

Surtout pas se dépenser

Roupillant toute la journée

La recette, l'ai éprouvée

 

Me sentant un peu patraque

J'ai consulté un psychiatre

Il m'a dit pas de miracle

Vous êtes bon, artiste foutraque

Pour vos vers, qui vous attaquent

 

Bien m'en a pris désormais

De mon crâne me méfie

Qui m'inspire des sonnets

Dont moi-même suis servi

KO debout, médusé

 

A ce vice trop camé

Ne fais plus de poésie

Rutilante de volupté

Car mon âme me l'interdit

 

Finalement ça m'arrange

N'étant pas sage comme un ange

Plus de couronnes de louanges

Je n'y perds pas au change

De séduire ça me démange

 

Sans avis, et sans pognon

Que le monde peut s'écrouler

Prudemment je me morfonds

Pas la peine le ramasser

Pas ma faute, âne bâtée

 

Si je me lâche de commentaires

Pas sévères, que doux amers

Qu'à l'usage des prolos

Qui se pèlent au boulot

Qu'ils ménagent aussi leur peau

En vaut la peine, bien au chaud

Bonne chère, soyez pas sots

 

Fuyez pas, n'ai pas la rage

Vous renseigne pas davantage

Flanchez pas, vous encourage

Ignorez ces beaux ramages

Que nous servent ces rois mages

Présidents rien qu'une image

Nous réduisent au servage

 

Que du bluff, leurs serments

Mentant arracheurs de dents

Solitaire, pas mécontent

J'ai gagné la clé des champs

Epargné de mes tourments

Mais grâce à mes vers luisants

 

Faites comme moi, vous en supplie

Ça ne tombe pas tout rôti

Faire la misère buissonnière

Profitez de cette Terre

D'évidence, libres comme l'air

Du genre anar, prolétaire

Vous cache pas que c'est ardu

Soudainement se mettre à nu

Face aux foldingues, désaxés

Rôdant le soir, affamés

Parlementaires assidus

Pour nous faucher comme les blés

Déguerpissez, hors de vue      

Seule planche de salut     JC Blanc mars 2018

Signaler ce texte