Miettes de vers pour volatiles
Jean Claude Blanc
Miettes de vers pour volatiles
Dès la mi-mars les jours s'éclairent
L'hiver fait machine arrière
Un brin de soleil caresse les prés
Mère nature panse ses plaies
Tout reverdit, pas de mystère
Bourgeonnent les arbres frileusement
Les plantes vivaces sortent de terre
Le gel sévit, les nuits entières
Prudent se profile le printemps
Végète encore un vieux bouleau
Mais fait la joie des petits oiseaux
Qui lui réclament de quoi becqueter
Les réconforte d'écorces dorées
Belles mésanges sont aux anges
Une boule de graisse, modeste offrande
Sachant que je perds pas au change
Autour de moi, mènent sarabande
Sur ma fenêtre, gobes mouches chantonnent
Pas apeurées frappe au carreau
Comme je ne vois jamais personne
A moi de leur tendre, morceaux de gâteau
Quelques miettes suffisent à leur bonheur
Sautillent gaiement ces demoiselles
Reconnaissantes dames au grand cœur
Plus que nous-mêmes, riches en cervelle
Sacré spectacle que leur repas
Les regarder se disputer
A coup de bec, un bout de gras
Jamais assez de s'en gaver
Même s'enhardissent jusqu'à l'entrée
De ma cuisine toute désignée
Où même ma chienne trouve la paix
Je ne vais pas les pourchasser
Bien au contraire, les inviter
Quel réconfort que leur présence
Chez moi où règne le silence
Je respecte leur indépendance
Les mettre en cage, ça jamais
Je les préfère en liberté
C'est pourquoi je déteste les chats
Leurs ronronnements d'un air sournois
Puis qui se jettent sur leur proie
Indépendants, sans foi ni loi
Morte saison enfin renait
Retour à la vie, tant désirée
Rite des saisons qui se renouvellent
Déjà roucoulent les tourterelles
Que serions-nous sans ces prophètes
Qu'ont une boussole dans leur tête
Un baromètre, un thermomètre
Qui nous préviennent des tempêtes
Perchés au plus haut sur les crêtes
Habiles sereines sur leur fil
Pour leur petit bonheur tranquille
Loin des greffiers, ces enfoirés
Qui n'en feraient qu'une bouchée
Les vrais plaisirs sont les plus simples
Mais pour cela, faut se montrer humble
Quelle insulte, dire c'est la jungle
S'y plaisent les bêtes cools dans leur coin
Pauvre de nous, espèces d'humains
Qui vivotons en clandestin
Chardonnerets, mignons pinsons
Qui nidifient dans les buissons
S'y adonnent chaque jour avec ardeur
Quand c'est le moment de pondre leurs œufs
Remue-ménage, ces laborieux
Vers les mésanges va ma faveur
Pour toutes ces belles du seigneur
Tiens table ouverte à toute heure
En quelque sorte, resto du cœur
Evidemment y font honneur
Gracieuses, charmeuses, volètent en bandes
Même sans cesse m'en redemandent
Sachant que je suis de leur lignée
C'est mon devoir les protéger
Cédant toujours à leurs caprices
Le savent bien, qu'on est complices
Plus le printemps passe, plus se révèle
Cette faveur venue du ciel
Retour strident des hirondelles
Ces émigrantes qui ne manquent pas d'ailes
En attendant, jolie mésange
Picore les graines et en engrange
Insouciante du gros matou
Mais peut compter sur moi vieux fou
J'ai mon fusil à ma portée
De sa naïveté, j'en suis jaloux
Y'a pas plus digne humanité
Tous étourneaux, rêveurs, distraits JC Blanc mars 2017 (hymne aux oiseaux)