Nathalie 2

aile68

Lire sur les lèvres, Nathalie savait le faire, c'était notre petit secret à toutes les trois, elle, Marie-Luce et moi, et même le compagnon de Nathalie n'était pas au courant, surtout pas je dirais! Nathalie nous racontait ce que les clients disaient en catimini, ce n'était pas toujours marrant, mais les clients... Moi j'aurais aimé lire dans les pensées cependant Marie-Luce me disait que j'aurais été malheureuse car même les gens en apparence bons ont des pensées à coucher dehors, j'aurais été trop déçue ou stupéfaite de les connaître. C'est vrai parce que moi-même j'avais de drôles de réactions en mon for intérieur, je m'explique: je déteste les bisous et les "je t'embrasse" à tout va, mais je me sentais obligée de prononcer ces mots "bisous" etc, c'est surtout quand j'étais au téléphone que ça se produisait et bien lorsque je raccrochais j'adressais un "connasse" à mon interlocuteur, ou bien "ouais c'est ça". ça c'était avant. Avec le temps, je me suis radoucie. J'ai plus la valeur de l'amitié et des amies auxquelles je tiens. J'ai retrouvé  ces dernières après mon "passage" en Italie, ou plutôt "épopée", "la chevauchée fantastique", "le film d'une partie de ma vie". Jamais je ne connaîtrais cela à nouveau! Jamais. C'est bien cela qui me renfrogne, me contrarie, et les mots sont faibles. En France j'ai l'impression d'être la pâle copie de moi-même, il n' y a qu'avec mes amies que je suis réellement moi-même, pas besoin de compagnon, je suis pleinement moi et heureuse de vivre. Sauf que je ne les vois pas si souvent que ça mes amies Nathalie et Marie-Luce. Nathalie à Paris et dans son grand magasin et ses lumières blanches, Marie-Luce dans ses montagnes de Savoie et son gîte où elle accueille touristes et mordus de la nature. Et moi, un peu paumée, tour à tour joyeuse et nostalgique d'une période terminée, achevée et archi-finie. ça c'est en mon for intérieur car en apparence j'ai remonté la pente: j'ai fait une formation de fleuriste, au début c'était bien et ça l'est toujours d'ailleurs, je vis par et pour les fleurs, dans ma boutique je suis bien mais les clients ne sont pas toujours sympas. ça m'étonne car je croyais naïvement que les fleurs pouvaient adoucir le coeur des gens. Seulement voilà, certains cherchent la petite bête, et d'où viennent les fleurs, et combien de temps ont-elle voyagé, est-ce qu'elle ont été congelées, une avalanche de questions qui vous mettent dans l'embarras.

Et puis il y a les éternels romantiques qui passent régulièrement ou l'adolescent timide qui vient acheter une rose à sa dulcinée, comme elles ont de la chance ces femmes à qui l'on offre des fleurs! Et puis il y a l'original, l'unique, le seul, le vrai qui m'a offert un petit bouquet à moi, la fleuriste, du joli mimosa de Nice qui embaume encore mon coeur.

(à suivre)

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