Mes croisades

Assise dans le noir, le teint cireux et fade,

Seule, je me prépare à mener mes croisades.

Allons ! Braves soldats, partons sans plus attendre !

A la quête du Moi, jusque dans les méandres

D'un passé oublié, d'un futur incertain,

D'un présent effacé, de ces soupirs malsains.

Et le ciel éclatant, qui nous chauffe le cœur

Repart innocemment, laissant place au malheur…

Aux anges je m'adresse, l'âme pleine d'espoir !

Mon cœur est en liesse, mon corps, lui, se prépare,

Aux complots intérieurs, aux blessés et aux morts,

Aux blessures extérieures, à mes larmes, au remord…

Oui ! J'ai cessé de croire aux bienfaits de l'amour !

Mais je garde l'espoir, grandissant chaque jour,

En la révolution que pourrait m'apporter

La frêle rébellion d'un esprit gangrené…

Ca y est ! C'est le départ, et les combats commencent,

Aurons nous la victoire, ou bien la décadence ?

Les cris, les attirails, les corps tombent avant l'heure,

Et du champs de bataille, s'élève une clameur

Que personne n'entend, personne si ce n'est moi,

Car cet enfer ardant n'obéit qu'à mes lois,

Encore faudrait-il en mon cerveau malade,

Renverser l'anarchie, par mes propres croisades…

Et la Danse Macabre, et le violon célèbrent

Mon esprit qui se cabre, mon oraison funèbre.

J'ai, depuis longtemps, égaré ma raison,

Et le pire, là, étant de s'en rendre bien compte,

Qu'on arrête les chars ! Qu'on laisse l'âme malade

Assise dans le noir, le teint cireux et fade…